Paysage culturel de Mapungubwe
Facteurs affectant le bien en 2010*
- Exploitation minière
- Habitat
- Système de gestion/plan de gestion
Facteurs* affectant le bien identifiés dans les rapports précédents
a) Absence d’une zone tampon appropriée
b) Absence d’un plan de gestion
c) Activités minières
d) Pression de développement
Assistance internationale : demandes reçues pour le bien jusqu'en 2010
Montant total approuvé : 0 dollars E.U.
Missions sur le bien jusqu'en 2010**
Problèmes de conservation présentés au Comité du patrimoine mondial en 2010
Le Centre du patrimoine mondial et les Organisations consultatives ont été alertés par des articles de presse, parus en février 2010, de l'accord d'une concession minière à la société australienne Coal of Africa Ltd (CoA) dans une zone mitoyenne à l'est du bien du patrimoine mondial, le Paysage culturel de Mapungubwe. La mine de charbon prévue de Vele Colliery est située à 50 kms à l'ouest de Musina, dans une zone à environ 7 kms des limites du bien. La concession est accordée pour extraire du charbon qui sera utilisé dans une centrale électrique thermique à charbon, pour laquelle un projet existe également. Les articles de presse précisaient que la concession avait été accordée par le Département des mines et de l’énergie, contre l'avis du Département des affaires environnementales qui a en charge la Zone de conservation transfrontalière (Transfrontier Conservation Area – TFCA) de Limpopo-Shashe et le Paysage culturel de Mapungubwe.
Le 9 mars 2010, le Directeur du Centre du patrimoine mondial a écrit à l'État partie en lui demandant de remettre, de toute urgence, un rapport sur l'état de conservation du bien faisant état du problème de la mine. À l'heure de la rédaction du présent rapport (mai 2010) aucun rapport sur l'état de conservation n'a été reçu de l'État partie.
Le Paysage culturel de Mapungubwe s'étend sur 30.000 ha et à sa limite nord, la rivière Limpopo sépare l'Afrique du Sud du Botswana et du Zimbabwe. D’après le dossier de nomination, le bien est protégé par une zone tampon de 100.000 ha entourant le bien au sud de la frontière internationale. Lors de l'inscription, un protocole d'entente trilatéral a été rédigé entre l'Afrique du sud, le Botswana et le Zimbabwe dans le but de créer la TFCA, une très vaste zone de 5.040 km² qui une fois mise en place entourerait le bien et constituerait, selon les termes du protocole, une zone tampon très efficace. À la suite de ce protocole, un accord a été signé entre les trois pays et il ne restait plus qu'à rédiger le traité. Il semble que les revendications territoriales de la famille Machete aient progressé. Elle a déposé une requête pour la totalité du Paysage culturel de Mapungubwe et 56 fermes environnantes et il semble que celle-ci ait été confirmée par le tribunal. Les sites du projet minier et de la centrale électrique sont à l’intérieur de la future TFCA.
Dans le dossier d'inscription, aucune carte officielle n'a été soumise tant pour la zone tampon que pour la TFCA. Seule une description des deux zones était disponible. Le Comité du patrimoine mondial a recommandé le renvoi de la décision afin que de meilleures cartes soient soumises mais, en fait, la décision d'inscription du bien a été prise. Les cartes de la zone tampon et de la TFCA ont bien été réalisées en Afrique du Sud mais elles ne décrivent pas la zone entourant le bien et définissent toutes deux des zones d'exclusion à l'est du bien, là où les projets de mine et de centrale électrique sont situés. Ces projets semblent donc être des modifications par rapport à ce qui a été mis en avant lors de l'inscription.
Le projet d'extraction minière a fait l'objet d'une évaluation d'impact environnemental (EIE). Il semble cependant, selon les informations reçues par le Centre du patrimoine mondial, que cette évaluation n'ait pas pleinement pris en compte les impacts sur l'environnement culturel et naturel. Les données de base semblent insuffisantes, beaucoup d'aspects connexes du projet n'ont pas été évoqués, des mesures d'atténuation inappropriées ont été proposées et le Centre du patrimoine mondial et les Organisations consultatives n'ont pas été consultés.
En ce qui concerne l'environnement naturel, des experts indépendants ont entrepris une évaluation sur des données recueillies dans les documents concernés et ont conclu que les évaluations d'impact n'avaient pas identifié correctement les impacts sur la quantité et la qualité de l'eau, et, qu'en conséquence, les mesures destinées à en atténuer les effets manquaient. Par exemple, le projet de déshydratation d'un aquifère pourrait avoir de graves conséquences sur les fermes situées du coté sud africain de la rivière Limpopo qui l'utilise à des fins d'irrigation, et donc, avoir une conséquence sur la sécurité alimentaire.
