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Décision 23 BUR IV.B.47
Parc national du Kakadu (Australie)

Le Secrétariat a ouvert les débats en se référant au résumé des récentes délibérations du Comité et de son Bureau concernant le Parc national du Kakadu figurant dans le document WHC-99/CONF.204/5 qui présentait également des informations concernant la mise en œuvre des décisions de la vingt-deuxième session du Comité jusqu’à la date de rédaction définitive du document à la fin du mois de mai.

Les décisions ultérieures du Comité du patrimoine mondial à sa vingt-deuxième session à Kyoto en décembre 1998 sont inclus dans leur totalité dans le même document de travail.

Conformément au processus de soumission de rapports décrit dans les décisions de la vingt-deuxième session du Comité, un rapport détaillé a été fourni au Centre du patrimoine mondial par le gouvernement australien le 15 avril 1999. Ce rapport est intitulé : « Le Kakadu d’Australie – Protégeons le patrimoine mondial. Réponse du gouvernement australien au Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO concernant le Parc national de Kakadu (avril 1999). » (voir WHC-99/CONF.204/INF.B). Le rapport répond aux préoccupations et aux recommandations énoncées dans le rapport de la mission (voir WHC-99/CONF.204/INF.9A). Le Secrétariat a remercié le gouvernement australien d’avoir pris en charge la traduction et la publication de ce rapport en nombre suffisant pour la session du Bureau et la troisième session extraordinaire du Comité.

Une étude des questions scientifiques a été réalisée par le scientifique australien chargé de la supervision et un rapport intitulé « Evaluation du projet de Jabiluka : rapport du scientifique chargé de la supervision au Comité du patrimoine mondial  (avril 1999) » a été fourni au Centre du patrimoine mondial le 15 avril 1999 (voir WHC-99/CONF.204/INF.9C). Le Secrétariat a remercié les autorités australiennes d’avoir pris en charge la traduction du résumé analytique et la publication de suffisamment d’exemplaires de ce rapport.

Le Centre du patrimoine mondial a fourni des exemplaires du rapport figurant dans le document WHC-99/204/INF.9B à l’ICOMOS, l’UICN et l’ICCROM pour étude. Les déclarations communes et séparées de l’UICN et de l’ICOMOS ainsi qu’un rapport fourni par l’ICCROM sont mis à la disposition du Bureau sous la cote WHC-99/CONF.204/INF.9D.

Le Centre du patrimoine mondial a fourni des exemplaires du rapport figurant dans le WHC-99/CONF.204/INF.9C à l’ICSU (le Conseil international pour la science) pour étude par un comité scientifique indépendant. L’étude par écrit du comité scientifique a été fournie au Centre du patrimoine mondial le 14 mai 1999 (voir WHC-99/CONF.204/INF.9E). Le Secrétariat a informé le Bureau de la présence d’un représentant de l’ICSU et du dirigeant d’un comité scientifique indépendant de l’ICSU (ISP), le Professeur Brian Wilkinson.

Le Président a remercié le Gouvernement australien et le Scientifique australien chargé de la supervision ainsi que les organes consultatifs, l’ICSU et les membres du comité scientifique indépendant d’avoir fourni leur rapport en se conformant au calendrier très serré fixé par le Comité à Kyoto.

Depuis la préparation du document de travail a la fin du mois de mai, le Centre du patrimoine mondial a continué à recevoir de nouvelles observations et des commentaires concernant l’état de conservation du Parc national du Kakadu. Le Secrétariat les a ensuite résumés brièvement à l’intention des membres du Bureau. Ce faisant, le Secrétariat a de nouveau noté que toute la correspondance et les rapports reçus par le Centre concernant le Parc national du Kakadu avaient été transmis à la délégation permanente de l’Australie auprès de l'UNESCO pour commentaires. Des exemplaires ont également été envoyés aux organes consultatifs et au Président pour information. De plus, de nombreuses lettres demandant au Comité d’inscrire le Kakadu sur la Liste du patrimoine mondial en péril ont été reçues de particuliers et d’organisations du monde entier.

