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Le centre historique de la ville de Batroun

Date de soumission : 11/07/2019
Critères: (iv)(v)
Catégorie : Culturel
Soumis par :
Délégation Permanente du Liban auprès de l'UNESCO
Coordonnées Lat. 34.24932, Long. 35.664290
Ref.: 6428
Avertissement

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Les noms des biens figurent dans la langue dans laquelle les États parties les ont soumis.

Description

Batroun est une ville de la côte méridionale du Liban. Se situant à environ 54 km au nord de Beyrouth, elle s’étend sur un promontoire rocheux, avec une superficie de 4.68km².

Cette ville a été occupée de façon continue depuis le bronze ancien jusqu’à nos jours.

En effet, les travaux archéologiques qui ont eu lieu récemment au centre de la ville ancienne de Batroun ont présenté des témoins de la sédentarisation et de la continuité de civilisations depuis l’âge du bronze ancien (troisième millénaire). 

Durant le milieu du deuxième millénaire, la ville faisait partie de la province de Byblos. Son nom « Batrona » fut ainsi mentionné 10 fois dans les lettres d’El Amarna qui furent envoyées par les rois cananéens au pharaons égyptiens; Amenhatop III et Amenhatop IV (ou Akhénaton), pour demander leur aide (ou secours) contre les attaques amorrites.

Batroun fut par la suite détruite par les Amorrites, et transformée en des ruines vers la fin du deuxième millénaire. Ce fait semble avoir continuer près de 2 à 3 siècles, quand Ithobaal, le roi de Tyr, reconstruisit la ville de Batroun et apparut ainsi comme son fondateur.

Le rôle de la ville de Batroun était modeste durant le premier millénaire. Son nom « Bétéromi » fut mentionné une seule fois dans l’annuaire du roi assyrien Esarhaddon, en tant qu’une ville phénicienne, qu’il a pris durant sa conquête de Sidon en 677 av. J.-C.

Durant la période grecque, Batroun fut impliquée dans la guerre, qui a eu lieu entre 223 et 217 av. J.-C., entre les successeurs d’Alexandre le Grand.

Les arabes Ituréens, profitant de l’instabilité qui a marqué la fin des Séleucides (305 – 64 av. J.-C.), étendirent leur pouvoir dans la Bekaa, et contrôlèrent la plupart des routes qui liaient la Bekaa aux villes côtières, et construisirent un château à Batroun, à partir duquel ils géraient leurs invasions sur les villes de la côte. 

En 64 - 63 av. J.-C., Pompée s’empara de la région, exécuta les autoritaires de Tripoli et Byblos et soustrait Batroun à la principauté ituréenne. Le nom de la ville à l’époque romaine devint « Botrys » qui veut dire grappe de raisin et Batroun marqua alors ses pièces de monnaies de symboles vinaires dans le but d’attester cette nouvelle définition ou étymologie.

Bien que les sources de l’Empire Romain ne mentionnaient pas la ville ; les monnaies frappées sous le règne d’Elagabal (218-222) et Alexandre Sévère (222-235), qui présentait un temple dédié à l’une des Astartés locales ainsi que des vestiges d’un théâtre romain inaccompli à l’est de la ville, témoignent de la présence romaine à Batroun.

A l’époque Byzantine, Batroun était un centre épiscopal qui suivait l’évêque de Tyr, la capitale de la Phénicie.

En 551, un violent tremblement de terre attaqua la côte méditerranéenne et détruisit Batroun avec une centaine d’autre cités. Cependant, Batroun fut reconstruite illico.

Une grande lacune dans l’histoire de Batroun apparait entre le 7ème et le 12ème siècle ap. J.C.

Avant la conquête des Croisées en Orient, Batroun appartenait à l’émirat de Banu Ammar qui régnait sur le nord du Liban depuis la moitié du 11ème siècle. Vers 1110, Batroun tomba sous les mains des croisades et devint une province du comté de Tripoli. Selon certains textes, les fortifications de Batroun étaient extrêmement fragiles à cette époque ; de ce fait, les maisons furent construites les unes à proximité des autres, transformant la ville en un bloc de bâtiments compact et facile à défendre.

L’importance de Batroun déclina durant la période des Mamelouks.

Au 17ème et 18ème siècle, la ville était détruite et presque abandonnée. Alors qu’au milieu du 19ème siècle, elle fut rebâtie.

Les bâtiments historiques majeurs et l’ancien souk de Batroun que l’on peut voir aujourd’hui, construits en pierre de sable (Ramleh) extraite des carrières de la ville, sont la preuve flagrante de ce développement. Les magasins de l’ancien souk s’ouvrent sur des ruelles à travers des portes surmontées d’arcs surbaissés. Les maisons au-dessus des magasins donnent sur les mêmes ruelles à travers des balcons suspendus sur des corbeaux en pierre ou en bois.

Justification de la Valeur Universelle Exceptionnelle

Batroun fut classée sur la Liste Officielle Libanaise des Monuments historiques selon la loi 15282 en 15/3/1957. L’ensemble des monuments du centre historique de Batroun, dont un grand nombre sont inscrit de même dans la liste citée si dessus, offre un exemple exceptionnel de l’architecture traditionnelle.

