La surveillance du Patrimoine mondial depuis l’espace

L ’observation des sites du patrimoine depuis l’espace à des fins de préservation ne date pas d’hier. Au début des années 1920, les scientifiques utilisaient déjà des photographies aériennes pour cartographier les sites archéologiques et aider à détecter les changements non visibles depuis le sol, comme les routes et autres vestiges enfouis.

En 1972, la Convention du patrimoine mondial a été adoptée par la Conférence générale de l’UNESCO et, la même année, la télédétection à partir de satellites civils d’observation de la Terre a commencé à être utilisée de manière régulière. À l’approche du 50e anniversaire de ces deux événements mondiaux, un nombre croissant de pays et d’organisations cherchent à établir des relations plus étroites entre les praticiens du patrimoine et les spécialistes de la technologie spatiale.

L’amélioration constante de l’imagerie satellitaire et d’autres techniques de télédétection permet aux autorités d’identifier à temps les menaces potentielles qui pèsent sur les sites, telles que les changements d’affectation des sols, l’instabilité du sol, l’exploitation forestière, la construction de routes illégales et la destruction de bâtiments patrimoniaux, pour pouvoir ensuite planifier et mettre en œuvre des stratégies d’atténuation. Les collaborations avec différentes organisations nous permettent de faire bon usage de ces technologies.

L’UNESCO et l’Agence spatiale européenne (ESA) travaillent ensemble pour utiliser les technologies spatiales et les données fournies afin de surveiller les sites du patrimoine naturel et culturel. Nous avons le plaisir de présenter dans ce numéro un entretien avec le Directeur général de l’ESA, le Dr Josef Aschbacher.

Le Centre international sur les technologies spatiales au service du patrimoine culturel et naturel (HIST), un centre de catégorie 2 de l’UNESCO situé en Chine, est un autre partenaire précieux. Dans ce numéro, des collègues de HIST partagent l’expérience de la surveillance de deux biens du patrimoine mondial : le site en série Routes de la soie : le réseau de routes du corridor Chang’an-Tian-shan (Chine, Kazakhstan, Kirghizstan) ; et la zone d’intérêt panoramique et historique de la vallée de Jiuzhaigou dans la province du Sichuan, en Chine, après le tremblement de terre de 2017.

Grâce à un partenariat avec le Programme opérationnel d’applications satellitaires (UNOSAT) relevant de l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR-UNOSAT), nous surveillons l’état de conservation des sites du patrimoine mondial menacés par des risques naturels ou des conflits. Dans ce numéro, nous prenons connaissance de l’évaluation des dommages subis par des sites au Népal, en Iraq, au Mali et au Yémen, et nous recevons un compte rendu détaillé de l’impact de la guerre sur le patrimoine mondial syrien. Nous apprenons comment ces informations ont été compilées et analysées en vue de leur publication, fournissant ainsi une base pour relever les défis complexes auxquels sont confrontés les sites dans leur reconstruction et leur rétablissement.

Nous avons également le plaisir de vous présenter une exploration de la dynamique de l’évolution de la couverture terrestre dans des sites africains, tels que le Parc national de Taï (Côte d’Ivoire) et la Forêt impénétrable de Bwindi (Ouganda), ainsi que le fascinant marquage par satellite des baleines, expliqué par la Commission baleinière internationale. Ces articles illustrent les avantages pour la conservation que peut apporter la technologie de la télédétection.

Mechtild Rössler

Directrice, Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO