Parc national Alejandro de Humboldt
Facteurs affectant le bien en 2008*
- Exploitation minière
Facteurs* affectant le bien identifiés dans les rapports précédents
Exploitation minière
Assistance internationale : demandes reçues pour le bien jusqu'en 2008
Montant total approuvé : 0 dollars E.U.
Missions sur le bien jusqu'en 2008**
Problèmes de conservation présentés au Comité du patrimoine mondial en 2008
Le 1 février 2008, l'Etat partie a remis au Centre du patrimoine mondial un rapport sur l'Etat de conservation du bien, avec, entre autre, des précisions sur l'état d'avancement du projet de réactivation des concessions minières. Ce rapport, très général, fait état de:
a) Un certain nombre de zones forestières dans le périmètre et aux alentours du bien qui ont auparavant subi les conséquences de l'exploitation minière et de l'agriculture montrent aujourd'hui des signes croissants de récupération, bien que le taux de récupération environnementale soit généralement lent;
b) La conservation et la gestion du bien ont été améliorées depuis son inscription sur la Liste du patrimoine mondial grâce aux efforts déployés par le Fonds général pour l'environnement (Global Environment Facility, GEF) le WWF-Canada et d'autres ONG internationales. Ces actions ont renforcé les capacités de gestion sur le terrain et ont eu pour cible le contrôle et la prévention des feux de forêt, l'éradication des espèces exogènes, l'usage du Parc par le public et l'éducation à l'environnement.
c) En ce qui concerne l'état d'avancement du projet de réactivation des concessions minières, le rapport de l'Etat partie n'est pas très précis.
L'Etat partie signale qu'une concession de prospection minière dans la zone de Pilotos (au cœur du bien) a été accordée en 1996 à une joint-venture créée entre la société cubaine Moa Nickel S.A et la société canadienne Sherrit International. Aucune activité d'exploration ou d'exploitation n'a été menée suite à la décision de Sherrit International de se conformer à la politique du Conseil international de la mine et des métaux (International Council of Mining and Metals, ICMM) visant à ne pas exploiter de mines dans le périmètre des biens du patrimoine mondial. L'Etat partie ne donne cependant aucune information sur l'éventuel transfert de cette concession à une autre compagnie minière.
En 2004, la compagnie minière cubaine Moa Nickel S.A. a exprimé son intérêt pour l'exploitation minière des concessions de Las Iberias et de Cupeyal, aucune information n'est cependant donnée sur l'état d'avancement de ce projet d'exploitation de concession.
Quatre autres concessions minières, dans les zones de Camariocas Sur, Camariocas Este, Santa Teresita et La Delta, ont été attribuées à Moa Nickel S.A. en 2000 et 2006. Ces concessions sont principalement situées à la périphérie du bien, cependant certaines petites parties sont situées dans le périmètre du bien.
Dans l'Annexe 6 du rapport de l'Etat partie, une énorme concession, potentiellement attribuable pour exploration, la Fangosa, est représentée, cependant aucune information n'est donnée quant à son statut.
Enfin, le courrier accompagnant le rapport de l'Etat partie fait état de deux points importants. Premièrement, le Gouvernement cubain prévoit la mise en œuvre de toutes les études nécessaires permettant de définir le potentiel d'exploitation minière de la région où se situe le bien. Deuxièmement, et c'est plus inquiétant, alors que le Ministère cubain de l'environnement reconnaît l'incompatibilité de l'exploitation minière à ciel ouvert avec les objectifs de conservation du bien du patrimoine mondial, il propose de mener une étude d'impact environnemental afin de minimiser les impacts sur les valeurs du bien en utilisant la meilleure technologie disponible.