En ce qui concerne l'environnement culturel, l'évaluation d'impact s'est basée sur une étude superficielle de la zone et n'a pas pris en compte l'impact sur le bien du patrimoine mondial. Le 18 mars 2010, l'Association des archéologues professionnels d'Afrique du Sud (Association of Southern African Professional Archeologists – ASAPA) a fait appel de la décision d'accorder une concession minière. L'appel est basé sur le fait que l'EIE soit insuffisante et que lien entre la zone étudiée et le bien du patrimoine mondial n'ait pas été pleinement pris en compte. De récentes recherches ont démontré que la zone à l'est du bien est très liée aux zones situées sur le territoire du bien comme le prouvent les importantes représentations d'art rupestre tant sur le territoire du bien que dans la zone du projet minier et les considérables vestiges datant de l'Age de pierre et de l'Age de feu. L'appel précise également qu'il est estimé que le développement du projet conduira à l'industrialisation de la zone, qu'il aura un impact négatif permanent sur l'intégrité du patrimoine culturel et du paysage naturel, que l'impact sur les sites archéologiques et les lieux porteurs d'une valeur intangible sera permanent, et qu'il y aura un fort impact négatif sur le sens du lieu du Paysage culturel de Mapungubwe. Les membres de l'ASAPA concluent que toute la zone du bassin de Vele est d'une grande importance et que le développement potentiel d'une mine de charbon, même sur une petite surface de ce paysage, est préjudiciable en termes de génération de connaissance du patrimoine archéologique de toute la région.
L'appel souligne également les implications internationales du projet minier alors que les gouvernements du Botswana et du Zimbabwe envisagent actuellement la possibilité d'étendre le statut de patrimoine mondial à des zones liées au Paysage culturel de Mapungubwe dans leurs pays respectifs dans le cadre du processus d’établissement de la TFCA.
Deux emplacements ont été envisagés pour la centrale électrique près de Musina. Une évaluation d'impact environnemental des sites a conclu qu'on sait peu de choses sur la présence de ressources patrimoniales dans ce secteur bien qu'il soit probable d'y trouver des sites datant de l'Age de pierre et de l'Age de fer. L'EIE a recommandé que le projet d'aménagement puisse se poursuivre et qu'une recherche archéologique y soit menée une fois les travaux commencés.
En avril 2010, la presse annonçait que le droit de concession avait été finalisé le 12 mars 2010 et qu'il donnait son accord "inconditionnel" au démarrage du projet de Vele qui, selon les termes du contrat, serait achevé d'ici le 3e trimestre de l'année. Le 12 mai 2010, la presse signalait que "des baobabs géants et plusieurs hectares de forêt indigène" avaient été rasés par la compagnie minière sans qu'elle ait obtenu ni le droit relatif à l'utilisation de l'eau, ni aucune autorisation environnementale, ni permis de construire la route qui conduira au site minier.
D'autres articles de presse ont suggéré que la compagnie minière avait acquis des fermes, encore plus proches des limites du bien, car elle envisage d'étendre l'exploitation à ces secteurs.
Aucune information ne nous est parvenue concernant le statut de l'appel et la position du Ministère des affaires environnementales qui est responsable du bien.
Le Centre du patrimoine mondial et les Organisations consultatives sont très vivement préoccupés par l'impact potentiel des projets de mine, de centrale électrique et des développements associés à ceux-ci sur le Paysage culturel de Mapungubwe et sur la région environnante. La zone du projet minier est un secteur culturel très sensible qui est en lien étroit avec les attributs du bien et constitue son contexte et son approche en tant que paysage culturel. Ce secteur est également une zone naturelle extrêmement sensible qui est intimement lié au paysage général dans lequel il s'intègre. Tant en termes de culture que de nature, tout projet d'aménagement de ce site pourrait avoir des nombreuses conséquences dans de multiples domaines sur la durabilité du bassin de la rivière Limpopo, pourrait mettre au fin aux accords internationaux sur la TFCA et pourrait complètement détruire un paysage qui a un potentiel de contribution importante à la compréhension de l'histoire plus vaste de la colonisation humaine de Mapungubwe. Ce projet pourrait également polluer les eaux de la rivière Limpopo qui traverse le bien.
Le projet d'aménagement minier souligne l'absence de lisibilité dans les responsabilités en charge de la protection du bien telles qu'elles ont été conçues lors de l'inscription ainsi que dans la zone tampon telle que décrite au même moment. Les aménagements envisagés semblent également remettre en question la possible collaboration à venir avec le Botswana et le Zimbabwe sur le projet de TFCA.
