L’UNESCO publie un rapport novateur sur les impacts du changement climatique dans les villes méditerranéennes inscrites au patrimoine mondial
Le Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO a lancé un nouveau rapport novateur intitulé Le changement climatique dans les villes méditerranéennes du patrimoine mondial, lors d’un événement en ligne de haut niveau ayant réuni plus de 140 participants issus d’organisations internationales, d’autorités nationales, du monde académique et de la société civile. Le rapport aborde l’intersection de trois enjeux majeurs : les effets du changement climatique sur le patrimoine culturel, la vulnérabilité particulière de la région méditerranéenne en tant que « point chaud » climatique mondial, et le rôle clé des villes à la fois comme source majeure d’émissions de gaz à effet de serre et comme levier d’action climatique. Il constitue une étape importante dans les efforts de l’UNESCO pour combler les lacunes entre la science climatique et la planification d’adaptation fondée sur le patrimoine. Combinant une analyse qualitative des rapports issus des sites et des données d’observation de la Terre, l’étude s’appuie sur des modèles du système terrestre et des modèles climatiques régionaux pour identifier les risques climatiques actuels et projeter ceux auxquels les biens du patrimoine mondial devront se préparer. Cette publication vise à sensibiliser au niveau mondial à la gravité et à l’urgence de la crise climatique, tout en reconnaissant le patrimoine culturel comme une ressource précieuse pour l’action climatique.
L’événement d’ouverture a été lancé par M. Ernesto Ottone R., Sous-Directeur général pour la culture de l’UNESCO, qui a présenté les engagements actuels de l’Organisation en matière de climat et de culture. Mme Yana Gevorgyan, Directrice du Secrétariat de GEO, a souligné le potentiel de l’intelligence terrestre et des plateformes mondiales du GEO pour guider les réponses locales face aux risques climatiques, en mentionnant l’Observatoire du climat pour le patrimoine urbain (UHCO) et le Service mondial de résilience face à la chaleur. Tout en réitérant l’importance de la publication, S.E. Mme Christina Kokkinakis, Ambassadrice de l’Union européenne auprès de l’UNESCO, a rappelé l’urgence climatique en Europe et les priorités de l’Union pour atteindre la neutralité climatique. Elle a déclaré : « Les villes méditerranéennes ont survécu pendant des siècles – ce n’est pas seulement un élan que nous risquons de perdre, mais notre avenir collectif. Il ne s’agit pas de ce que nous héritons, mais de ce que nous choisissons pour le futur. »
Présentée par ses co-auteurs principaux, Mme Jyoti Hosagrahar, Directrice adjointe du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, et M. Evangelos Gerasopoulos, Directeur du Bureau grec de GEO, la nouvelle publication constitue la première évaluation complète, fondée sur des données, des risques climatiques affectant les villes du patrimoine mondial dans la région méditerranéenne. S’appuyant sur des observations terrestres, des projections climatiques locales et des rapports qualitatifs de gestionnaires de sites, l’étude évalue 114 villes inscrites sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Les résultats sont préoccupants : près de deux tiers de ces villes font déjà face à au moins un aléa climatique, comme les vagues de chaleur extrême, les inondations, les sécheresses ou les tempêtes ; et près d’un cinquième d’entre elles font déjà face à trois aléas climatiques ou plus simultanément. Dans le pire des scénarios d’ici 2100, les villes côtières seront en outre confrontées à la montée du niveau de la mer, tandis que la majorité devra faire face à des menaces climatiques multiples et combinées.
Malgré ces défis, les villes du patrimoine mondial recèlent un savoir traditionnel accumulé sur des millénaires. Le rapport met en évidence des politiques et actions fondées sur le patrimoine, y compris des stratégies d’urbanisme renforçant la résilience. Il suggère aussi l’adaptation des techniques de construction traditionnelles et des solutions de planification urbaine afin d’optimiser les conditions climatiques dans les centres historiques. Les études de cas présentées dans la publication démontrent l’efficacité de telles mesures. Pour l’avenir, le rapport préconise une vaste gamme d’actions allant des politiques internationales aux stratégies locales. Un suivi régulier et l’intégration du patrimoine culturel dans les plans d’action climatique à tous les niveaux de gouvernance sont essentiels. Une meilleure planification permettra aux villes de tirer parti du potentiel d’adaptation, de résilience et d’atténuation offert par leur patrimoine culturel.
Les interventions d’experts lors de l’événement ont renforcé le message d’urgence du rapport. Mr. Jim Skea, Président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a salué l’approche pluridisciplinaire du rapport et a rappelé que « l’impact du changement climatique n’est pas unidimensionnel ». Il a insisté sur la nécessité de mobiliser des formes de savoir diversifiées, y compris les connaissances locales et autochtones. Le professeur Christos S. Zerefos, Secrétaire général de l’Académie d’Athènes, a déclaré : « La culture que nous héritons doit être préservée – non en ignorant les souffrances silencieuses de nos monuments, car ils ne peuvent parler. » Mme Diana Ürge-Vorsatz, Vice-Présidente du Groupe de travail III du GIEC et Présidente du Comité scientifique pour le prochain Rapport spécial sur les villes et le changement climatique, a qualifié le rapport de contribution opportune et essentielle en adéquation avec les efforts scientifiques mondiaux. Tous les experts ont convenu que les leçons tirées de ces 114 villes méditerranéennes s’étendent bien au-delà de la région et sont pertinentes à l’échelle mondiale.
Lazare Eloundou Assomo, Directeur du Centre du patrimoine mondial, a clôturé l’événement en réaffirmant l’importance du rapport pour l’UNESCO et son Centre du patrimoine mondial. Il a souligné que le rapport est « plus qu’un diagnostic – c’est une feuille de route pour protéger le patrimoine culturel face au changement climatique », en particulier à l’approche de la session 2025 du Comité du patrimoine mondial. Il a appelé à renforcer les partenariats et à assurer un suivi à long terme, concluant : « À mesure que la crise climatique s’accélère, nos collaborations doivent s’intensifier. C’est une opportunité pour bâtir des villes plus justes, résilientes et durables, où notre patrimoine commun sera préservé pour les générations futures. ».
La publication complète est désormais disponible sur la plateforme de l’UNESCO. Elle constitue une ressource essentielle pour les États parties, les gestionnaires de sites, les urbanistes et les professionnels du patrimoine œuvrant dans la région méditerranéenne et au-delà.