Depuis la fin du mois de mai, le Centre a été informé de contacts entre le scientifique australien chargé de la supervision, l’Environmental Research Institute (ERISS) et le comité scientifique indépendant créé par l’ICSU. Des enregistrements de conversations téléphoniques entre ces parties ont été transmis au Centre.

Le 2 juin 1999, le Président du Comité a reçu une lettre du Directeur exécutif de l’ERA par laquelle celui-ci désirait donner son point de vue sur les revendications faites par la corporation aborigène des Gunjehmi, en ce qui concerne l’environnement physique aussi bien que culturel, y compris des sites revendiqués par le peuple aborigène des Mirrar comme étant sacrés.

Le 9 juin 1999, un rapport révisé a été reçu de scientifiques de l’Australian National University qui a répondu au rapport du scientifique chargé de la supervision. Le rapport présente huit conclusions détaillées dont certaines reconnaissent qu’il a été répondu à quelques unes des préoccupations des scientifiques tandis que d’autres font référence à des motifs de préoccupation persistants.

Le Président du Comité a écrit à plusieurs reprises au ministre de l’Environnement et du Patrimoine d’Australie, en demandant à chaque fois instamment la suspension volontaire de la construction de la descente de la mine à Jabiluka, comme cela avait été demandé par le Comité à sa vingt-deuxième session à Kyoto. Le 16 juin 1999, le Président a fourni à tous les membres du Comité des doubles de l’échange de correspondance qu’il avait entretenu avec le ministre. Un résumé de cet échange de correspondance est inclus dans WHC-99/CONF.204/5.

Le 25 juin, le Secrétaire d’Environment Australia a écrit au Directeur du Centre au sujet d’une lettre de la Fondation Colong pour la faune sauvage qui avait été reçue par le Centre le 22 juin et qui mentionnait quelque 29 concessions minières pour lesquelles la Fondation Colong prétendait que le plan de gestion de Kakadu n’était pas opérationnel. La lettre de réponse détaillée du Secrétariat se référait à une décision de la Haute Cour d’Australie datant de 1997 déclarant que l’Australie continue à exercer ses responsabilité au titre de la Convention et de la législation intérieure en matière de patrimoine mondial en ce qui concerne ces concessions minières et « le ministre de l’Environnement et du Patrimoine a déclaré très clairement qu’il n’y aurait pas d’exploitation minière dans ces concessions. »

Egalement en date du 25 juin, le Secrétaire d’Environment Australia a fourni des détails concernant des demandes de protection déposées par la Corporation aborigène des Gundjehmi, conformément aux dispositions de l’Aboriginal and Torres Strait Islander Heritage Protection Act 1984  sur une zone de Jabiluka. La lettre mentionne le sénateur Hill comme « n’ayant pas été en mesure de faire une déclaration d’urgence conformément à la section 9 pour la zone spécifiée, en se fondant sur les informations disponibles. » La lettre poursuit ainsi : « « Le ministre étudie maintenant la demande selon la section 10 de la loi. Celle-ci prévoit une protection à long terme d’une zone ». La lettre fournit également des détails sur les processus requis pour considération de l’application de la section 10.

Le 29 juin, le Président a reçu une lettre du Pr Nicholas Robinson, du Centre d’Etudes juridiques de l’Ecole de Droit de la Pace University de New York. La lettre se réfère à des questions juridiques liées et relatives à l’état de conservation du Parc national du Kakadu.

Le 30 juin, un extrait du Rapport d’enquête du Sénat australien sur le projet de la mine d’uranium de Jabiluka intitulé « Jabiluka : The Undermining of Process » a été reçu. Ce rapport a été préparé par le Comité de références du Sénat pour l’Environnement, les Communications, la Technologie de l’information et les Arts.

Egalement en date du 30 juin, le Centre a reçu un nouveau rapport des autorités australiennes intitulé « Réponse à l’étude réalisée par l’ICSU du rapport au Comité du patrimoine mondial ». Après réception d’une demande écrite de la délégation permanente de l’Australie auprès de l'UNESCO, ce rapport a été fourni aux membres du Bureau sous la cote WHC-99/CONF.204/INF.9F.