Résumé des interventions
Décisions adoptées par le Comité en 2010
34 COM 7B.52
Paysage culturel de Mapungubwe (Afrique du sud) (C 1099)
Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné le document WHC-10/34.COM/7B.Add,
2. Prend note des informations détaillées communiquées par l'État partie dans le rapport de l'État de conservation du bien,
3. Exprime sa préoccupation quant à l'accord d'une concession minière pour l'exploitation de charbon à 5 kms des limites du bien, dans une zone hautement sensible proche de la rivière Limpopo sur le territoire de la zone tampon envisagée lors de l'inscription, zone qui est fondamentalement liée à la protection de la valeur universelle exceptionnelle du bien en termes d'attributs culturels et naturels;
4. Engage l'État partie à prendre les mesures appropriées pour s'assurer que la valeur universelle exceptionnelle pour laquelle le bien a été inscrit sur la Liste du patrimoine mondial ne soit pas affectée de manière préjudiciable par l'exploitation minière proposée et prie aussi instamment l'État partie de veiller à ce que ces mesures soient conformes aux recommandations de l'Atelier technique ICMM sur le patrimoine mondial et les mines adoptées à la 24e session du Comité du patrimoine mondial qui s'est tenue à Cairns, Australie, en 2000;
5. Note que certaines portions du bien sont soumises à une réclamation foncière] et demande à l'État partie de préciser quelles implications cette réclamation pourrait avoir sur la gestion du bien, et, de préciser clairement les limites de la zone tampon;
6. Demande également à l'État partie d'inviter une mission conjointe de suivi réactif Centre du patrimoine mondial/Organisations consultatives afin d'envisager les implications du projet minier sur la valeur universelle exceptionnelle du bien et la mise en place d'une zone tampon effective du bien ;
7. Prie instamment l'État partie de suspendre le projet minier jusqu'à ce que la mission conjointe Centre du patrimoine mondial/Organisations consultatives ait évalué les impacts miniers, et, de soumettre dès que possible tous les détails disponibles sur le statut de la concession minière accordée, le statut de l'appel auprès du tribunal, la position de l´Etat partie, et tous les détails sur les projets associés ;
8. Demande par ailleurs à l'État partie de soumettre au Centre du patrimoine mondial, d'ici le 1er février 2011, un rapport actualisé sur l'État de conservation du bien, faisant Etat des détails relatifs au statut de la concession d'exploitation minière, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 35e session en 2011.
Projet de décision: 34 COM 7B.52
Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné le document WHC-10/34.COM/7B.Add,
2. Regrette que l'État partie n'ait pas remis de rapport sur le projet d'exploitation minière et sur ses implications comme demandé par le Centre du patrimoine mondial dans un courrier en date du 9 mars 2010;
3. Exprime ses plus vives préoccupations quant à l'accord d'une concession minière pour l'exploitation de charbon à environ 5 kms des limites du bien, dans une zone hautement sensible proche de la rivière Limpopo sur le territoire de la zone tampon envisagé lors de l'inscription, zone qui est fondamentalement liée à la protection de la valeur universelle exceptionnelle du bien en termes d'attributs culturels et naturels;
4. Reconnaît que le projet d'aménagement ne semble pas avoir l'aval du Ministère des affaires environnementales qui a la responsabilité générale du bien et prend note des problèmes évoqués par les ONGs et de l'appel contre la décision d'accorder une concession fait par l'Association des archéologues professionnels d'Afrique du Sud;
5. Prend également note de la revendication faite par un propriétaire privé de la propriété du bien et demande à l'État partie de définir et préciser quelles implications cette revendication pourrait avoir sur la gestion du bien, et, de préciser clairement les limites de la zone tampon:
6. Demande également à l'État partie d'inviter une mission conjointe de suivi réactif Centre du patrimoine mondial/Organisations consultatives afin d'envisager les implications du projet minier sur la valeur universelle exceptionnelle du bien et la mise en place d'une zone tampon effective du bien;
7. Prie instamment l'État partie de suspendre le projet minier jusqu'à ce que la mission conjointe Centre du patrimoine mondial/Organisations consultatives ait évalué les impacts miniers, et, de soumettre dès que possible tous les détails disponibles sur le statut de la concession minière accordée, le statut de l'appel auprès du tribunal, la position du Département des affaires environnementales, et tous les détails sur les projets associés;
8. Demande par ailleurs à l'État partie de remettre au Centre du patrimoine mondial, d’ici le 1er février 2011, un rapport actualisé sur l'état de conservation du bien, faisant état des réponses aux points ci-dessus évoqués, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 35e session en 2011.
Exports
* : Les menaces mentionnées sont présentées par ordre alphabétique ; cet ordre ne constitue nullement un classement selon l’importance de leur impact sur le bien. De plus, elles sont présentées de manière indifférenciée, que le bien soit menacé par un danger prouvé, précis et imminent (« péril prouvé ») ou confronté à des menaces qui pourraient avoir des effets nuisibles sur sa valeur universelle exceptionnelle (« mise en péril »).
** : Tous les rapports de mission ne sont pas toujours disponibles électroniquement.