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Parc National de la Garamba

Date de soumission : 31/01/2024
Critères: (ix)(x)
Catégorie : Naturel
Soumis par :
Délégation permanente de la République Démocratique du Congo auprès de l'UNESCO
État, province ou région :
Province du Haut Uele
Coordonnées 35 N 777081 462823
Ref.: 6709
Avertissement

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Les noms des biens figurent dans la langue dans laquelle les États parties les ont soumis.

Description

Localisé dans l’extrême nord-est de la RDC, le Parc National de la Garamba (PNG) a été créé en 1938. Il protège un bloc de savanes très ouvertes, couvrant 512.736 ha. Celui-ci est adossé à la frontière du Soudan du Sud et est entouré de trois domaines de chasse créés en 1974. A l’ouest, le DC des Azande couvre 405.294 ha. Au sud, le DC de Gangala-na-Bodio couvre 377.367 ha. A l’est le DC de Mondo-Missa couvre 182.762 ha. L’ensemble, le complexe de la Garamba, couvre donc 1.478.159 ha. En 1980, le PNG fut inscrit sur la liste des biens du patrimoine mondial de l’Unesco, principalement de fait qu’il abritait la dernière population du rhinocéros blanc du nord Ceratotherium simum cottoni. Cette espèce n’a plus été vue dans la nature depuis 2008 à la suite d’un braconnage incontrôlable. Le PNG possède toutefois d’autres valeurs qui lui confèrent une valeur universelle exceptionnelle. Il représente en effet la plus vaste aire protégée relativement intacte du nord de la RDC et est la plus riche aire protégée de cette région. Il est hautement représentatif pour la transition en mosaïque entre la forêt congolaise du nord-est et les savanes soudanaises. Il comprend toute la gamme des habitats qui caractérisent cette transition et, à l’exception de la disparition du lycaon et du rhinocéros blanc du nord, sa faune est complète et son écosystème de savanes est fonctionnel.

Justification de la Valeur Universelle Exceptionnelle

Le PNG couvre 512.736 ha de savanes et de formations forestières quasi intactes. Avec sa zone tampon de 969.423 ha, située dans les domaines de chasse des Azande, de Gangala-na-Bodio et de Mondo-Missa, il représente une étendue globale de 1.478.159 ha de savanes très diverses et d’îlots de forêts quasi intactes, situées entre 700 et 1000 m d’altitude dans le nord-est de la République démocratique du Congo.

Malgré une histoire très mouvementée, le Complexe de la Garamba présente une grande valeur sur le plan de la conservation. Il est hautement représentatif pour la zone de transition en mosaïque entre les forêts congolaises du nord-est et les savanes soudanaises. Il est en effet constitué d’une mosaïque dynamique de savanes herbeuses très ouvertes, de savanes arbustives et arborées, de savanes boisées et de formations forestières, typiques des différents stades de cette transition. En outre, il abrite un réseau dense de milieux humides qui contribue à sa biodiversité et augmente considérablement sa résilience par rapport aux perturbations d’origine anthropiques ou climatiques. Etant situé près de l’extrémité orientale de cette vaste zone de transition, sa faune très diversifiée montre un mélange d’affinités principalement congolaises, soudanaises et orientales. Il abrite cependant aussi un nombre d’espèces ou de sous-espèces endémiques ou subendémiques de la région centrée sur le nord-est de la RDC et le sud-ouest du Soudan du Sud. De plus, il abrite de nombreuses espèces menacées. Parmi les principales, figurent la girafe du Kordofan, la plus importante population “hybride” de l’éléphant de forêt, le lion du nord, le chimpanzé de l’est, le colobe rouge d’Oustalet, les quatre espèces africaines de pangolins et d’importantes populations d’hippopotames et de buffles. Cette faune a beaucoup souffert au cours des dernières décennies mais elle est actuellement stabilisée et la plupart des espèces sont en augmentation.