Enfin, le 6 juillet, un exemplaire complet du Rapport du Comité du Sénat australien a été fourni au Centre par un observateur des Démocrates australiens qui assistait à la session du Bureau. Le rapport d’enquête du Comité du Sénat australien sur le Projet de la mine d’uranium de Jabiluka contient des rapports séparés de la majorité et de la minorité. Egalement en date du 6 juillet, le sénateur Hill a écrit au Directeur du Centre en attirant particulièrement son attention sur la conclusion du rapport de la minorité, provenant des membres du gouvernement.

Le 7 juillet, le Bureau a entendu les présentations du ministre australien de l’Environnement et du Patrimoine, le sénateur Robert Hill, (figurant intégralement en Annexe VI.1, des représentants de l’UICN, de l’ICOMOS et de l’ICCROM (incluses en totalité en Annexes VI.2, VI.3 et VI.4), et du chef du Comité scientifique indépendant (ISP) de l’ICSU (inclus en totalité en Annexe VI.5).

A la suite de ces interventions, le délégué du Japon a commencé par déclarer que le Bureau devait tout d’abord faire la différence entre deux aspects de cette question très difficile, soit les aspects de l’étude scientifique et les aspects culturels. S’agissant de la question de l’étude scientifique, il a fait part de profonde reconnaissance envers le travail sérieux du Pr Wilkinson et de ses collègues qui ont travaillé en un temps limité et sans avoir accès à toutes les données et informations nécessaires. Il a également mentionné le travail très sincère du scientifique australien chargé de la supervision. Il a reconnu le fait que le rapport de l’expert de l’ICSU n’affirmait pas l’existence d’un quelconque danger reconnu malgré de fréquentes références à des incertitudes ou à des insuffisances de données et d’informations. Il a également noté que le scientifique australien chargé de la supervision a accepté et approuvé un certain nombre de recommandations figurant dans le rapport de l’ISP, comme le montre sa réponse au rapport de l’ISP (WHC-99/CONF.204/INF.9F).

Evoquant l’aspect culturel, le délégué du Japon a observé qu’il existait un réel problème à Kakadu. Il a déclarait qu’il estimait que les motifs de préoccupation partagés par le Bureau étaient les difficultés à évaluer les liens spirituels entre les hommes et la nature, l’impact sur les cultures vivantes, ainsi que l’impact sur le paysage culturel. Il a ajouté qu’il semblait que l’évaluation culturelle était, en un sens, beaucoup plus difficile que l’évaluation scientifique et il a insisté sur le fait que des facteurs culturels comme la culture vivante et les paysages culturels ont gagné de plus en plus de poids dans le travail du Comité et du Bureau au cours de l’histoire du régime du patrimoine mondial. A cet égard, le délégué du Japon a déclaré qu’il partageait la sérieuse préoccupation exprimée par l’ICOMOS quant aux impacts sérieux possibles du projet minier de Jabiluka sur la culture vivante des propriétaires traditionnels mirrar.

Le délégué du Japon a fait remarquer qu’il avait écouté avec beaucoup d’attention l’intervention du sénateur Hill, de la délégation d’observateurs de l’Australie. Il a ajouté que sa délégation était très intéressée par plusieurs points de la déclaration de l’Australie. En particulier, le Japon considère qu’il est très important qu’ERA ait suggéré de différer l’exploitation minière commerciale à Jabiluka. Il a ajouté que si son interprétation était juste, cela indiquait qu’il y aurait une mine à la place du projet initial de deux mines fonctionnant en même temps. Il a fait remarquer que l’ERA était prête à différer l’exploitation minière à Jabiluka jusqu’à l’achèvement de l’exploitation minière à Ranger. Le délégué du Japon a déclaré que la nouvelle proposition de la délégation australienne méritait, à son avis, l’examen attentif du Bureau car ses implications étaient en rapport avec divers aspects de la question du Kakadu.

