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Décision 45 COM 8B.4
Volcans et forêts de la Montagne Pelée et des pitons du nord de la Martinique (France)

Le Comité du patrimoine mondial,

  1. Ayant examiné les documents WHC/23/45.COM/8B et WHC/23/45.COM/INF.8B2,
  2. Inscrit les Volcans et forêts de la Montagne Pelée et des pitons du nord de la Martinique, France, sur la Liste du patrimoine mondial sur la base des critères (viii) et (x) ;
  3. Prend note de la déclaration de valeur universelle exceptionnelle provisoire suivante :

    Brève synthèse

    Situés au nord de la Martinique, au centre de l’arc insulaire des Petites Antilles, les « Volcans et forêts de la Montagne Pelée et des pitons du nord de la Martinique » constituent un bien forestier montagneux d’origine volcanique, composé d’une série de deux entités couvrant 13 980 ha : les massifs des Pitons du Carbet et du Morne Jacob, plus anciens au sud ; les massifs de la Montagne Pelée et du Mont Conil, plus jeunes au nord. Le bien présente l’ensemble des types forestiers des Petites Antilles, du littoral jusqu’aux sommets, intégrant des forêts climaciques et secondaires anciennes. Il témoigne d’une histoire géologique au fondement d’une géodiversité et d’une biodiversité exceptionnelles, remarquablement préservées.

    Au nord de l'île, la Montagne Pelée s'impose majestueusement, culminant à 1 397 m d’altitude. Elle est indissociable d’un évènement majeur dans l’histoire de la volcanologie moderne qui a donné son nom au type éruptif péléen : l’épisode éruptif de 1902, à l’origine de la mort de près de 30 000 personnes et de la destruction de la ville de Saint-Pierre le 8 mai. Les Pitons du Carbet forment, quant à eux, des dômes de lave aux formes extrêmement érigées, dont le point culminant, le Piton Lacroix, s’élève à 1 197 m. Ils constituent, par leur nombre et leur hauteur, l’expression la plus remarquable au monde d’un phénomène géologique très rare.

    Sur chacune de ces deux entités, le bien présente des noyaux de forêts climaciques et une continuité intacte d’écosystèmes végétaux allant du littoral aux sommets de la Montagne Pelée et des Pitons du Carbet. Ces aires volcaniques abritent d’excellents exemples de forêts humides très anciennes. Les forêts de basse altitude, plus sèches, y sont également très bien conservées pour les îles volcaniques tropicales. La flore et la faune, notamment endémiques, y sont exceptionnelles. Le bien se situe au sein d’une zone reconnue par la communauté scientifique internationale comme parmi les plus irremplaçables au monde.

    Critère (viii) : Les Pitons du Carbet et la Montagne Pelée illustrent remarquablement les morphologies et les mécanismes volcaniques propres à l’arc des Petites Antilles. Ainsi, les Pitons du Carbet forment des dômes de lave extrêmement érigés du fait de la grande viscosité des magmas dont ils sont issus. La cicatrice de la déstabilisation de flanc qui a permis leur développement est la plus grande de l’archipel des Petites Antilles. Au nombre de douze, dont cinq de plus de 1 000 m d’altitude, ils sont les plus représentatifs de ce phénomène géologique que l’on observe ailleurs uniquement à Sainte-Lucie. Le plus haut, le Piton Lacroix, atteint 1 197 m, soit le plus élevé au monde pour le processus géologique dont il est issu.

    Volcan iconique, la Montagne Pelée présente un type éruptif singulier, le dôme de lave à explosions dirigées latéralement, remarquable par la fréquence de ses éruptions passées.

    L’épisode éruptif de la Montagne Pelée de 1902-1905 a été particulièrement marquant. En effet, la nuée ardente du 8 mai 1902 a entrainé la mort de 28 000 personnes dans les minutes qui ont suivi l'explosion. Fait extrêmement rare, pendant l'épisode éruptif de 1902, 7 explosions successives se sont produites provoquant l’érection d’une aiguille de 350 m, la plus haute connue de toutes les éruptions à dôme.

