Le Comité du patrimoine mondial,
- Ayant examiné les documents WHC/21/44.COM/8B et WHC/21/44.COM/INF.8B1,
- Inscrit les Sites préhistoriques Jomon dans le nord du Japon, Japon, sur la Liste du patrimoine mondial sur la base des critères (iii) et (v);
- Adopte la Déclaration de valeur universelle exceptionnelle suivante :
Brève synthèse
Les Sites préhistoriques Jomon dans le nord du Japon comprennent 17 sites archéologiques qui représentent le mode de vie préagricole et la culture spirituelle complexe d’un peuple de la préhistoire. Situés dans le sud de l’île d’Hokkaido et de l’autre côté du détroit de Tsugaru dans la partie nord de la région de Tohoku, ce bien en série témoigne de l’émergence, du développement et de la maturité d’une société de chasseurs, pêcheurs, cueilleurs sédentaires qui se développa en Asie du Nord-Est d’environ 13 000 ans AEC à 400 ans AEC. La série d’établissements, de sites funéraires, de sites rituels et cérémoniels, de cercles de pierres et d’ouvrages en terre est située dans divers types de paysages – montagnes, collines, plaines et basses terres – ainsi qu’à proximité de baies intérieures, de lacs et de rivières.
Cette région du nord du Japon possédait de riches ressources arboricoles et aquatiques, des forêts d’arbres à feuilles caduques qui comptaient de nombreux arbres à noix et des conditions de pêche idéales résultant de la rencontre de courants chauds et froids au large des côtes. Sur une période de plus de 10 000 ans, le peuple Jomon poursuivit son mode de vie de chasseurs, pêcheurs et cueilleurs sans passer à un mode de vie agraire, s’adaptant aux changements environnementaux induits par les périodes de réchauffement et de refroidissement du climat et les transgressions et régressions marines correspondantes.
Les populations Jomon commencèrent à se sédentariser il y a environ 15 000 ans, comme l’ont indiqué à titre provisoire dans un premier temps l’utilisation de la poterie, puis la construction d’habitations et de sites rituels plus permanents, ainsi que l’exploitation annuelle de ressources environnantes. Dès les premières phases de sédentarisation, les populations Jomon développèrent une culture spirituelle complexe. Ils élevèrent des tombes et créèrent des dépôts rituels, des tumuli et des cercles de pierres qui étaient probablement utilisés pour des rites et des cérémonies, confirmant ainsi un lien social entre les générations et entre les établissements.
Critère (iii) : Les Sites préhistoriques Jomon dans le nord du Japon apportent un témoignage exceptionnel d’une société préhistorique de chasseurs, pêcheurs et cueilleurs sédentaires, rare dans le monde, qui entretenait une culture spirituelle complexe, comme en témoignent les artefacts archéologiques tels que les tablettes d’argile portant l’empreinte de pieds ainsi que les fameuses figurines dogu à « lunettes de neige » et les vestiges de tombes, des dépôts rituels, des tumuli et des cercles de pierres.
Critère (v) : Les Sites préhistoriques Jomon dans le nord du Japon sont un exemple éminent de modes sédentaires d’établissement et d’utilisation des terres depuis l’émergence du sédentarisme jusqu’à son épanouissement et sa maturité finale. Le peuple Jomon a conservé un mode de vie basé sur la chasse, la pêche et la cueillette sur une longue période, s’adaptant aux changements climatiques sans altérer la terre de manière significative, comme le faisaient les sociétés agraires. Pour se procurer des aliments de manière stable, des établissements étaient installés en différents lieux, notamment à proximité des rivières, où l’on pouvait attraper les poissons remontant les cours d’eau, des estrans, où l’on pouvait pêcher les mollusques et les crustacés, et des forêts d’arbres à noix, où l’on pouvait cueillir des baies et des noix. Les outils et les compétences ont été développés pour se procurer de la nourriture en fonction des conditions spécifiques des différents lieux.