Enfin, le délégué du Japon a souligné la nécessité de développer la confiance entre les propriétaires traditionnels aborigènes et le gouvernement du Commonwealth d’Australie. Il a ajouté que tout le monde au sein du Comité était très préoccupé d’une rupture de la confiance mutuelle entre les deux parties. A cet égard, il a souhaité appuyer la déclaration de l’ICCROM selon laquelle le travail du Comité du patrimoine mondial devait consister à créer une base positive et constructive selon l’objectif de la Convention selon une perspective à plus long terme. Il a conclu en déclarant qu’il estimait que le vrai travail du Comité et du Bureau était de créer une bonne base pour le développement de la confiance entre les propriétaires traditionnels aborigènes et le gouvernement australien, par le dialogue.

Le délégué de l’Italie a fait allusion à la complexité des questions que devait traiter le Bureau. Il a mentionné les difficultés auxquelles devaient faire face le Bureau et le Comité car c’était un cas nouveau et sans précédent. Il a ajouté qu’il faudrait faire preuve de courage et d’imagination sans compromettre la Convention ni l’image de l’État partie concerné. Il a déclaré qu’il n’y aurait aucun intérêt à trouver une solution cosmétique. Ce qu’il fallait, c’est une vraie solution, bien conçue et équilibrée. Il a noté que deux des rapports présentés au Bureau confirmaient et renforçaient la crainte exprimée dans le rapport de la mission. Il a déclaré qu’une vérification complémentaire était nécessaire. Il a fait remarquer qu’il y a des faits qu’il faut concilier, en particulier dans le rapport du comité scientifique indépendant (ISP) créé par l’ICSU. Il a fait allusion à de nouveaux motifs de préoccupation concernant le patrimoine culturel qu’il faudrait traiter se souciant de la sensibilité locale et de la réaction internationale au changement social et culturel.

Le délégué de l’Italie a déclaré que le système d’inscription des biens à la fois sur la Liste du patrimoine mondial et sur la Liste du patrimoine mondial en péril exigeaient l’accord de l’Etat partie, sauf en cas d’urgence. Il a ajouté que l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial en péril n’est pas une sanction et que le Comité n’est pas un tribunal mais qu’il a des règles qu’il faut fixer et actualiser.  Il a déclaré qu’il fallait agir dans le respect de la Convention.

La déléguée de Cuba a fait allusion au rapport du scientifique australien chargé de la supervision qu’elle a qualifié de déclaration honnête mais a indiqué qu’il y avait des choses dont il fallait tenir compte et des choses à appliquer. Elle a fait remarquer qu’avec les incertitudes scientifiques persistantes et la nécessité d’une analyse complémentaire des informations scientifiques, la situation restait la même que lors de la dernière session du Comité, à Kyoto, en 1998.

Le délégué du Maroc a remercié les organes consultatifs et le comité scientifique indépendant créé par l’ICSU de leur travail en disant que l’on avait bénéficié d’un nouvel éclairage sur une question d’importance capitale. Il a déclaré que le Maroc estimait que les délibérations concernant le Kakadu pouvaient être considérées comme une tâche majeure pour le Comité. Il a demandé au Bureau d’être prudent et consciencieux et a convenu avec le délégué du Japon que la question essentielle était celle de la confiance et du respect des engagements. Il a demandé au Bureau de créer un climat de confiance et il a fait part de la confiance du Maroc dans le travail de l’organe consultatif et du comité scientifique créé par l’ICSU. Il a évoqué la responsabilité internationale de trouver une solution adaptée étant donné que la décision créera un précédent juridique. Il a conclu en ajoutant que le Bureau a connaissance d’autres sites confrontés à des menaces plus graves que celle causée par la mine de Jabiluka et il a donc réaffirmé la nécessité de procéder dans un véritable climat de confiance et de communication.

