Le Comité du patrimoine mondial,
- Ayant examiné le document WHC/24/46.COM/7B.Add,
- Rappelant les décisions 44 COM 7B.83 et 45 COM 7B.8 adoptées respectivement à ses 44e (Fuzhou/en ligne, 2021) et 45e (Riyad, 2023) sessions élargies,
- Prend note des efforts soutenus de l’État partie pour contenir et dissiper la menace que représente l’avancée du front agricole dans la zone périphérique du bien, à travers les mesures appropriées prises pour résoudre définitivement les empiètements des exploitants installés sur l’emprise de la zone tampon, le bornage des limites du bien et la réalisation des études d’impact environnemental et social (EIES) par certaines agro-industries installées dans la périphérie du bien, et demande à l’État partie de poursuivre ses efforts afin de garantir l’intégrité du bien en conformité avec les recommandations de la mission de suivi réactif de 2022 ;
- Note positivement les progrès réalisés dans la lutte contre la prolifération des espèces envahissantes à travers l’enlèvement manuel de Tamarix senegalensis et le nettoyage du canal de récupération des eaux de drainage dans le secteur de flamant, exprime son inquiétude quant à la colonisation en cours de Ludwigia erecta dans le bien, ainsi que l’envahissement de certains plans d’eau par la salade d’eau et Salvinia molesta, comme noté par la mission de suivi de projet du Centre du patrimoine mondial de mars 2024, et réitère sa demande à l’État partie d’élaborer et mettre en œuvre un plan spécifique de gestion urgente des plantes envahissantes pour le bien ;
- Notant que des discussions sont en cours avec l’Union européenne, dans le cadre d’une soumission de proposition de projet auprès de LIFE IP GrassBirdHabitats, pour l’installation d’infrastructures de pompage et d’évacuation des eaux du canal vers le marigot du Gorom, comme mentionné à la mission de suivi de projet du Centre du patrimoine mondial de mars 2024, demande également à l’État partie et ses partenaires d’engager des discussions urgentes avec le Centre du patrimoine mondial et l’UICN sur cette question cruciale, et de partager toute documentation disponible et utile pour une meilleure analyse actuelle de la situation sur le terrain ;
- Note avec appreciation l’engagement de l’État partie à suivre les tendances des éléments caractéristiques de la VUE du bien à travers un suivi écologique regulier comprenant le décompte international annuel et le suivi mensuel des oiseaux d’eau dans le bien, et encourage l'État partie à poursuivre ses efforts de suivi écologique tout en standardisant la méthode de collecte de données ;
- Prend également note que l’État partie a developpé et met en œuvre un Plan d’aménagement et de gestion (PAG) 2022-2026, comme demandé par le Comité, avec le soutien financier du Grand-Duché du Luxembourg, et que ce document sera examiné par l’UICN afin de s’assurer qu’il traite de l’ensemble des questions cruciales relevées par la mission de suivi réactif de 2022, telles que la gestion des eaux, la gestion des risques de catastrophe, et les plantes envahissantes ;
- Exprime sa vive inquiétude concernant les potentiels impacts négatifs du projet de construction de la route « la boucle du riz » qui traverserait le bien sur environ 10 km et selon l'EIES, impacterait négativement la VUE du bien, rappelle que tout projet prévu au sein du bien, sa zone tampon ou son cadre plus large qui pourrait avoir un impact sur la VUE doit être évalué pour ses impacts potentiels conformément au Guide et boîte à outils pour les évaluations d'impact dans un contexte de patrimoine mondial, avant que des décisions difficilement réversibles ne soient prises, et demande en outre à l’État partie de reviser l’Etude d’Impact Environnemental et Social ainsi que le Plan d’Actions pour la Biodiversité de ce projet et que cela soit soumis au Centre du patrimoine mondial pour examen par l'UICN, avant toute approbation du projet et d’informer le Centre du patrimoine mondial avant le 1er octobre 2024 de l’état d’avancement de ce projet;
