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Dialogue entre Ammar Khammash et Bianca Jagger

50 penseurs pour les 50 prochaines années. Session sur le changement climatique et la préservation du patrimoine

Ammar Khammash

Architecte, photographe, designer et artiste.

Bianca Jagger

Fondatrice et présidente de la Bianca Jagger Human Rights Foundation

Vision pour les 50 prochaines années

Dans les 50 prochaines années... les pratiques architecturales durables adoptent les connaissances des communautés autochtones et leur façon de vivre avec l'environnement qui les entoure. Les nouvelles technologies peuvent être utilisées pour améliorer leurs connaissances traditionnelles.

Dans les 50 prochaines années... nous devons utiliser toutes nos technologies pour soutenir les peuples autochtones et la richesse de leurs connaissances. Ils sont les meilleurs gardiens de notre mère, la Terre, en particulier de la biodiversité, de l'eau et de la forêt tropicale.

Résumé

Le dialogue entre Ammar Khammash et Bianca Jagger a porté sur les peuples autochtones et leur lien avec la technologie. Ammar et Bianca s'accordent à dire que les connaissances des peuples autochtones devraient jouer un rôle important dans la réponse à la crise climatique. Bianca a souligné que les peuples autochtones sont vulnérables aux dangers du changement climatique et que leurs droits fondamentaux à la vie sont violés. Elle a souligné que les organisations internationales devraient veiller à ce que les voix des peuples autochtones et des jeunes soient entendues afin d'envisager un avenir plus prometteur pour les 50 prochaines années. Ammar a expliqué que son travail architectural s'inspire de la manière dont les peuples autochtones interagissent avec leur environnement. Il a également ajouté que nous devons utiliser les nouvelles technologies pour revoir les décisions passées des communautés locales d'une manière plus contemporaine. Compte tenu du pouvoir et de l'innovation des communautés locales, Ammar et Bianca ont conclu que les technologies devraient être au service des peuples autochtones afin de les protéger des terribles menaces de la crise climatique.

Dialogue

Je pense qu'il est presque impossible d'imaginer les 50 années à venir. Dans les années 1970 et 1980, nous pouvions aisément penser à l'avenir, mais aujourd'hui, avec l'intelligence artificielle et ce qui se passe dans le domaine scientifique, nous ne sommes plus capables, en tant qu'humains, d'utiliser notre cerveau paléolithique pour envisager ce qui est à venir.

Comment imaginez-vous que la technologie va transformer notre façon de considérer le patrimoine naturel ou culturel ?

Je crois beaucoup au pouvoir des médias sociaux et de la technologie. Je suis la fondatrice et la présidente d'une organisation de défense des droits humains, la Bianca Jagger Human Rights Foundation, mais je porte plusieurs casquettes. Je suis ambassadrice de bonne volonté du Conseil de l'Europe pour l'abolition de la peine de mort, je suis membre du conseil d'administration exécutif d'Amnesty International, et je suis également ambassadrice de l'UICN pour le Défi de Bonn, une initiative visant à restaurer 360 millions d'hectares de terres d'ici 2030.

Comme vous pouvez le constater, j'aborde de nombreuses questions différentes dans mon travail, notamment celle des peuples autochtones. Dans le cadre de mes recherches, je suis récemment tombée sur un autochtone australien qui a parlé des connaissances autochtones et traditionnelles. Il a déclaré que les connaissances traditionnelles devraient être appelées connaissances scientifiques et a souligné l'importance pour les scientifiques de travailler en étroite collaboration avec les peuples autochtones afin d'utiliser leurs connaissances pour lutter contre le changement climatique.

Nous devrions utiliser toutes nos technologies pour soutenir les peuples autochtones du monde entier et prendre conscience qu'ils sont les meilleurs gardiens de notre mère, la Terre. Ils utilisent le mot « mère » lorsqu'ils parlent de la Terre. Ils sont les meilleurs gardiens de la biodiversité, de l'eau et de la forêt tropicale. Il est important que nous comprenions comment la technologie, au lieu d'être destructrice, devrait être utilisée pour protéger l'environnement et soutenir les communautés et les populations autochtones du monde entier.

La technologie est un outil formidable pour moi, y compris les médias sociaux pour communiquer sur les crimes qui sont commis dans le monde. Je crois fermement qu'il faut utiliser la technologie pour protéger les gens dans le monde entier ainsi que l'environnement.

Le lien entre les peuples autochtones et la science est fascinant. Nous sommes équipés de plus d'outils et de plus de technologies qui nous permettent de revenir en arrière et de repenser l'innovation dont on fait preuve les peuples autochtones. Ils sont la trace vivante des connaissances accumulées dans le passé, notamment en archéologie, en histoire naturelle, en théologie et en paléontologie. Toutes ces sciences doivent être revisitées. Les peuples autochtones restent les gardiens d'une époque où il existait une relation plus symbiotique entre les humains et la Terre. Beaucoup plus symbiotique que la relation parasitaire qui est apparue au cours du siècle dernier.

Si nous regardons les grandes réalisations des Mayas, des Incas et leur technologie, je pense que nous ne devrions pas faire preuve d'arrogance en pensant que c'est nous qui avons développé la technologie. Il y a 3 000 ans ou plus, nous étions tous des peuples autochtones ; c'est ce que nous semblons avoir oublié.