Le délégué de la Corée a évoqué le lourd fardeau et la pression que représentaient le cas  du Parc national du Kakadu. Il a observé que ce cas créerait un précédent pour l’avenir du Comité du patrimoine mondial et déterminerait sa viabilité politique et financière dans l’avenir. Il a convenu avec le Japon que le cas concernait les relations entre les hommes et la nature et il a soulevé la question de savoir où était la primauté en observant qu’ils étaient tous deux importants. Il a fait remarquer qu’en raison de la gravité de la question, il ne voulait pas prendre de décision hâtive. Il a ajouté que des incertitudes persistaient et la nécessité d’une étude complémentaire. Il a également déclaré que cela pouvait être une bonne occasion de développer la confiance entre les experts et l’Etat partie. Le devoir et la responsabilité du Bureau est d’inciter toutes les parties concernées à utiliser des moyens créatifs pour trouver une solution destinée à être scientifiquement et politiquement viable.

Le délégué du Bénin a observé que la communauté internationale devrait savoir gré à l’Australie de lui fournir l’occasion d’approfondir une situation inédite. Il a indiqué qu’en tant qu’Etat partie, l’Australie s’est comportée devant cette situation de façon responsable. Il a dit que le Comité ne devait pas se trouver les mains liées à l'avenir et qu'il devrait donc prendre du temps avant une quelconque décision. Il a indiqué que la complexité des problèmes aussi bien culturels que scientifiques auxquels nous confronte cette situation,  ne saurait requérir une attitude et une solution en blanc ou noir. Il a reconnu l'importance spirituelle de la terre pour le  peuple aborigène et a été d'avis qu'il valait mieux arriver à une solution consensuelle. Il a demandé qu'un dialogue plus étroit s'installe en Australie avec les populations aborigènes en soulignant que cette démarche ne pouvait pas s'inscrire dans le cadre d'un calendrier de l'UNESCO.  Il a dit également que le Comité devrait déterminer le niveau de profondeur du dialogue entre le gouvernement australien et les aborigènes afin de se faire une opinion responsable de la situation.

Le délégué de la Hongrie a indiqué que, sur la base des connaissances actuelles, des rapports écrits et des discussions, la position du Gouvernement hongrois était qu'il ne pouvait appuyer l'ouverture de la mine de Jabiluka pour le moment. Il a été d'accord avec les autres membres du Bureau qu'il s'agissait là d'une nouvelle situation sans précédent de la plus haute importance pour le Bureau et le Comité. Il a souligné que l'examen scientifique avait mis en évidence un certain nombre d'incertitudes persistantes et estimé qu'il serait nécessaire d'effectuer une investigation scientifique complémentaire avant de prendre une décision finale concernant le site. Il a été d'accord avec la position des autres membres du Bureau quant à la nécessité d'être prudent et d'obtenir un consensus du Bureau. Il a enfin mentionné que cette question était devenue politique, tant à l'intérieur qu'à  l'extérieur de l’Australie.

Le délégué de la Hongrie a indiqué que le projet de Jabiluka comprenait deux phases et que la première phase était achevée et que la question était maintenant de savoir si le processus d'exploitation pouvait commencer ou pas. Il a ensuite demandé si des investigations archéologiques avaient été bien faites.

Le délégué de la Hongrie a souligné l'importance des délibérations du Bureau au regard de la Convention. Il a suggéré qu'il était peut-être nécessaire d'approfondir la réflexion pour savoir si la responsabilité de mettre un site sur la Liste du patrimoine mondial en péril relevait du Bureau et du Comité avec ou sans le consentement de l'Etat partie. Il a accordé la plus grande importance à la déclaration du ministre australien de l'Environnement et du Patrimoine concernant l'éventuel report de l'exploitation de Jabiluka et la nécessité de trouver une solution pour régler le problème. Il a également cherché une solution entre le peuple aborigène mirrar et le gouvernement australien.

Le ministre de l'Environnement et du Patrimoine de l'Australie a remercié le Bureau de ces commentaires avisés. Il a indiqué qu'il cherchait lui aussi un moyen constructif pour aller de l'avant. Il a indiqué que son Gouvernement était fier du patrimoine mondial en Australie et qu'il ne fuyait pas ses responsabilités. Il a estimé que le cas était historique et que les questions nouvelles étaient en cours de traitement.

