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La résidence royale du Burundi : Le cas de Gishora

Date de soumission : 09/05/2007
Critères: (i)(iv)
Catégorie : Culturel
Soumis par :
Ministère de l'Education Nationale et de la Culture
État, province ou région :
Province : Gitega
Coordonnées S3 21 47 E29 55 19
Ref.: 5141
Avertissement

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Les noms des biens figurent dans la langue dans laquelle les États parties les ont soumis.

Description

Le Burundi était organisé en monarchie depuis le 15ème siècle jusqu'à la proclamation de la République du Burundi le 28 novembre 1966.

A l'époque de cette monarchie, chaque roi (umwami) avait des capitales  (Mbuye, Muramvya, Kiganda, Humure, Bukeye ...) disséminées dans le pays. Elles étaient plus concentrées dans la région de Muramvya. A la fin de chaque année, la cour royale  organisait la fête des semailles du sorgho (Umuganuro) à laquelle participaient, entres autres, les ritualistes de Gishora.

Le domaine royal de Gishora a été fondé par le mwami  Ntare Rugamba dans la première moitié du 19ème siècle après sa victoire contre le chef rebelle Ntibirangwa. Il se trouve sur le sommet de la colline Gishora dans la commune de Giheta à 7 km de la ville de Gitega.

1. La résidence royale ou ingoro

La spécificité de la résidence royale réside dans son architecture et sa technique de construction. Le cas de Gishora en est un exemple. En effet, résidence royale est constituée de trois cours inégales. Dans la résidence de Gishora,  la première cour ou avant-cour, appelée intangaro, abrite le sanctuaire des tambours sacrés. La deuxième la plus grande, qui est la cour royale, comprend la résidence royale (ingoro).  A l'époque, cette cour était généralement occupée par les grands chefs et  l'arrière-cour (ikigo) comprend l'habitation des servantes, la case de culte (indaro ya Rugabo) et les greniers. Cette cour était uniquement réservée à la famille royale. Avant d'accéder à la résidence, il y avait une place publique d'accueil  appelée inama. Ce lieu servait de premier lieu d'attente à tous ceux qui se présentaient à la cour.

Le caractère exceptionnel de la résidence royale (ingoro) se manifeste par sa technique de construction.  On trace la circonférence de la résidence grâce à deux unités de mesures liées appelées itambwe (une unité de mesure correspondant à un homme allongé à plat ventre sur le sol et bras levés). On plante ensuite un certain nombre de pieux et de perches (perches de Markhamia lutea, Spathodea nilotica). On creuse, tous les 30 à 40 cm, des trous de 50 à 60 cm de profondeur destinés à recevoir 45 à 60 pieux verticaux de 2 m de haut, entre lesquels on plante 120 à 200 longues perches (de 4 m environ) qui soutiendront le toit. Une fois que les pieux et les perches sont placés,  ils sont liés par un premier tore horizontal doublé faisant tout le tour de la construction. Ce tore est composé d'une âme de roseaux gainée de papyrus finement tressés.

Dans le même temps, une autre équipe confectionne la partie interne du toit à l'intérieur de la construction. Cette sous-toiture constitue la partie la plus originale de cette habitation royale. On tresse la voûte comme un fond  de panier renversé à l'aide d'un roseau de papyrus. Cette calotte est centrée sur une perche de la hauteur d'un homme ; on lui ajoute progressivement par-dessous trois cerceaux concentriques fabriqués à l'extérieur assemblés tous les 20 ou 30 cm. Le tout est soulevé au fur et à mesure de son élargissement par des perches fourchues de plus en plus longues et consolidé par des tiges radiales. Lorsque la coupole avoisine le diamètre de la case, elle est dressée définitivement à la hauteur voulue à l'aide de 13 piliers terminés par des sabots de faîte chevillés finement décorés par pyrogravure. La partie inférieure est alors solidement reliée au sommet des pieux au niveau du tore principal.

C'est alors seulement qu'on replie les perches extérieures sur la coupole pour les lier entre elles à une hauteur de 3,40 m, déterminant l'ossature bombée de l'habitation royale. La couverture est réalisée avec soin par des spécialistes. Ils déroulent d'abord une bande de 3 à 4 cm d'épaisseur de javelles liées tous les 30 à 40 cm au tore de base. Ensuite ils recouvrent l'ensemble par la chaume à partir du sommet sans le lier, en jetant cinq cordelettes.