- Regrette que l’État partie n’ait fourni aucune information en rapport avec plusieurs demandes du Comité et réitère par ailleurs sa demande à l’État partie de poursuivre la mise en œuvre des recommandations de la mission de 2022, telles que soulignées dans le rapport de la mission et rappelées dans la Décision 45 COM 7B.8, notamment :
- Prendre d’urgence d’ici fin 2024 toutes les dispositions nécessaires pour finaliser la construction du canal d’évacuation des eaux de drainage,
- Mener dans les plus brefs délais les réflexions avec l’UNESCO et l’UICN pour élaborer un plan de dépollution du PNOD, un plan d’actions pour résoudre les problèmes liés à la salinisation croissante des sols et la sédimentation progressive et rendre opérationnel, le système de suivi de la qualité des eaux incluant le suivi des métaux lourds,
- Maintenir le niveau de vigilance concernant l’occupation du sol dans la périphérie du PNOD et suivre avec attention l’impact de la situation de faillite de la plus grande unité agro-industrielle implantée à la périphérie du PNOD afin d’éviter une réinstallation anarchique dans les espaces qui pourraient être laissés vacants par la fermeture de la Compagnie Agricole de Saint-Louis (CASL),
- S’assurer qu’aucun nouveau casier rizicole ne puisse être attribué dans la zone tampon du bien et qu’un plan de réduction de la nuisance sonore puisse être élaboré et mis en œuvre dans les plus brefs délais pour limiter les impacts liés à l’usage des canons effaroucheurs sur les oiseaux,
- Entreprendre dès que possible une analyse de l'impact de la grippe aviaire sur la valeur universelle exceptionnelle du bien et mettre en œuvre les recommandations issues de l’étude,
- Maintenir en poste pour une durée raisonnable (au moins trois ans) tout Conservateur nommé responsable du bien et nommer un directeur présentant les qualifications requises pour diriger la Station de Recherche Biologique et que cette station dépende hiérarchiquement du Conservateur du PNOD, seul responsable de l’état de conservation du bien,
- Renforcer l'équipe de gestion avec une dizaine d'agents supplémentaires formés et équipés et envisager des mécanismes innovants pour le financement durable du bien,
- Réactiver le Comité de Gestion pour rendre opérante la zone tampon du bien en le régissant par un texte réglementaire qui fixe son rôle, sa composition, son mode de fonctionnement ainsi qu'une prévision budgétaire nécessaire à son fonctionnement ; cette action devra inclure la redynamisation des Comités Inter-villageois (CIV) et de ses organes annexes (écogardes et écoguides) ;
- Note positivement qu’aucun cas de grippe aviaire n’ait été enregistré sur le bien, et demande par ailleurs à l’État partie de maintenir un niveau élevé de surveillance de la grippe aviaire, et ce jusqu’à la déclaration d’éradication de l’épizootie de manière coordonnée dans tout le Delta du fleuve Sénégal, incluant le Parc du Diawling en Mauritanie, compte tenu de l’importance des oiseaux d’eau migrateurs pour la VUE du bien ;
- Exprime son inquiétude quant à la persistance des differentes menaces à l’intégrité écologique du bien et sa VUE notamment la pollution des eaux, la prolifération des espèces envahissantes induites par les projets agro-industriels situés dans la zone tampon et la vulnérabilité des communautés riveraines du bien, telles que decrites par la mission de 2022, et rappelle également que si ces menaces ne sont pas traitées de manière urgente et rapide, le bien pourrait remplir prochainement les conditions d'inscription sur la Liste du patrimoine mondial en péril, conformément au Paragraphe 180 des Orientations ;
- Demande enfin à l’État partie de soumettre au Centre du patrimoine mondial, d’ici le 1erfévrier 2025, un rapport d’avancement, et, d’ici le 1er décembre 2025, un rapport actualisé sur l’état de conservation du bien et sur la mise en œuvre des points ci-dessus mentionnés, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 48e session.