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Décision 39 COM 8B.7
Montagnes Bleues et monts John Crow, Jamaïque

Le Comité du patrimoine mondial,

  1. Ayant examiné les documents WHC-15/39.COM/8B, WHC-15/39.COM/INF.8B1 et WHC-15/39.COM/INF.8B2,
  2. Inscrit les Montagnes Bleues et monts John Crow, Jamaïque, sur la Liste du patrimoine mondial, sur la base des critères (iii), (vi) et (x);
  3. Adopte la Déclaration de valeur universelle exceptionnelle suivante :

    Brève synthèse

    Le patrimoine culturel et naturel des Montagnes Bleues et des monts John Crow comprend 26 252 ha de forêts ombrophiles tropicales de montagne dans les chaînes des montagnes bleues et des monts John Crow, situées dans le secteur oriental de la Jamaïque, dans les Caraïbes. Ces deux chaînes couvrent environ 20% de la partie terrestre totale de l’île et sont reconnues pour leur importance en matière de biodiversité dans toute la région des Caraïbes. Le bien a une hauteur allant de 850m à 2 256m et il est entouré d’une zone tampon d’environ 28 494 hectares. L’altitude, le paysage déchiqueté et les versants des montagnes orientés vers le nord et vers le sud expliquent la grande diversité des types d’habitats riches de neuf communautés écologiques dans la haute forêt montagnarde des montagnes bleues (plus de 1000 m) et des monts John Crow (plus de 600 m). On y trouve la forêt de Mor Ridge unique, caractérisée par une couche humique acide profonde avec des broméliacées et des espèces d’arbres en danger. Au-dessus de 1800 m, la végétation des montagnes bleues est plus rabougrie et compte quelques espèces inféodées à ces altitudes. Au-dessus de 2000 m, la forêt est appelée « forêt des elfes », en raison de l’apparence rabougrie et noueuse de ses arbres recouverts d’un épais manteau d’épiphytes, y compris de lichens dits « barbe de vieillard », de fougères et de minuscules orchidées.

    Les Montagnes Bleues et les monts John Crow se trouvent dans l’écorégion prioritaire Global 200 des Forêts humides de Jamaïque et font partie de l’une des 78 aires protégées les plus irremplaçables pour la conservation mondiale des amphibiens, des oiseaux et des mammifères. En outre, elles coïncident avec un Centre de diversité végétale, une Zone d’endémisme de l’avifaune et contiennent deux des cinq sites jamaïcains Alliance extinction zéro. On y  trouve une proportion exceptionnellement élevée d’espèces végétales et animales endémiques, la Jamaïque ayant évolué séparément des autres masses terrestres. Enfin, le bien abrite plusieurs espèces menacées au plan mondial dont plusieurs espèces de grenouilles et d’oiseaux.

    Les Montagnes Bleues et les monts John Crow offraient un refuge aux marrons (anciens peuples esclaves) et le patrimoine culturel matériel associé à l’histoire du marronnage. Cela comprend des établissements, des pistes, des points de vue, des repaires, etc. qui forment la Route du patrimoine de Nanny Town. Les forêts et leurs ressources naturelles abondantes offraient aux marrons tout ce dont ils avaient besoin pour survivre, lutter pour leur liberté et enrichir leur culture. Les communautés marronnes conservent encore de fortes associations spirituelles avec ces montagnes, exprimées au travers de manifestations immatérielles.

    Critère (iii) : Les Montagnes Bleues et monts John Crow avec leur patrimoine culturel, représenté par la Route du patrimoine de Nanny Town et ses vestiges associés, c’est-à-dire les pistes secrètes, les établissements, les vestiges archéologiques, les points de vue, les repaires, etc., apportent un témoignage exceptionnel sur le phénomène de grand marronnage caractérisé par la culture des marrons Windward qui, dans leur quête de liberté par rapport à l’asservissement colonial, ont développé une connaissance et un attachement profond concernant leur environnement, qui les a nourri et aidé à atteindre l’autonomie et la reconnaissance.

    Critère (vi) : Les Montagnes Bleues et monts John Crow sont directement associés à des événements qui ont conduit à la libération et à la survie en liberté de groupes d’esclaves africains fugitifs qui y trouvèrent refuge. Le bien témoigne de manière exceptionnelle de son association avec les traditions vivantes, les idées et les croyances qui ont permis cette survie, et la spécificité et le caractère unique de ce qui a été reconnu par l’UNESCO en 2008 par son inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

    Critère (x) : Le bien des Montagnes Bleues et monts John Crow appartient au point chaud de la biodiversité des îles Caraïbes. C’est un centre important d’endémisme des plantes dans les Caraïbes, avec 50% d’endémisme des plantes à fleurs au-delà de 900 à 1000 m au‑dessus du niveau de la mer et 30 à 40% de ces espèces que l’on trouve uniquement dans les limites du bien. Un des deux Centres de diversité végétale de Jamaïque, le bien abrite, selon les estimations, 1357 espèces de plantes à fleurs dont environ 294 sont endémiques de Jamaïque et 87 exclusivement présentes dans le bien. Il y a 61 espèces d’hépatiques et de mousses dans le bien ainsi que 11 espèces de lichens, toutes endémiques. Parmi les genres bien représentés de la flore endémique du bien, il y a Pilea (12 espèces); Lepanthes (12 espèces); Psychotria (12 espèces) et Eugenia (11 espèces).