Le Centre du patrimoine mondial et l'UICN aimeraient souligner, sur la base du rapport de l'Etat partie et d'informations reçues, les points suivants:
a) A la lecture des cartes fournies par l'Etat partie, les concessions accordées à Pilotos et à Camariocas Sur auront des conséquences sur la partie est de la zone centrale du secteur de Cupeyal-Ojito de Agua; ayant ainsi un impact sur la zone centrale de El Toldo. Les concessions couvrent la crête et le plateau de El Toldo qui sont censés être les zones où se trouve la plus grande partie de l'endémisme à Cuba et sont d'importants centres d'endémisme global.
b) Le projet d'extension de la concession de Camariocas Sur aux limites du parc ne couvrent qu'environ 3 kilomètres carrés de la zone protégée, les conséquences de l'exploitation minière à ciel ouvert (y compris la construction de routes et la fréquentation par les humains) sont potentiellement catastrophiques pour la valeur universelle exceptionnelle et l'intégrité du bien. Par ailleurs, le projet de concession de La Fangosa recouvre environ les deux tiers de cette zone centrale alors que le projet de concession de Las Iberias couvre à peu près la moitié de la zone centrale de Jaguani, ces deux concessions représentent en fait environ 40% de la surface du bien;
c) La concession accordée à Santa Teresita couvre des zones au nord-est du bien et a un fort potentiel d'impact sur les zones maritimes de celui-ci. L'exploitation minière dans cette zone pourrait potentiellement augmenter les niveaux de toxicité des eaux d'écoulement ce qui, associé avec l'érosion des sols latéritiques acides, pourrait facilement avoir des impacts sur les cours d'eau et sur les écosystèmes de la mangrove dans la zone maritime du bien. En outre, le Centre du patrimoine mondial et l'UICN pensent qu'une extension des concessions dans le périmètre du parc impliquera une modification des limites, ce qui créera un dangereux précédent, si l'on se souvient des récents problèmes liés au Sanctuaire de l'oryx arabe, retiré de la Liste du patrimoine mondial. Le Centre du patrimoine mondial et l'UICN insistent sur le fait que sur ces deux zones centrales (les secteurs de Cupeyal-Ojito de Agua et Jaguaní) se trouvent les valeurs clés qui sont déterminantes pour la valeur universelle exceptionnelle du bien, les impacts de l'exploitation minière dans ces deux zones centrales auront donc des conséquences sur les valeurs clés pour lesquelles le bien a été inscrit sur la Liste du patrimoine mondial;
d) Comme l'Etat partie l'a reconnu dans sa lettre du 16 janvier 2008, et comme l'a confirmé une réunion indépendante d'experts de l'UICN, la seule façon d'exploiter des gisements miniers dans cette région est l'exploitation à ciel ouvert. L'extraction de minerai dans ces concessions requiert une exploitation de la surface du sol – sur environ 150 centimètres de profondeur, la végétation et le sol sont retirés afin de permettre un traitement des minerais hors site. Le résultat de ce type d'exploitation est une destruction totale et irréversible des écosystèmes dans les zones concernées. La prospection n'a pas les mêmes impacts, mais son principal problème réside dans la nécessaire construction de routes afin de prélever systématiquement des échantillons de terre, ayant en général recours à de gros camions et à des engins de forage. Ainsi, comme remarqué dans la lettre de l'Etat partie et confirmé par les experts, une telle activité et les équipements nécessaires ne sont pas compatibles avec les objectifs de conservation de ce bien du patrimoine mondial. Il est très préoccupant de noter que c'est lors de la proposition d'inscription du bien sur la Liste du patrimoine mondial ainsi que dans les années qui ont suivi cette inscription, que les concessions ont été accordées. Il est impératif, dans un tel contexte, que l'Etat partie prenne en considération la position du Comité du patrimoine mondial qui stipule que l'exploitation minière et que l'exploration et l'exploitation de gaz et de pétrole ne saura avoir lieu dans le périmètre d'un bien. Cette position a été approuvée par le Conseil international de la mine et des métaux, dans le cadre de sa Déclaration sur l'exploitation minière dans les zones protégées (2003).
e) Le Centre du patrimoine mondial et l'UICN voudrait par ailleurs insister sur les valeurs pour lesquelles le bien a été inscrit sur la Liste du patrimoine mondial, sous les critères (ix) et (x), qui sont intrinsèquement liées au maintien des écosystèmes existants, d'une topographie variée, d'une géologie sous-jacente complexe qui ont donné naissance à l'une des îles tropicales les plus biologiquement diverses sur terre. La lettre de l'Etat partie laisse la porte ouverte au développement minier dans ce bien du patrimoine mondial. Le Centre du patrimoine mondial et l'UICN font remarquer que l'exploration et l'exploitation minières à ciel ouvert dans ce bien conduiront à la perte de sa valeur universelle exceptionnelle, créant ainsi les conditions d'un retrait du bien de la Liste du patrimoine mondial.
Résumé des interventions
Décisions adoptées par le Comité en 2008
32 COM 7B.36
Parc national Alejandro de Humboldt (Cuba) (N 839 rev)
Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné le document WHC-08/32.COM/7B,
2. Rappelant la décision 31 COM 7B.37, adoptée à sa 31e session (Christchurch, 2007),
3. Prend note avec satisfaction l'engagement pris par Sherrit International (Canada) de s'abstenir de toute exploration ou exploitation des concessions minières accordées dans le périmètre de ce bien, et ce, conformément à la Déclaration du Conseil international de la mine et des métaux (ICCM) s'engageant à ne pas entreprendre ces activités dans le périmètre des biens du patrimoine mondial;
4. Demande à l'État partie de s'engager de façon claire et sans équivoque à fermer les concessions minières accordées dans le périmètre des limites du bien ou celles situées à sa périphérie susceptibles d'avoir des conséquences sur le bien;
5. Demande également à l'État partie de remettre au Centre du patrimoine mondial, d'ici le 1er février 2009, un rapport sur l'état de conservation du bien et une Déclaration d'engagement à s'abstenir de toute activité minière dans le périmètre du bien, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 33e session en 2009.
Projet de décision : 32 COM 7B.36
Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné le document WHC-08/32.COM/7B,
2. Rappelant la décision 31 COM 7B.37, adoptée à sa 31e session (Christchurch, 2007),
3. Regrette que l'Etat partie n'ait pas remis un rapport détaillé sur l'état de conservation du bien comme demandé, en particulier en ce qui concerne la possible réactivation des concessions minières;
4. Prend note avec préoccupation de la lettre de l'Etat partie laissant la porte ouverte à la possibilité d'autoriser l'exploitation minière au cœur de ce bien;
5. Prend également note que l'exploitation minière à ciel ouvert des zones centrales du bien et/ou des zones écologiquement liées à celles-ci est incompatible avec ses objectifs de conservation et son statut de patrimoine mondial et conduirait au retrait du bien de la Liste du patrimoine mondial;
6. Approuve et apprécie l'engagement pris par Sherrit International (Canada) de s'abstenir de toute exploration ou exploitation des concessions minières accordées dans le périmètre de ce bien, et ce, conformément à la Déclaration du Conseil international de la mine et des métaux (ICCM) s'engageant à ne pas entreprendre ces activités dans le périmètre des biens du patrimoine mondial;
7. Demande à l'Etat partie de s'engager de façon claire et sans équivoque à fermer les concessions minières accordées dans le périmètre des limites du bien ou celles situées à sa périphérie susceptibles d'avoir des conséquences sur les zones centrales du bien;
8. Demande également à l'Etat partie de remettre au Centre du patrimoine mondial, d’ici le 1er février 2009, un rapport sur l'état de conservation du bien et une Déclaration d'engagement à s'abstenir de toute activité minière dans le périmètre du bien, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 33e session en 2009.
Exports
* : Les menaces mentionnées sont présentées par ordre alphabétique ; cet ordre ne constitue nullement un classement selon l’importance de leur impact sur le bien. De plus, elles sont présentées de manière indifférenciée, que le bien soit menacé par un danger prouvé, précis et imminent (« péril prouvé ») ou confronté à des menaces qui pourraient avoir des effets nuisibles sur sa valeur universelle exceptionnelle (« mise en péril »).
** : Tous les rapports de mission ne sont pas toujours disponibles électroniquement.