    Cette éruption constitue une référence mondiale dans l’histoire de la volcanologie, ayant permis de décrire un des grands types d’éruptions volcaniques : le type péléen. Le site est, aujourd’hui encore, un lieu privilégié pour l'étude des sciences de la terre.

    Critère (x) : Le bien se situe au sein d’une zone prioritaire de conservation de la biodiversité au niveau mondial : le hotspot de biodiversité “Iles des Caraïbes”.

    Il héberge le continuum forestier le plus diversifié et le mieux conservé des Petites Antilles. Ce couvert végétal se caractérise par la qualité et la complétude des successions forestières qui rassemblent tous les types forestiers propres à la Martinique et aux Petites Antilles. Au cœur des versants nord-ouest du massif du Piton Mont Conil et sur les pentes inférieures du Pain de Sucre, ainsi que sur les reliefs du Morne Jacob, des formations végétales climaciques non perturbées sont préservées, particulièrement les types de forêts mésophiles et hygrophiles.

    Le bien abrite une flore exceptionnelle composée de 1 058 espèces de plantes vasculaires autochtones dont 816 spermatophytes et 242 ptéridophytes. 51 espèces sont menacées au titre de la Liste rouge nationale des espèces menacées (UICN) telles que le Calumet montagne Arthrostylidium obtusatum, le Fleur-boule-montagne Lobelia conglo­bata et l’Aralie Schefflera urbaniana, pour lesquelles le bien permettra d’assurer une conservation à long terme.

    La flore du bien est représentative de la grande diversité végétale des Petites Antilles et présente un taux d’endémisme régional élevé. Il existe 263 espèces de spermatophytes endémiques régionales (Petites Antilles). La Martinique à elle seule en abrite 186 (soit 71 %).

    L’île présente également un endémisme strict en spermatophytes le plus représentatif et le plus important des Petites Antilles : 37 espèces sur les 104 présentes sur l’arc. Le bien abrite 33 de ces espèces endémiques. Cela représente 1/3 des espèces endémiques strictes d’une île au sein des Petites Antilles. Parmi celles-ci, on retrouve : l’Ananas sauvage Aechmea serrata, le Bwa débas blan Myrcia martinicensis et le krékré wouj Charianthus nodosus. Leur présence se limite parfois à quelques stations au sein d’une seule entité du bien. La flore arborée y est aussi particulièrement riche et représente 87 % de la flore arborée des Petites Antilles (soit 401 espèces).

    Concernant la faune, le bien se situe dans le Parc naturel régional de la Martinique, classé parmi les 100 aires protégées les plus irremplaçables au monde, dans l’Endemic Bird area “Petites Antilles” et abrite deux Important Bird Area. La biodiversité animale vient compléter la richesse du bien car il abrite de nombreuses espèces endémiques et remarquables telles que l’Allobate de la Martinique Allobates chalcopis, le Murin de la Martinique Myotis martiniquensis, le Trigonocéphale Bothrops lanceolatus ou l’Oriole de Martinique Icterus bonana.

    Intégrité

    Le bien comprend deux des expressions les plus remarquables du volcanisme de l’arc des Petites Antilles. La Montagne Pelée est le stratovolcan le mieux conservé de la Caraïbe et le dernier volcan actif de la Martinique. Le sommet actuel est constitué des dômes emboîtés des éruptions de 1902 et 1929, dont l'extrusion appelée "le Chinois" est le point culminant à 1 397 m. La morphologie extrêmement érigée et accidentée des Pitons du Carbet leur confère une résistance aux pressions diverses.

    Les massifs montagneux sont protégés naturellement par de fortes contraintes d’accessibilité. La plupart des espaces sont constitués de forêts humides très anciennes restées éloignées de toute zone habitée et desservies par de rares sentiers aujourd’hui faiblement pratiqués, pour la plupart effacés par la reprise de la végétation.

