Le Comité du patrimoine mondial,
- Ayant examiné les documents WHC/21/44.COM/8B et WHC/21/44.COM/INF.8B1,
- Inscrit l’Observatoire solaire et centre cérémoniel de Chanquillo, Pérou, sur la Liste du patrimoine mondial sur la base des critères (i) et (iv) ;
- Adopte la Déclaration de valeur universelle exceptionnelle suivante :
Brève synthèse
L’observatoire solaire et centre cérémoniel de Chanquillo est un site préhistorique, situé sur le littoral centre-nord du Pérou, dans la vallée de Casma, comprenant un ensemble de constructions dans un paysage désertique, qui, associé à des éléments naturels, fonctionnait comme un instrument calendaire, utilisant le soleil pour déterminer les dates tout au long de l’année solaire.
Le bien comprend un ensemble à triple enceinte implanté au sommet d’une colline, appelé le temple fortifié, deux ensembles de bâtiments appelés observatoire et centre administratif, treize tours de plan carré alignées sur la crête d’une colline et le Cerro Mucho Malo, repère naturel qui complète le dispositif des treize tours.
Critère (i) : Le centre archéoastronomique de Chanquillo est un exemple exceptionnel de paysage calendaire ancien, une pratique des civilisations anciennes qui utilisaient les caractéristiques culturelles et naturelles visibles. Incorporé dans les treize tours, il permet de déterminer avec précision la période de l’année non seulement à une date donnée, mais tout au long de l’année solaire. Contrairement aux alignements architecturaux qui visent un point astronomique unique que l’on trouve sur de nombreux sites anciens dans le monde entier, l’alignement des tours couvre tout l’arc des levers et couchers du soleil au cours de l’année, vus respectivement à partir de deux points d’observation distincts, dont l’un est encore clairement visible en surface. Les installations astronomiques de Chanquillo représentent un chef-d’œuvre du génie créateur humain.
Critère (iv) : Chanquillo fut utilisé pendant une période relativement brève, entre 250 et 200 av. J.-C, au cours d’une phase tardive du premier horizon culturel (500-200 av. J.-C) de la préhistoire péruvienne, après laquelle le site fut détruit et abandonné. L’ensemble de Chanquillo présente un type très particulier de constructions qui illustre une phase précoce du développement de l’astronomie autochtone en Amérique. Il fait preuve d’une grande innovation en utilisant le cycle solaire et un horizon artificiel pour marquer les solstices, les équinoxes et toutes les dates de l’année avec une précision de un à deux jours. Il s’agit donc d’un témoignage de l’aboutissement d'une longue évolution historique des pratiques astronomiques dans la vallée de Casma.
Intégrité
Tous les éléments nécessaires pour exprimer la valeur universelle exceptionnelle de l’ensemble de Chanquillo, centrée sur les observations calendaires du soleil, sont inclus dans les délimitations du bien. Chanquillo et l’ensemble plus vaste de monuments associés qui forment le bien tirent parti des repères d’horizon naturels et bâtis afin de suivre le passage progressif du soleil le long de l’horizon tout au long de l’année. L’environnement naturel et les conditions climatiques, qui sont à la base de la bonne visibilité nécessaire aux observations astronomiques sur le site, sont maintenus dans une large mesure. Les bassins visuels qui contiennent les principales lignes de visée astronomiques sont généralement dégagés, mais leur préservation doit être suivie de près. De même, l’intégrité visuelle du cadre général du bien doit être maintenue. Tout empiètement du bien, découlant par exemple du développement urbain ou de l’expansion des zones agricoles, doit être évitée.
L’effondrement progressif d’éléments structurels, avec la perte de bords nets (par exemple au niveau des tours et des observatoires), compromet l’exactitude des observations astronomiques. La conservation des éléments monumentaux est fragile et doit être suivie de près à l’avenir.
Si les informations provenant des recherches futures indiquaient l’existence de liens entre des monuments centraux et d’autres éléments du bien et au-delà, un ajustement des délimitations devrait être envisagé.
Authenticité
La position des points d’observation occidentaux et orientaux par rapport aux treize tours de Chanquillo, identifiée par des fouilles archéologiques et des études géophysiques, et étayée par des données archéoastronomiques, suggère que le principal objectif de toutes ces structures était de fonctionner ensemble en tant qu’instrument calendaire. Depuis le IIIe siècle av. J. C., le soleil s’est légèrement déplacé aux environs des solstices et moins à d’autres moments de l’année. Ce petit changement a un effet négligeable sur les alignements solaires et peut-être lunaires autour du site, mais n’affecte pas la capacité d’un spectateur d’aujourd’hui à observer et à comprendre la manière dont fonctionnait Chanquillo. Certains aspects des interprétations archéoastronomiques du bien pourraient nécessiter une discussion plus approfondie.
Aucune campagne de conservation et de reconstruction invasive n’ayant modifié la substance matérielle du bien, les conditions d’authenticité en termes de matériau et de forme sont remplies.
Éléments requis en matière de protection et de gestion
Le bien a été déclaré patrimoine culturel national par la résolution 075/INC de la Direction nationale du 18 janvier 2008. Le bien a été inventorié au niveau national par le ministère de la Culture et il est enregistré à la Surintendance nationale des registres publics (SUNARP). Le bien est renforcé par une zone tampon qui s’étend autour du site et comprend une partie de la vallée San Rafael, le Cerro Mongón, Lomas Las Haldas, Pampa Los Médanos, le Cerro Manchán, le Cerro San Francisco et le Cerro Monte Grande.
Le plan de gestion, récemment approuvé, identifie les conditions actuelles de conservation et de gestion du bien et de son contexte, les risques et les menaces qui pèsent sur les caractéristiques culturelles et naturelles du bien et de ses environs, et définit les politiques qui régissent la conservation et la gestion du patrimoine, les stratégies et les mesures de protection ainsi que la réglementation de l’utilisation du bien et de sa zone tampon par le biais du zonage, de même que les programmes et les projets axés sur le caractère durable de la conservation du bien.
L'efficacité du système de gestion devra faire ses preuves dans la pratique. La participation des communautés locales aux futurs efforts de planification devrait être renforcée, et les efforts de protection et de conservation, qui seront essentiels pour éviter tout impact négatif résultant, par exemple, d’un développement touristique inapproprié, devraient être suivis de près.
- Recommande que l’État partie prenne en considération les points suivants :
- développer un programme de conservation à long terme qui comprenne des actions préventives telles que des travaux de consolidation, la construction de toits temporaires ainsi que des travaux de conservation, de restauration et d’entretien et, selon les phases d'intervention, des procédures spécifiques et des programmes de suivi et de contrôle,
- mettre en œuvre le plan de gestion et activer tous les éléments de la structure de gestion,
- obtenir les fonds nécessaire pour assurer la mise en œuvre des mesures de conservation pour le bien,
- prendre les mesures nécessaires pour faire face à une possible augmentation de la fréquentation du bien et entreprendre une étude d'impact sur le patrimoine avant la mise en œuvre de tout projet d'infrastructure,
- impliquer la communauté locale dans la protection, la conservation et la promotion du bien ainsi que dans tous les processus de planification,
- poursuivre la recherche archéologique et l’analyse des données pour une meilleure compréhension du contexte archéologique plus large de la zone ;
- Décide que le nom du bien soit modifié pour devenir « Ensemble archéoastronomique de Chanquillo ».