    Les Montagnes Bleues et monts John Crow recouvrent l’une des aires protégées les plus irremplaçables du monde du fait de son importance pour les espèces d’amphibiens, d’oiseaux et de mammifères. Le bien habrite des populations mondialement importantes d’espèces d’oiseaux et représente un élément clé de la Zone d’endémisme de l’avifaune jamaïcaine. Il est important pour plusieurs espèces à l’aire de répartition restreinte ainsi que pour un grand nombre d’oiseaux migrateurs tels que le tyran gris (Tyrannus domenciensis), la grive de Bicknell (Catharus bicknellii) et la paruline de Swainson (Limnothlypis swainsonii). Le bien englobe deux des cinq sites Alliance extinction zéro de la Jamaïque, abritant un nombre important d’espèces en danger au plan mondial, notamment les plantes en danger critique Podocarpus urbanii, Eugenia kellyana et Psychotria danceri. On trouve aussi dans le bien plusieurs espèces de grenouilles en danger, notamment Eleutherodactylus orcutti (en danger critique) et E. alticola et des espèces d’oiseaux menacées comme la grive de Bicknell, C. bicknellii, le carouge de la Jamaïque, Nesopsar nigerrimus, l’amazone sasabé, Amazona collaria et l’amazone verte, Amazona agilis. Le seul mammifère terrestre non volant présent dans le bien est le hutia de Jamaïque, Geocapromys brownii, dont il n’y a qu’une population limitée dans les monts John Crow.

    Intégrité

    Le bien protège les forêts les plus intactes des hautes altitudes des Montagnes Bleues et des monts John Crow. Les zones de plaine, plus perturbées, se trouvent dans la zone tampon. Le bien est légalement bien protégé car il se trouve dans les limites du plus vaste Parc national des Montagnes Bleues et monts John Crow et il est aligné avec la Zone de préservation du parc, ce qui assure les niveaux de protection les plus stricts dans le système de zonage. La région est escarpée, éloignée de tout, difficile d’accès, ce qui assure une sécurité supplémentaire contre certaines menaces. Les limites du bien sont bien conçues pour inclure les attributs clés des valeurs de biodiversité. Néanmoins, il y a un certain nombre de menaces réelles et potentielles pour le bien, notamment les espèces exotiques envahissantes, l’empiètement, l’exploitation minière, les incendies et les changements climatiques. La plupart des menaces émanent de l’interface entre le bien de haute altitude et les plaines de la zone tampon.

    Le patrimoine culturel et naturel des Montagnes Bleues et des monts John Crow comprend les biens culturels, sites et vestiges principaux qui soutiennent son importance en tant que refuge des marrons Windward. Son tissu physique est en bon état. Les relations et les fonctions dynamiques présentes dans le paysage ainsi que les biens vivants qui sont essentiels à son caractère distinctif sont préservés mais requièrent des améliorations importantes. La protection efficace de la zone tampon est essentielle pour soutenir l’intégrité du bien.

    Authenticité

    Le patrimoine culturel des Montagnes Bleues et des monts John Crow associé à l’histoire des marrons Windward présente un haut degré d’authenticité en termes de lieu et d’environnement. La topographie escarpée et la végétation impénétrable traduisent la fonction de refuge qu’a exercé ce territoire. La permanence des noms des lieux et des histoires qui leur sont associées contribue à soutenir leur authenticité. Toutefois, l’aspect le plus important de l’authenticité de ce patrimoine culturel est la signification et l’importance que les marrons accordent à leur patrimoine, et la force et la profondeur des liens qu’ils ont établis avec lui. Les montagnes sont aussi le foyer des esprits des ancêtres marrons et offrent aux marrons un lien avec leur passé et les générations précédentes.

    Eléments requis en matière de protection et de gestion

    Le bien jouit d’un bon niveau de protection légale car il se trouve dans le Parc national des Montagnes Bleues et monts John Crow. Il est ainsi protégé par toute une série de lois, y compris la Loi sur les ressources naturelles (Parc national) de 1993 et ses règlements ; la Loi sur les forêts (1996) ; la Loi sur l’autorité de conservation des ressources naturelles (1991) et la Loi du patrimoine national jamaïcain sur le patrimoine national protégé (1985). Le bien est également couvert par un plan de gestion quinquennal bien structuré.