    Dans les forêts plus sèches (mésophiles et xéro-mésophiles), la majorité des espaces naturels du continuum sont à des stades évolutifs âgés de plus d’une centaine d’années. À l'instar des autres îles de la Caraïbe, différents types d’occupations humaines depuis la période amérindienne jusqu’à la période coloniale ont entraîné des modifications ponctuelles du milieu (jardins créoles ou cultures de rendement) sur les parties basses des massifs. Quelques vestiges et traces subsistent aujourd’hui de ces anciennes occupations, où la forêt a repris ses droits. Cette phase de reconquête lente et graduelle sur une superficie aussi vaste est propre à la Martinique et unique dans l’arc antillais.

    Éléments requis en matière de protection et de gestion

    Le bien se situe au sein du Parc naturel régional de la Martinique. La majeure partie du bien bénéficie de mesures de protection forte de niveau national. Trois réserves biologiques intégrales (RBI) créées par arrêtés ministériels en 2007 (RBI Montagne Pelée) et 2014 (RBI Pitons du Carbet et RBI Prêcheur/Grand’Rivière), garantissent la protection des massifs et la libre évolution des écosystèmes forestiers. Le secteur du Mont Conil est protégé par décret depuis 1996, en tant que site classé au titre du code de l’Environnement (loi de 1930). En outre, depuis 2010, deux arrêtés préfectoraux de protection de biotope assurent la préservation des habitats naturels pour deux espèces menacées. Le bien se situe en grande majorité en propriété publique : forêt domaniale et propriété du Conservatoire du littoral.

    Depuis 2019, ces forêts publiques du nord de la Martinique bénéficient d’une reconnaissance nationale par l’attribution du label "Forêt d’exception".

    Dans le cadre de ces diverses protections, des plans de gestion spécifiques ont été élaborés. Ces documents de gestion et de valorisation trouvent leur cohérence dans le plan de gestion du bien. Celui-ci inclut également des actions de coopération avec les autres biens des Antilles, notamment en matière de gestion et sur l’amélioration des connaissances scientifiques.

    Bien que des menaces existent (réchauffement climatique, risques naturels, lutte contre les incendies, espèces exotiques envahissantes, développement anthropique…), les mesures de gestion permettront d’y faire face et de garantir le maintien et le renforcement de sa valeur universelle exceptionnelle.

  4. Souligne l’importance globale de la conservation de la biodiversité dans la région Caraïbes, point chaud de la biodiversité, et l’importance mondiale des forêts de la Martinique pour la conservation de la flore endémique des Petites Antilles ;
  5. Souligne également l’importance mondiale pour les sciences de la terre de la Montagne Pelée et des pitons du nord au sein des systèmes volcaniques des Caraïbes et de l'arc insulaire des Petites Antilles ;
  6. Note que le bien inclut les éléments fondamentaux de la valeur universelle exceptionnelle sur la base des deux critères, en particulier les attributs géologiques majeurs ;
  7. Recommande à l’État partie d’assurer la conservation de l’ensemble du bien et de sa zone tampon en prenant en considération les points suivants :
    1. Compléter les dispositifs de protection existants par des protections cohérentes et efficaces sur les géosites d’intérêt scientifique et pédagogique situés en zone tampon, et renforcer la capacité de gestion sur les attributs géologiques du bien pour assurer la protection et la gestion des valeurs géologiques,
    2. Étendre les mesures de protection de la biodiversité éventuellement par une extension des réserves biologiques intégrales à l’intérieur du bien ;
  8. Encourage l'État partie, à poursuivre et renforcer la coopération avec les autres États parties des Petites Antilles pour la conservation des espèces, des milieux et des valeurs géologiques ;
  9. Demande à l’État partie de soumettre au Centre du patrimoine mondial, d’ici le 1erdécembre 2025, un rapport sur la mise en œuvre des recommandations susmentionnées, pour examen par le Comité du patrimoine mondial lors de sa 48e session.
    Documents
    Contexte de la Décision
    WHC-23/45.COM/8B
    WHC-23/45.COM/INF.8B2
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