Critère (ix) : Son écosystème de transition forêt-savane de 512.736 ha — 1.478.159 ha avec sa zone tampon — possède en effet une valeur universelle exceptionnelle du fait de sa superficie considérable, sa diversité de formations d’âges différents qui représentent tous les stades de la transition entre les vastes savanes herbeuses très ouvertes et les forêts. Les savanes herbeuses, couvrent environ 30 % de la superficie du site. Elles représentent les seules grandes étendues de ce milieu dans le nord de la RDC. Les formations arbustives, arborées et boisées sont le siège d’une dynamique qui peut évoluer dans les deux sens en fonction de l’impact des feux, des grands herbivores et peut-être des changements climatiques. Du fait de la nature des sols et surtout de la distribution spatiale des facteurs déterminants cette transition prend la forme d’une mosaïque, typique pour cette région nord-est de la RDC. Les formations forestières, aux affinités nord-est congolaises, sont relativement peu étendues mais représentent la végétation climacique de la région et contribuent significativement à la richesse de l’écosystème. Ce paysage de transition forêt-savane a aussi favorisé la naissance d’une importante population d’éléphants de forêt ayant subi une introgression significative de l’éléphant de savane, sans pour autant que se forme une population panmyctique. Enfin, l’introduction du rhinocéros blanc du sud Ceratotherium s. simum ne remplace pas la forme du nord, aujourd’hui éteinte à l’état sauvage, mais elle remplace au moins le rôle écologique qu’avait cette forme.

Critère (x) : Le PNG satisfait aussi au critère (x) du fait qu’il abrite une grande diversité de milieux terrestres allant de la savane herbeuse ouverte à la forêt dense. Sur le plan zoologique, il compte au moins 161 espèces de mammifères, dont 13 espèces menacées, 7 espèces ou sous-espèces endémiques ou subendémiques du nord-est de la RDC et des régions adjacentes du Soudan du Sud et du nord-ouest de l’Ouganda. Les populations d’éléphant de forêt (Loxodonta cyclotis), de la girafe du Kordofan (Giraffa camelopardalis antiquorum), du chimpanzé de l’est (Pan troglodytes schweinfurthii), de la forme aequinoctialis du buffle d’Afrique (Syncerus caffer), de la forme nominale du lion (Panthera leo) sont très importantes pour la conservation de ces espèces. L’avifaune compte au moins 459 espèces, dont trois formes endémiques régionales, 11 espèces menacées et plusieurs espèces à distribution très restreinte ou connues de peu de sites. Dans le domaine des reptiles, la faune compte 83 espèces dont quatre espèces ou sous-espèces endémiques régionales et deux espèces menacées. La faune des amphibiens compte au moins 43 espèces dont trois espèces ou sous-espèces endémiques régionales, mais aucune espèce menacée.

Déclarations d’authenticité et/ou d’intégrité

Le PNG couvre 512.736 ha. Il est totalement inhabité depuis au moins 85 ans et ses paysages sont intacts. Sa zone tampon de 965.323 ha comprend essentiellement des savanes boisées et des forêts et savanes intactes à plus de 95%. Seuls le nord et le sud sont atteints par l’agriculture itinérante. Elle supporte une population humaine d’environ 284.993 habitants, ce qui représente une densité de populations globale de 29 habitant/km2. L’ensemble de l’écosystème de forêts et de savanes couvre une superficie de 1.478.159 ha. Par sa taille considérable, son relief peu accentué mais bien présent, son réseau hydrographique dense, ses gradients phytogéographique et écologique et sa vaste zone tampon, cet écosystème est capable de résister aux pressions des populations humaines et aux changements attendus du climat.

Comparaison avec d’autres biens similaires

Le PNG est un des cinq biens du patrimoine mondial en RDC, mais il n’a que très peu de points communs avec les quatre autres biens. Ceux-ci font partie de la région congolaise ou du rift Albertin, alors que le PNG appartient à la zone de transition entre le domaine des forêts congolaises et les savanes soudanaises. Cette zone de transition représente une écorégion bien individualisée, l’Ecorégion de la mosaïque de forêt-savane congolaise du Nord, qui couvre le centre du Cameroun, le sud de la RCA à l’exception de la région forestière du sud-ouest, le nord-est de la RDC et le sud-ouest du Soudan du Sud. Cette écorégion comprend 13 aires protégées ou complexes d’aires protégées dont six à l’ouest, toutes au Cameroun, et sept à l’est partagées sur la RCA, le RDC et le Soudan du Sud. En dehors du PNG, aucune de ces aires protégées n’est inscrite sur la liste des biens du patrimoine mondial. Malheureusement le PNG est sur la liste des biens en péril depuis plus de 25 ans. La région de la RCA, du Soudan du sud et du nord de la RDC connait en effet de graves problèmes socio-politiques depuis plusieurs décennies.