Le ministre a demandé les commentaires de l'UICN concernant la nuisance visuelle sur ce bien du patrimoine mondial. Il a indiqué que c'était la raison pour laquelle les concessions minières se trouvaient délibérément à l'extérieur du bien et il a demandé pourquoi les nuisances visuelles auraient plus d'importance maintenant qu’au cours des 18 années précédentes. Il s’est interrogé sur la raison pour laquelle la mine à ciel ouvert de Ranger avait été jugée acceptable et pourquoi on n’acceptait maintenant pas une mine souterraine. Il a demandé comment une si petite mine souterraine pouvait constituer une nuisance visuelle à un bien du patrimoine mondial de 20.000 kilomètres carrés.

En prenant en compte les commentaires du Bureau sur les concepts qui évoluent actuellement concernant les traditions culturelles vivantes, il a suggéré qu'un débat ait lieu sur le sujet mais il s'est également posé des questions sur les limites de ces nouvelles interprétations et où elles pourraient nous emmener. Il s’est demandé si de nouvelles interprétations de cet ordre pouvaient être appliquées rétrospectivement au Kakadu. Il a indiqué que les questions stimulantes relatives aux cultures vivantes étaient traitées par l’intermédiaire de l’évaluation de sites sacrés potentiels et de la sauvegarde de tous les sites identifiés à Jabiluka.

S’agissant des questions scientifiques, le ministre s’est félicité du dialogue entre le scientifique australien chargé de la supervision et le comité scientifique indépendant (ISP) créé par l’ICSU. Il a déclaré qu’il voulait, si possible, que toutes les questions posés par l’ISP trouvent une réponse.

En réponse aux commentaires du Japon, le ministre a indiqué que l’ERA s’était engagée à ce que l’exploitation minière à Ranger se termine avant que l’exploitation minière commerciale ne soit totale à Jabiluka. Cette pause dans le travail créerait une occasion d’établir la bonne foi et de surmonter la méfiance et le manque de confiance. Le ministre a conclu en demandant que sa déclaration figure dans le rapport du Bureau.

Le Président a ensuite décidé de constituer un groupe informel de rédaction sous la présidence du Rapporteur et comprendrait un représentant de chacun des membres du Bureau, l’Observateur délégué de l’Australie et un membre du Secrétariat. Le Président  a demandé au groupe de préparer des projets de recommandations à discuter par le Bureau le vendredi 9 juillet. Le groupe informel a suspendu son travail après trois sessions. Le Président a demandé au Gouvernement australien d’adresser ses différentes communications orales au  groupe par écrit et de les mettre à la disposition de tous les membres de la réunion du Bureau.

Le Président a remercié les membres du Bureau, la délégation d’observateurs de l’Australie, le chef du comité scientifique indépendant (ISP) créé par l’ICSU et les représentants des organes consultatifs pour leur considération attentive envers le Parc national du Kakadu.

Le 9 juillet, le ministre australien de l’Environnement et du Patrimoine a communiqué le document, selon la demande du Président au Bureau, en même temps qu’un ensemble de mesures complémentaires mises au point par le gouvernement australien pour renforcer le régime actuel de protection de l’environnement en vigueur à Jabiluka et Kakadu ; traiter la situation sociale et économique des communautés aborigènes vivant au Kakadu ; et fournir une nouvelle assurance que les valeurs culturelles du Parc – y compris celles des Mirrar – sont protégées (voir WHC-99/CONF.204/INF-9G).

Le Président a demandé au groupe informel de rédaction de reprendre son travail avec uniquement la participation d’un représentant par membre du Bureau.

