Situation de départ
Wadi Al-Hitan – également connu sous le nom de Vallée des baleines - est situé dans le désert occidental de l'Égypte. C’est un « musée en plein air » où l’on peut voir les restes fossiles inestimables du plus ancien ordre des baleines (Archaeoceti), désormais éteint, ainsi que d'autres restes fossiles préhistoriques et de divers animaux sauvages. Le grand nombre, la concentration, la qualité et l'accessibilité de ces restes fossiles a valu à Wadi Al-Hitan son inscription sur la Liste du patrimoine mondial en 2005. Propriété de l'État, le site est fortement protégé par la loi égyptienne, à savoir la loi de protection des réserves naturelles, qui interdit toute intervention susceptible d’entraîner la destruction ou la détérioration de l'environnement naturel.
Les principaux groupes de visiteurs sont des touristes étrangers qui campent généralement pendant la nuit sur le site, qui est difficile à atteindre. Depuis la mise en œuvre de stratégies de tourisme durable dans la zone protégée de Wadi El-Rayan, dont Wadi Al-Hitan fait partie, le nombre de touristes n’a cessé d’augmenter – autour de 12 000 visiteurs ont été enregistrés en 2008.
Quelles actions ont été entreprises?
Les moyens par lesquels les visiteurs peuvent accéder au site ont été limités, afin de permettre un meilleur contrôle du nombre de visiteurs. Les véhicules sont interdits, et Wadi Al-Hitan ne peut être parcouru qu’à pied ou à dos de chameau dans le cadre de visites guidées le long d'un sentier prédéfini. Le découpage de zones dans la zone protégée elle-même permet de pratiquer un éco-tourisme contrôlé dans certaines zones tout en réservant les autres aux activités de recherche ; des installations pour les visiteurs, bien conçues, permettent de les guider vers les sites clés par des chemins pédestres et offrent un hébergement limité sur place.
Priorités stratégiques
- Préserver l'intégrité et la beauté naturelle de Wadi Al-Hitan.
- Permettre la poursuite de la recherche scientifique sur les restes préhistoriques.
- Mettre en place un système de tourisme durable qui réponde à la fois aux besoins d'un tel site, fragile, et à ceux de la communauté locale.
Qu’est-ce qui a fonctionné?
La principale préoccupation a été la sauvegarde des restes fossiles, très fragiles, qui a été possible en limitant l’accès des visiteurs. Dans le cadre du Plan de gestion (2008-2013) développé pour le site, la zone a été désignée « zone du patrimoine mondial ». L'accès des véhicules n’est pas autorisé, et le zonage de la propriété permet un éco-tourisme contrôlé dans certaines zones, tandis que les autres sont réservées aux activités de recherche. Toutes les visites doivent être arrangées d'avance, de façon à ne jamais dépasser le nombre maximum de visiteurs autorisés. En raison de l'éloignement du site, les touristes peuvent camper pendant la nuit, ce qui réduit la nécessité d'une infrastructure permanente qui empiéterait sur le paysage naturel et préhistorique de Wadi Al-Hitan.
La zone tampon est également gérée comme faisant partie de la zone protégée de Wadi El-Rayan. Des installations pour les visiteurs, bien conçues, permettent de les guider vers les sites clés par des chemins pédestres. Comme chaque groupe de visiteurs doit être accompagné par un guide attitré, il est possible de surveiller le comportement des visiteurs et, partant, de limiter leur impact négatif sur le site. Les points d'accès au site ont également été réduits et le périmètre du site du patrimoine mondial a été placé sous surveillance afin de réduire au maximum les possibilités d’accès par des visiteurs non autorisés.
Outre les stratégies de gestion des visiteurs, Wadi Al-Hitan : intègre les communautés locales, les entreprises et les autres parties prenantes dans la gestion de la zone ; est présenté comme un site de premier plan en matière d’éco-tourisme non intrusif et d'éducation environnementale ; fait en sorte que la conservation et le développement du site soient viables financièrement. En 2014, Wadi Al-Hitan a attiré des financements italiens pour l’installation de panneaux solaires, ce qui montre comment un site du patrimoine mondial correctement géré peut attirer une aide financière pour la poursuite de ses objectifs.
Quelles ont été les difficultés?
Wadi Al-Hitan couvre une superficie d'environ 200 km2 (zone tampon exclue). Il a donc été très difficile d’assurer la protection de la zone contre les visiteurs indésirables, par exemple, le trafic illicite de fossiles ou la pratique de fouilles non autorisées. Il n’y a eu qu’un faible fonds de départ et aucune aide financière du secteur privé pour contribuer à développer l'infrastructure ou assurer la formation du personnel qui a été nécessaire pour opérer les changements nécessaires sur le site. Avant l'inscription de Wadi Al-Hitan sur la Liste du patrimoine mondial, aucune politique n’avait été mise en place pour limiter l'accès des touristes ou restreindre le nombre et l'accès des véhicules.
Comment ont-elles été surmontées ?
Les nouvelles restrictions qui sont appliquées à Wadi Al-Hitan et le fait d’imposer que toutes les visites soient accompagnées par un guide ont ouvert des possibilités de création de nouvelles entreprises et d'emploi direct pour les communautés locales et les résidents.
Quels sont les résultats?
L’amélioration de la conservation du site, l'augmentation de la perception de sa valeur, et le développement communautaire sont les trois facteurs mis en évidence par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) comme des retombées positives des stratégies de gestion actuelles et du tourisme à Wadi Al-Hitan. Comme le nombre de touristes a été limité, l'infrastructure construite peut être maintenue au strict minimum, ce qui en réduit d’autant l’impact potentiel. La mise en place de visites guidées et d’une surveillance étendue pour limiter l'accès non autorisé a également réduit les répercussions négatives (détérioration, vol…) sur les restes fossiles fragiles répartis sur le site.
Outre la gestion stricte des visiteurs, la participation de la communauté est encouragée à Wadi Al-Hitan – l'industrie du tourisme a été développée à petite échelle avec des entrepreneurs locaux. Le renforcement des capacités dans le domaine du tourisme et de la sensibilisation au site ont été les principales priorités pour les communautés locales, et celles-ci ont eu des effets positifs en ce qu’elles ont permis d’améliorer la compréhension du site au niveau local et d’accroître les bénéfices financiers pour les entreprises locales.
Quels enseignements les autres peuvent-ils tirer de cette expérience?
Un patrimoine fragile nécessite des mesures spéciales pour le conserver, réduire tout impact négatif, et de préserver la valeur universelle exceptionnelle. Pour la majorité des sites du patrimoine mondial, il faudra mettre en place des mesures qui restreignent l'accès des visiteurs, comme des itinéraires prévus pour les visites ou la pré-réservation des excursions.
Wadi Al-Hitan compte de nombreux vestiges archéologiques, dont certains n’ont pas encore été découverts et ne sont pas répertoriés ; des mesures particulières ont donc été prises pour veiller à ce que ces restes non encore déterrés soient protégés et souffrent le moins possible du tourisme ou d’intrusions non autorisées (zonage entre les « routes touristiques » et les « zones inaccessibles »). Ces actions nécessitent de la main-d’œuvre et l’engagement de la population locale et des guides touristiques – il importe de faire en sorte que la stratégie de limitation de l'impact du tourisme n'ait pas également un effet négatif sur les communautés locales, et que des mesures incitatives (idéalement financières) soient mises en place pour s’assurer le soutien des parties prenantes.