Au Cameroun, le PN de la Bénoué (180.000 ha), le PN du Faro (330.000 ha), le PN de Mbam et Djerem (423.000 ha) sont adossées aux forêts de Basse-Guinée, nettement différenciées des forêts congolaises, tandis que les aires protégées de la partie orientale de l’écorégion, à savoir le Réserve naturelle de Chinko (2.300.000 ha) et le Réserve de faune de Zemongo (1.010.000 ha) en RCA, le PN de Lantoto (76.000 ha), le PN de Shambe (62.000 ha) et Southern NP (2.300.000 ha) au Soudan du Sud, et le Complexe de Bili-Uere en RDC, sont tous en contact avec les forêts congolaises du nord-est et avec les savanes d’Afrique orientale. La grande faune comporte des espèces et sous-espèces communes, mais aussi des différences. Le bubale est représenté par la forme lelwel dans l’est, la forme major au Cameroun. Le cob de Buffon est représenté par la forme thomasi à l’est et par la forme nominale plus à l’ouest. De plus, il existe dans la partie orientale de cette écorégion plusieurs espèces endémiques ou subendémiques dont la distribution est centrée sur le nord-est de la RDC et le sud-ouest du Soudan du Sud. Parmi les mammifères, on peut citer Elephantulus fuscipes, Poelagus marjorita, Lemniscomys macculus, Sylvisorex oriundus, Mus sorella et Dologale dybowskii. Le rhinocéros blanc du nord n’existait récemment que dans la partie orientale (RCA, Sud-Soudan et DRC) tandis que le rhinocéros noir de l’ouest Diceros bicornis longipes était plutôt limité à l’ouest.

Parmi les oiseaux, il y a la forme eremobius de Ploceus baglafecht et la forme turdina de Illadopsis turdina. Parmi les reptiles, il y a Hemidactylus ituriensis, Ichnotropis chapini, Letheobia sudanensis et Atractaspis irregularis uelensis. Parmi les amphibiens, il y a Leptopelis oryi, Ptychadena ingeri et Hyperolius viriflavus pachydermus.

Les paysages du Cameroun sont donc nettement différents de ceux de l’est de l’écorégion. Ses aires protégées sont toutes relativement petites et la plus diversifiée est le parc national de Mbam et Djerem. Le pays est toutefois nettement plus peuplé que les autres pays de l’écorégion et les menaces sur la biodiversité sont très grandes. Elles proviennent principalement des activités minières, de la construction de barrages, de l’exploitation du bois, du braconnage et de la pêche. Elles sont considérablement aggravées par la mal-gouvernance. A titre d’exemple, un site forestier du patrimoine mondial, la réserve de faune du Dja, est menacé par la construction d’un barrage et par le braconnage incontrôlé. Bien que les aires protégées du Cameroun aient leur valeur propre, elles ne représentent pas des équivalents pour le complexe de la Garamba.

Les aires protégées de l’est de l’écorégion, sont nettement plus comparables au PNG. Malheureusement, peu ou pas d’informations récentes sont disponibles de celles du Soudan du Sud. Quant à la réserve de Bili-Uere en RDC, elle est immense (4.000.000 ha) , mais quasiment vidée de sa faune. Il reste donc les deux réserves de la RCA. Elles sont extrêmement vastes et le pays est très peu peuplé. Il souffre toutefois d’une instabilité socio-politique grave depuis de nombreuses décennies et a beaucoup souffert des incursions de braconniers soudanais et des pasteurs nomades mbororo. La réserve de Chinko a néanmoins été reprise en main par African Parks et sa situation s’est beaucoup améliorée dès lors. Dans l’ensemble, le Complexe Garamba n’est pas fondamentalement différent des aires protégées de l’est de la RCA. Etant donné le contexte sociopolitique très mouvementé et difficilement prévisible de cette vaste région, il est toutefois préférable de partager les efforts de conservation sur plusieurs sites comparables. Par ailleurs, les efforts de conservation déployés depuis plusieurs décennies dans le PNG semblent porter leurs fruits et méritent d’être reconnus.

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