Après avoir atteint un consensus, le groupe informer de rédaction a proposé des conclusions et des recommandations pour considération et adoption par le Bureau. Le Président a d’abord demandé les observations générales sur la proposition. La délégation d’observateurs de l’Australie en a pris acte et a remercié le Rapporteur et le Secrétariat de leur travail en ajoutant qu’il était évident que le groupe de rédaction avait essayé de rechercher un consensus. Il a déclaré qu’une telle approche renforcerait le Comité et la bonne volonté. Il a fait remarquer que la recommandation contenait des références à certaines des initiatives comprises dans la présentation présentée au Bureau le matin (voir WHC-99/CONF.204/INF.9G). Il a ajouté que la recommandation constituait une avancée très positive mais qu’il estimait que certaines des conclusions du Bureau n’étaient pas bien fondées. Il a jugé que la recommandation était un document raisonnable qui pouvait constituer une base de discussion à la troisième session extraordinaire du Comité et il a déclaré qu’il désirait saisir l’occasion à cette réunion de débattre du contenu de la recommandation en détail.

S’agissant du point 1 résumant les principales causes de préoccupation et les réserves du Bureau, l’observateur délégué de l’Australie a déclaré qu’il avait de la difficulté à accepter certaines des conclusions. Pour ce qui est du point 1(d), il estimait que les conclusions du Bureau concernant l’impact de la mine sur les valeurs culturelles vivantes et les valeurs de paysages culturels vivants pouvaient être mises en doute. Pour ce qui est du point 2 (c) de la recommandation, l’observateur délégué de l’Australie a déclaré que toutes les recommandations de l’ISP et de l’ICSU seraient abordées. Il a dit que le chef de l’ISP et le scientifique chargé de la supervision avaient déjà instauré un dialogue afin de mettre en œuvre leurs recommandations. Pour ce qui est du point 4 de la recommandation, l’observateur délégué de l’Australie a ajouté qu’il était plutôt normatif et ne prenait pas en compte les nouvelles informations fournies au Bureau, un groupe de référence proposera et guidera le processus de mise au point du plan de gestion du patrimoine culturel (voir WHC-99/204/INF.9G).

A la suite de cette discussion, le Bureau a considéré et adopté ce qui suit:

1.             Le Bureau,

(a)        a reconnu avec satisfaction que le gouvernement australien, le superviseur scientifique australien, les organes consultatifs (UICN, ICOMOS et ICCROM) et le comité scientifique indépendant (ISP) créé par le Conseil international pour la science (ICSU) ont fourni les rapports demandés par la vingt-deuxième session du Comité à Kyoto, 1998,

(b)        a exprimé son regret que la suspension volontaire de la construction de la descente de la mine à Jabiluka jusqu’à la vingt-troisième session du Bureau (demandée par la vingt-deuxième session du Comité) n’ait pas eu lieu,

(c)        a continué à émettre des réserves concernant les incertitudes scientifiques liées à l’exploitation minière et au broyage du minerai à Jabiluka,

(d)        a été préoccupé par les atteintes aux valeurs liées aux traditions culturelles vivantes et aux valeurs de paysages culturels du Parc national du Kakadu, consécutifs au projet d’exploitation minière et de broyage de minerai à Jabiluka,

(e)        a été préoccupé de l’absence d’avancement dans la préparation d’un plan de gestion du patrimoine culturel pour Jabiluka.

2.             Le Bureau a souhaité prendre note des faits nouveaux suivants concernant l’état de conservation du Parc national du Kakadu :

(a)      Le gouvernement australien a déclaré qu’il n’y aura pas d’exploitation commerciale parallèle des mines d’uranium de Ranger et Jabiluka, situées dans des enclaves entourées par le Parc national du Kakadu mais qui n’y sont pas inclus (voir WHC-99/CONF.204/INF.9G). Le Bureau a considéré l’annonce du gouvernement australien comme un changement positif pour traiter la question relative à la conservation du Parc national du Kakadu, bien que le gouvernement australien doit clarifier le sens précis du volume et de l’étendue de toutes activités parallèles dans les mines d’uranium de Ranger et Jabiluka, en particulier en ce qui concerne la différence relative avec le niveau actuel de production à Ranger.

(b)     Il y a des indications sur une reprise du dialogue entre le peuple aborigène des Mirrar et le gouvernement australien sur des questions concernant la mine d’uranium et le broyage de minerai à Jabiluka. Le Bureau a considéré que c’est la première étape essentielle sur la voie d’une solution constructive aux questions soulevées par la mission de l'UNESCO au Parc national du Kakadu.