Batroun présente une valeur archéologique importante essentiellement due à la présence de vestiges qui remontent à différentes périodes, on peut énumérer :

  • Un théâtre romain inachevé, taillé dans le rocher de forme semi-circulaire.
  • Les restes d’une citadelle construite à l’époque des croisades visible parmi les murs d’une maison au centre de la ville historique
  • Le mur de la mer dit « le mur phénicien », est le principal et le plus impressionnant parmi les vestiges archéologiques de Batroun, c’est un chef-d’œuvre du génie créateur humain. Il s’étire sur une longueur de 220m au pied du promontoire rocheux, avec une largeur qui varie entre 1m et 2m et une hauteur maximale de 5m. Ce mur montre à quel point la morphologie côtière de Batroun peut être d’origine anthropique. Il représente les restes d’une carrière marquée par les traces d’extraction de la pierre visible à l’est et l’ouest du mur. Sa principale fonction était la protection contre les vagues et les embruns marins. D’après Viret (2005), l’exploitation aurait pu être menée dans le cadre d’un développement côtier plus important visant à obtenir des terrains à bâtir ou des installations portuaires. De même, Sanlaville (1977) a suggéré que l’arrière espace à l’est du mur de la mer a été réutilisé pour stockage.

L’ensemble considérable d’églises réunis dans le centre historique de Batroun font de la ville un lieu de pèlerinage chrétien important :

  • La Basilique de Saint Stephan a été édifiée entre 1900 et 1906 par un architecte Italien, selon le style d’art Jésuite.
  • L’Eglise de Saint Georges a été édifiée en 1867. Elle contient une Iconostase datant des années 80s du 19eme siècle.
  • L’Eglise de la Dame de la place a été édifiée à la fin du 19éme siècle. Son état actuel est le résultat de différents travaux de restauration subie entre 1902 et le temps présent.
  • L’Eglise de la Dame de la mer contient une Iconostase datant des années 60s du 19éme siècle.

Outre son importance archéologique, historique et religieuse, Batroun est connue pour sa délicieuse limonade fraiche et ses poissons appétissants. La ville est également une grande station balnéaire, sa position près de la mer l’a rendu une destination majeure pour les amateurs des activités nautiques diverses. Batroun a de même maintenu une industrie traditionnelle, qui est celle des éponges.

Critère (iv): Batroun présente un ensemble architectural constitué d’un grand nombre de bâtiments voutés construits en pierre de corail remontant à l'époque ottomane tardive et jouant un rôle très important dans la dynamique économique et commerciale de l’époque. D’autre part Batroun présente également une valeur archéologique importante essentiellement due à la présence de vestiges qui remontent à différentes périodes historiques essentiellement phénicienne.

Critère (v): Batroun présente un témoin exceptionnel d’une activité marine remontant aux plus anciennes périodes historiques. Son port et son mur de mer, dont l’exploitation aurait pu être mené dans le cadre d’un développement côtier plus important visant à obtenir des terrains à bâtir ou des installations portuaires, présentent un témoin imminent de cette activité, l’espace à l’est du mur de la mer a été utilisé comme un lieu de mouillage pour les bateaux et aussi  pour stockage et ceci est attesté par des citernes sous terraines. Aujourd’hui Batroun a maintenu une industrie traditionnelle, qui est celle des éponges.

Déclarations d’authenticité et/ou d’intégrité

Batroun présente une authenticité à travers la permanence du caractère historique et traditionnel de l’endroit.

Des travaux de restauration s’effectuent actuellement sur un nombre de monuments situés dans le centre historique de la ville. Ces travaux sont contrôlés par la Direction Générale des Antiquités qui a pour priorité, l’utilisation de matériaux traditionnels dans les travaux de restauration et la conservation du caractère patrimonial des bâtiments.

Auparavant, la région de Batroun n’a pas fait l’objet d’une explosion majeure des travaux d’aménagement du territoire et de construction. Ce fait a contribué à préserver les différents vestiges archéologiques qui étaient toujours enfouis et protégés.

Comparaison avec d’autres biens similaires

Batroun ressemble à la ville de Byblos au Liban qui est inscrite sur la liste du patrimoine mondial. Cette ville était continuellement habitée depuis l’époque néolithique. Son centre historique contient des monuments revenant à différentes périodes depuis sa fondation jusqu’à présent. Elle occupe un promontoire rocheux situé près de la mer dont la partie ouest servait de carrière de pierre limitée par un mur taillé mais de dimension plus petite que celui de Batroun.

En outre, la technique d’exploitation de la pierre « en digue » qu’on trouve à Batroun est un caractère typiquement méditerranéen qu’on trouve dans les villes suivantes :

- à Baudemarie en France, on trouve des digues taillées de 1.30m de hauteur.

- à Rmel, sur la côte tunisienne, on trouve des zones d’extraction de la pierre taillées dans le grès dunaire, s’étalant sur 3km de longueur et sont séparés de la mer par une digue de 3 à 10m de largeur et de 2m de hauteur moyenne.

- le cap bon, à el haouaria en Tunisie était l’endroit duquel provenaient les pierres mises en œuvre à Carthage.

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