    Les Montagnes Bleues et monts John Crow font l’objet d’un régime de gouvernance complexe qui garantit un engagement plus large mais devrait s’efforcer d’améliorer constamment la coordination et la coopération inter-organisations. La gestion du bien reconnaît l’interaction complexe entre ses valeurs naturelles et culturelles et les communautés locales Marron sont activement engagées auprès du site et de sa gestion. L’implication des membres de la communauté Marron dans les activités de protection et de gestion aide à renforcer durablement leurs liens avec leurs patrimoines et appuient les agences d’Etat à réaliser leur mandat pour la sauvegarde du bien. La protection des valeurs naturelles du bien dépend aussi, dans une large mesure, de la gestion positive de la zone tampon de basse altitude qui a longtemps été soumise au déboisement, à l’utilisation des sols pour l’agriculture et à l’empiètement. La gestion active et soutenue des effets de bordure provenant des terres environnantes sera critique pour éviter que des problèmes tels que l’aménagement de la zone tampon, le développement et l’utilisation des sols n’aient un impact sur le bien. Il importera de gérer les impacts potentiels des espèces exotiques envahissantes, du feu et de l’empiètement à la fois de la petite agriculture itinérante et de la culture commerciale du café. La vigilance sera de mise pour veiller à ce que l’exploration et/ou l’exploitation minière ne soient pas autorisées dans le bien et il faudra renforcer les politiques et la législation pour protéger à perpétuité le bien du patrimoine mondial contre l’exploitation minière, conformément à la position établie du Comité du patrimoine mondial et des principales entreprises de l’industrie minière. Le suivi des effets des changements climatiques sur l’écologie sensible d’altitude du bien sera important pour assurer une planification et une gestion proactives de cette menace.

    Il faudra aussi accroître la capacité du personnel et le financement nécessaires pour gérer le bien face aux menaces décrites ci‑dessus. Le financement devra être durable, en particulier pour renforcer la gestion de la zone tampon et traiter efficacement des questions telles que la planification pour le développement durable, l’appui aux moyens d’existence et l’engagement accru des communautés. Un suivi strict des activités effectuées dans le bien et sa zone tampon est fondamental.

  4. Félicite l’État partie pour les efforts consentis afin de reconfigurer la proposition en fonction des recommandations du Comité du patrimoine mondial; reconnaître le rôle de la société civile et des communautés locales dans la gestion du bien et traiter les questions de protection et de gestion du bien ;
  5. Demande à l’État partie d’intégrer les « sites satellites » qui se trouvent à l’extérieur du bien ou dans la zone tampon dans le programme d’interprétation et de présentation des valeurs culturelles ainsi que le phénomène du marronnage jamaïcain en général ;
  6. Prend note de la longue histoire de déboisement de la zone tampon du bien et demande également à l’État partie de renforcer les mesures de lutte contre la menace de l’empiètement de l’agriculture artisanale et de l’agriculture commerciale touchant le bien en améliorant le suivi et l’éducation du public, en renforçant la capacité technique et en obtenant l’appui d’institutions internationales compétentes telles que l’UICN et la FAO ;
  7. Encourage l’État partie à augmenter les ressources financières attribuées afin de garantir la gestion efficace à long terme du bien, d’autant que selon les estimations actuelles, un doublement du budget et des ressources pour le bien et la zone tampon sera nécessaire pour garantir une protection et une gestion efficaces ;
  8. Note avec satisfaction que l’État partie a donné l’assurance que le bien serait protégé contre l’exploitation minière et demande en outre à l’État partie, conformément à la position du Comité du patrimoine mondial sur l’incompatibilité des mines avec le statut de bien du patrimoine mondial, de renforcer la protection juridique du bien pour garantir qu’aucune licence de prospection et/ou exploitation minière ne sera octroyée dans la zone et que toute activité minière qui aurait lieu dans la zone tampon sera soumise à des évaluations d’impact sur l’environnement rigoureuses y compris une évaluation d’impact patrimoniale, en conformité les conseils avec l’UICN et l’ICOMOS, pour faire en sorte qu’aucun effet négatif ne touche la valeur universelle exceptionnelle du bien. Toute proposition d’activité minière dans la zone tampon devra être notifiée au Centre du patrimoine mondial afin d’être examinée par les Organisations consultatives avant qu’une décision d’autorisation ne soit rendue ;
  9. Demande enfin à l’État partie de soumettre au Centre du patrimoine mondial, un rapport actualisé, comprenant un résumé d’une page, sur l’état de conservation du bien, y compris des informations sur les mesures prises pour écarter les menaces de l’exploitation minière et de l’empiétement et des données à jour sur la fourniture de ressources financières suffisantes et durables en appui à la conservation du bien, suivi d’un rapport final sur la mise en œuvre du Plan triennal de travail conjoint proposé en février 2015 et le plan de gestion révisé 2016-2021, avant le 1 décembre 2016, pour examen par le Comité du patrimoine mondial lors de sa 41e session en 2017.
Code de la Décision
39 COM 8B.7
Thèmes
Conservation, Inscriptions sur la Liste du patrimoine mondial, Valeur universelle exceptionnelle
États Parties 1
Année
2015
Documents
WHC-15/39.COM/19
Décisions adoptées par le Comité du patrimoine mondial lors de sa 39e session (Bonn, 2015)
Contexte de la Décision
WHC-15/39.COM/8B
WHC-15/39.COM/8B.Corr
WHC-15/39.COM/INF.8B1
WHC-15/39.COM/INF.8B2
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