Comment votre architecture répond-elle au patrimoine naturel et culturel de la communauté ?

J'utilise le site comme architecte. Lorsque j'ai un projet, ce site plus vaste comprend la flore, la faune et les gens, y compris leur patrimoine et leur culture. Et puis il y a la façon dont les gens voient les matériaux : comment ils les ont traités par le passé et ce qu'ils en font maintenant. Je laisse donc le site prendre les décisions, et j'essaie d'être un modeste dessinateur sous le commandement du site. Cela inclut la population locale, son interprétation de l'espace, de la lumière, des matériaux, de la gravité et des solutions structurelles, et j'utilise tout cela pour créer quelque chose de nouveau et d'innovant. Je ne copie pas juste le style des bâtiments traditionnels ; j'étudie leur processus de création et j'essaie d'utiliser l'incroyable pouvoir dont nous disposons actuellement avec la technologie et les outils modernes. J'aime tirer parti de capacités extrêmement pointues et modernes et revenir aux populations autochtones locales, à la flore et à la faune autochtones ; je regarde même comment la botanique et les arbres se comportent sur le site. Je tire des leçons de tout cela pour créer une décision architecturale ancrée dans le lieu, loin de la mode et du dernier style en matière d'architecture, des médias ou des publications.

Je suis profondément intéressée par l'architecture. J'admire les efforts déployés pour utiliser la durabilité et les méthodes traditionnelles, comme la circulation d'air ou la production de chaleur sans utiliser d'électricité.

Les peuples autochtones sont vulnérables à certains égards et ont été les victimes des compagnies de l'industrie extractive, de compagnies pétrolières et de sociétés minières qui ont violé les droits fondamentaux de communautés vulnérables dans le monde entier. Il est important que les gouvernements et les dirigeants mondiaux comprennent l'importance des peuples autochtones et ce qu'ils peuvent apporter. Ils sont en première ligne dans la lutte contre le changement climatique et la protection de la biodiversité, de la forêt tropicale et de nos eaux. Tous ces combats sont liés : le nombre d'autochtones et de défenseurs des droits humains qui ont été tués en essayant de protéger leurs terres est bien connu. C'est une réalité que nous ne devons jamais négliger. Les dirigeants mondiaux et les défenseurs des droits humains luttent pour les protéger des entreprises destructrices qui anéantissent leurs terres et constituent une menace pour notre survie.

J'ai étudié l'anthropologie et l'archéologie pour apporter une base solide à mes décisions architecturales. Je regarde comment les peuples autochtones considèrent les matériaux et l'environnement, et comment ils ajoutent de la valeur à ce que la nature leur a donné. Leurs exemples sont très riches et d'une certaine manière, plus la nature leur pose de défis, plus les gens étaient innovants dans le passé. Je suis l’élève de la communauté locale, et j’apprends comment utiliser les nouvelles technologies pour comprendre et repenser les décisions du passé d'une manière plus contemporaine.

Nous sommes aujourd'hui mieux équipés grâce à l'incroyable pouvoir de l'intelligence artificielle. Le télescope est une extension de notre œil biologique et de notre vision, et le pouvoir qu'ils donnent à notre œil dépasse l'imagination. Et je pense que l'intelligence artificielle est une extension de notre cerveau et que, dans un avenir proche, elle commencera à apporter des solutions au changement climatique. Mais, je suis optimiste et je ne pense pas que ce soit la première fois que le globe traverse des extinctions massives, comme la fin des dinosaures il y a 65 millions d'années. C'est la seule à laquelle nous assistons actuellement, mais ce n'est pas nouveau pour notre mère, la Terre.

En tant que défenseurs des droits de l'homme, nous devons être optimistes, mais je pense que l'optimisme n'a malheureusement que très peu de place. Malgré l'Accord de Paris, où nous étions censés limiter l'augmentation des températures à 1,5°C dans le monde entier, nous atteindrons bientôt 2 degrés, ce qui est extrêmement dangereux. Nous voyons à quel point le monde est dépendant des combustibles fossiles, alors que nous devrions nous lancer dans une révolution avec les énergies renouvelables. Nous avons vu que l'énergie renouvelable est vraiment l'avenir. Nous ne sommes toujours pas assez engagés pour nous lancer dans cette révolution. Le seul aspect encourageant de tout cela, ce sont les jeunes et les peuples autochtones. Et ce sont des gens comme M. Khammash qui, malgré le fait que l'architecture soit l'un des plus grands contributeurs aux émissions de CO2 dans le monde, envisage une nouvelle voie. Ces personnes doivent être la majorité. Nous devons adopter une nouvelle approche. Ce sont des organisations telles que l'UNESCO qui peuvent montrer la voie pour les 50 prochaines années afin que nous puissions éviter un changement climatique catastrophique dans le monde. Voilà l'espoir : que les voix des peuples autochtones et des jeunes ne soient pas étouffées.

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Cinq sessions de dialogue couvrant cinq thèmes ont lieu en 2022, chacune étant rejointe par des penseurs de diverses régions pour dialoguer en binôme. Ces dialogues interdisciplinaires inspirent de nouvelles visions pour les 50 prochaines années du patrimoine mondial.

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