(c)      Un dialogue entre le superviseur scientifique australien (ASS) et le comité scientifique indépendant (ISP) créé par le Conseil international pour la science (ICSU) a indiqué que l’on s’engage vers la solution de certains des problèmes en suspens concernant les questions scientifiques relatives à l’exploitation minière et au broyage de minerai à Jabiluka.

3. Le Bureau a estimé que l’instauration de la confiance et du respect des engagements par le dialogue est essentielle pour toute résolution des questions liées au projet d’exploitation minière d’uranium et de broyage de minerai à Jabiluka. C’est ainsi qu’il faut établir un meilleur dialogue entre le gouvernement australien et les propriétaires traditionnels de la concession minière de Jabiluka, soit  le peuple aborigène des Mirrar.

4. Le Bureau a recommandé que le Comité sollicite du gouvernement australien, avec la coopération nécessaire des Mirrar, et l’engagement approprié d’autres parties concernées, l’achèvement  du plan de gestion du patrimoine culturel de Jabiluka et la mise en place d’une cartographie culturelle exhaustive de la concession minière de Jabiluka et du site du Boyweg-Almudj et de ses limites afin d’assurer la protection de ces éléments qui font partie intégrante du paysage culturel exceptionnel du Kakadu. Le plan et le travail de cartographie culturelle devraient être entrepris par des archéologues et anthropologues confirmés travaillant avec les responsables aborigènes selon un calendrier fixé. Les archéologues et anthropologues devraient rendre compte à un comité constitué de représentants de l’Aboriginal Areas Protection Authority (AAPA) du Territoire du Nord, de l’Australian Heritage Commission, de l’ICOMOS, de l’ICCROM et de la corporation aborigène des Gundjehmi. Leur travail devrait être soumis à une expertise indépendante lors d’une étude objective et impartiale.

5. Le Bureau a considéré que c’est au gouvernement australien qu’incombe clairement la responsabilité de réglementer les activités d’une entreprise privée telle qu’Energy Resources of Australia Inc., en ce qui concerne le projet d’activités d’exploitation minière et de broyage de minerai à Jabiluka et il a noté l’engagement des gouvernements fédéral et du Territoire du Nord pour renforcer la base de la réglementation de l’exploitation minière.

6. Le Bureau a recommandé que le Comité établisse un mécanisme de coopération entre le Conseil international pour la science (ICSU), le comité scientifique indépendant (ISP), les organes consultatifs et le gouvernement australien (en particulier le superviseur scientifique) afin de résoudre toutes les questions scientifiques en suspens soulevées par l’ISP dans son rapport (WHC-99/CONF.204/INF.9E).

7. Le Bureau a recommandé au Comité que l’on demande au gouvernement australien de faciliter, en réponse à l’Etude d’impact social de la Région du Kakadu (KRSIS), l’octroi d’un ensemble d’avantages et de protection sociale, en concertation avec le gouvernement du Territoire du Nord, à l’intention des communautés aborigènes du Kakadu (y compris les Mirrar). Le Bureau a également recommandé que le Comité sollicite du gouvernement australien de fournir un état d’avancement de la mise en œuvre de l’Etude d’impact social sur la région du Kakadu à la vingt-troisième session du Comité à Marrakech, Maroc, en décembre 1999.

8. Le Bureau a recommandé que la troisième session extraordinaire du Comité du patrimoine mondial, le 12 juillet 1999, prenne totalement en compte les informations fournies auparavant, y compris les nouveaux éléments fournis pendant la session du Bureau ainsi que les considérations du Bureau, au regard du paragraphe 86 des Orientations, afin de remplir le mandat qui lui a été confié à Kyoto (voir le paragraphe 5, page 20 du document WHC-98/CONF.203/18).

Code de la Décision
23 BUR IV.B.47
Thèmes
Conservation
États Parties 1
Année
1999
Rapports sur l'état de conservation
1999 Parc national de Kakadu
Documents
Contexte de la Décision
WHC-99/CONF.204/15
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