La dernière opération consiste à planter le toupet (igisenge), tressé avec du papyrus et fixé par une quille de bois au sommet de l'habitation. On édifie par la suite l'encadrement de la porte et son auvent. Le chambranle, constitué de quatre montants verticaux en bambou d‘un mètre enfoncés dans le sol et entourés d'un fagot de fins bambous ficelés avec art par des cordelettes de papyrus, supporte un linteau cintré de même conception.

La paille épaisse de l'auvent, finement peignée et égalisée à la serpette, descend directement de la coupole et déborde légèrement sur les deux portes (porte d'entrée principale et celle opposée pour l'arrière-cour) très basses (80 cm) contribuant à la protection thermique. L'entrée principale est orientée vers le sud.

L'aménagement intérieur de cette résidence royale comprend  la pièce d'accueil, le séjour avec une couronne originale du  foyer qui comporte une poterie cylindrique d'un mètre de diamètre enfoncée dans le sol et un grand buffet, uruhimbi, (plan dressé en bambous) et enfin la chambre du roi et de la reine séparée par une cloison de papyrus et de stipes de bananier percée par une petite fenêtre. Elle permettait au roi d'observer tout ce qui se passait dans le séjour. 

Le tressage ingénieux des tores et sa fixation sur la charpente ainsi que le jeu des piliers constituent le décor exceptionnel de cette résidence royale de Gishora.          

2. Le sanctuaire des tambours sacrés

Le sanctuaire des tambours sacrés est une habitation (inzu) ayant une pièce unique qui sert de palais de tambours (ingoro y'ingoma) à vocation rituelle. Il abrite les deux tambours sacrés (Ruciteme et Murimirwa) couchés sur un établi et orientés vers l'entrée ainsi que les autres tambours posés verticalement à même le sol.  Les batimbo, ritualistes de la région et détenteurs de ce patrimoine, apportaient les tambours  à la cour royale à l'occasion de la célébration de la fête annuelle des semailles (umuganuro).

Le sanctuaire est également construit sur le même principe que la résidence royale, mais présente moins de finesse. En effet, sa structure porteuse constituée d'une petite voûte tressée en vannerie (papyrus) est entourée d'un fin cerceau en spirale (sept à huit tours) dont l'âme de palmes est gainée de cordelettes en papyrus. Aussi, cinq cerceaux doubles ou triples concentriques assurent la liaison avec la voûte de la toiture dont l'armature est également un faisceau de palmes, mais où le gainage est remplacé par de simples ligatures de papyrus. La couverture de chaume est habillée par une sorte de natte de papyrus sec tressée avec des cordelettes du même végétal. Il n'existe qu'une seule porte d'entrée.    

3. L'habitation des servantes

Cette habitation très simple est construite suivant le même principe que les précédentes et  n'a aucun décor spécifique. 

Toute la concession de la résidence de Gishora est protégée d'une part, par des arbres notamment les érythrines (arbres protecteurs), le ficus (utilisé pour la confection des vêtements) et les dragonniers et d'autre part, par une barrière naturelle à base de tiges de roseaux. 

Ce site,  placé sous la tutelle du Ministère de l'Education nationale et de la Culture, est géré par les ritualistes, les batimbo, appartenant au lignage  des  Banyagisaka. Ces familles ritualistes  sont à la fois fabricants et spécialistes de la percussion des tambours. Ils battent le tambour régulièrement sur ce site, les week-ends notamment.

Déclarations d’authenticité et/ou d’intégrité

Le sommet de la colline de Gishora est le lieu emblématique dans lequel le roi (umwami) Ntare Rugamba  séjournait en partie. Bien que sa résidence ait été reconstituée par les mêmes matériaux spécifiques à la construction de l'époque royale, elle a gardé son caractère originel. Cependant, la résidence de Gishora est menacée  par la détérioration de la couverture en chaume.

Comparaison avec d’autres biens similaires

Nous pouvons comparer les résidences royales du Burundi aux lieux de culte de Kasubi en Ouganda, de par leur similitude dans la technique de construction.
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