Intégrité
L’intégrité du bien en série repose sur les vestiges archéologiques qui illustrent les caractéristiques culturelles et les types de sites de l’ancienne culture Jomon dans le nord du Japon. Le bien est composé de sites archéologiques qui illustrent les débuts du sédentarisme et la séparation progressive entre les zones d’habitation et les zones d’inhumation ; de sites qui reflètent la diversité des établissements pendant la période chaude de transgression marine et des établissements centraux qui possèdent des sites rituels ; et enfin de sites qui démontrent la maturité du sédentarisme à travers des cercles de pierres, des cimetières et des établissements. Les sites révèlent aussi, dans une certaine mesure, leur interaction avec l’environnement. Les éléments constitutifs du bien en série sont individuellement d’une taille suffisante et, en tant qu’ensemble, ils renferment tous les vestiges archéologiques importants qui comportent des établissements et des espaces cérémoniels ainsi que des types de terrain et des caractéristiques qui signalent leur emplacement et leur environnement. Le bien en série est protégé par la loi et ne souffre pas d’impacts négatifs dus à des catastrophes naturelles ou à des développements à grande échelle. Il existe cependant plusieurs constructions modernes qualifiées d’« éléments non conformes », qui ont un impact sur les vues depuis et/ou vers les éléments constitutifs. Des plans visant à atténuer ces impacts, par exemple en plantant des arbres, ou à éliminer des éléments non conformes dans le futur ont été développés.
Authenticité
Le bien en série possède un haut degré d’authenticité en termes de situations, formes et conceptions, matériaux et substances, usages et fonctions, traditions et techniques et esprit et impression, la plupart des vestiges archéologiques étant restés enfouis et intacts pendant des milliers d’années ; certains vestiges, tels que les cercles de pierres, sont visibles à la surface du sol. Les vestiges archéologiques traduisent donc de manière crédible et véridique la valeur universelle exceptionnelle du bien pour ce qui est de l’ancienne culture Jomon dans le nord du Japon.
Dans certains cas, les autorités locales ont construit des répliques interprétatives grandeur nature de certains des éléments principaux, en particulier les habitations souterraines et les dépôts de coquillages. Ces répliques aident à expliquer aux visiteurs certains des éléments authentiques qui sont enfouis sous une couche protectrice de terre. Tandis que ces modèles grandeur nature sont présentés comme des répliques et non des reconstructions, et construites de manière à n’avoir aucun impact sur les dépôts archéologiques, de nouvelles technologies sont néanmoins explorées, qui pourraient aider les visiteurs à visualiser certains des éléments archéologiques authentiques qui doivent rester enfouis sous terre.
Éléments requis en matière de protection et de gestion
Tous les éléments constitutifs du bien sont classés et protégés par la loi sur la protection des biens culturels en tant que sites historiques ou sites historiques spéciaux, et des mesures strictes de protection et de conservation à long terme sont en place. En outre, une zone tampon appropriée a été délimitée autour de chaque élément constitutif, dans laquelle des mesures juridiques et réglementaires sont en vigueur pour contrôler les activités afin d’assurer une protection appropriée du bien.
Un plan de conservation et de gestion global définit les politiques de base pour soutenir la valeur universelle exceptionnelle, l’authenticité et l’intégrité du bien en série dans son ensemble. Le Conseil pour la conservation et l’utilisation des sites préhistoriques Jomon inscrits au patrimoine mondial et d’autres organismes ont été établis sur la base de ce plan. La conservation et la gestion des éléments constitutifs sont favorisées de manière globale sous la supervision du gouvernement national du Japon et en coordination avec d’autres organisations concernées. Les gouvernements locaux et préfectoraux d’Hokkaido, Aomori, Iwate et Akita en charge de chaque élément constitutif ont élaboré des plans de gestion et d’utilisation individuels et ont également intégré la conservation, la gestion et l’utilisation de chacun des éléments constitutifs dans leurs plans administratifs de base. L’état de conservation des éléments constitutifs individuels fait l’objet d’un suivi périodique et systématique sur la base d’indicateurs principaux spécifiques.
La question essentielle qui requiert une attention à long terme est que six des éléments constitutifs comprennent des zones détenues par des propriétaires privés. L’acquisition de la totalité de chaque élément constitutif permettra de mieux assurer la mise en œuvre d’activités de conservation pertinentes et selon un calendrier approprié.
- Recommande que l’État partie prenne en considération les points suivants :
- poursuivre le plan d’acquisition de toutes les zones des éléments constitutifs appartenant actuellement à des propriétaires privés,
- supprimer les éléments d’infrastructure non conformes ou atténuer leur impact,
- enrichir les informations sur les archives archéologiques et l’inventaire des objets archéologiques des éléments constitutifs (description des processus de fouille et d’enregistrement, et rapports de fouilles),
- adhérer aux principes de bonne gouvernance en gardant l’esprit ouvert à l’inclusion des parties prenantes qui ne participent pas encore à la protection et à la gestion du bien, conformément aux paragraphes 40 et 117 des Orientations,
- fournir des cartes de tous les éléments constitutifs du bien en série présentant une délimitation claire du bien inscrit, des zones tampons, des zones protégées en tant que sites historiques (spéciaux) et les « terres réputées comporter des biens culturels enfouis ».