Patrimoine archéologique de la ville de Tébessa

La ville millénaire de Tébessa, située à l’est du pays, à 600 km de la capitale Alger, au confluent des hauts plateaux et de l’Atlas saharien, révèle une richesse patrimoniale exceptionnelle, notamment archéologique, témoignant d'un passé prestigieux de cette importante cité de l’Algérie antique, des origines numides à l'imposante cité byzantine. La diversité des sites remarquablement conservés, raconte des siècles d'histoire et révèle l’importance de la région dans l'essor de grandes civilisations qui ont façonné l'Afrique du Nord depuis les temps préhistoriques.

Les monuments et sites archéologiques proposés au classement sur la liste indicative du patrimoine mondial figurent parmi les biens culturels les mieux préservés d'Algérie et d'Afrique du Nord. Ils constituent des témoignages uniques et exceptionnels de la grandeur de la ville de Tébessa et du développement d'importantes activités économiques, militaires, sociales et religieuses qui s'y sont épanouies au fil des siècles. Ces innovations architecturales et techniques ont conféré à la ville un cachet particulier, lui permettant de s'imposer comme une cité rayonnante dans l'ensemble de l'Est algérien durant de nombreux siècles.

Les attributs, composés essentiellement par le patrimoine archéologique, témoignent de la valeur universelle exceptionnelle du bien proposé au classement. Ils comprennent d'importants monuments en bon état de conservation. Les principaux sites et monuments qui sous-tendent la valeur exceptionnelle du bien sont :

Temple de minerve : 35°24'16.96"N 8° 7'20.86"E
Arc de triomphe Caracalla : 35°24'16.96"N 8° 7'23.09"E
Amphithéâtre de Tébessa : 35°24'4.40"N 8° 7'25.85"E
Rempart Byzantin : 35°24'9.63"N 8° 7'22.42"E
Basilique de Tébessa : 35°24'32.68"N 8° 7'36.71"E
Temple romain de Tébessa El-Khalia : 35°23'0.14"N 8° 6'0.97"E

L’héritage millénaire de Tébessa, témoin privilégié des époques révolues, offre aujourd’hui une image saisissante de merveilles, reflets de la mémoire du territoire et de ses cultures ancestrales. Cette splendeur fait la renommée de cette grande cité, dont les origines pourraient remonter aux temps protohistoriques.

L’antique Théveste, Tébessa d’aujourd’hui, se positionne comme l’une des villes phares de l’Algérie, abritant des joyaux architecturaux uniques et exceptionnels, hérités des grandes civilisations de l’Antiquité. Ces ensembles patrimoniaux remarquables, tant par leur histoire et leur architecture monumentale que par les techniques de construction et les pratiques sociales et religieuses qu’ils illustrent, confèrent au patrimoine de la ville de Tébessa une valeur universelle exceptionnelle.

La sélection de six (06) sites archéologiques se justifie en premier lieu par leur rôle de marqueurs chronologiques d'une histoire de près de six siècles. Ils témoignent d'événements politiques, militaires et religieux majeurs qui ont imprégné l'Algérie antique. Ils offrent un aperçu unique des différentes phases de l'histoire, des débuts de l'Empire romain à la période byzantine, en passant par les crises et les transformations qui ont marqué cette région du sud-est de l’Algérie.

Leur inscription se justifie également par leur exemplarité et particularité en Algérie et en Afrique du Nord, tant sur le plan architectural que sur le plan historique. Ils représentent un patrimoine exceptionnel, témoignant de la richesse et de la complexité de l'histoire de la ville et de la région de Tébessa. Le dernier aspect, et non des moindres, qui justifie la sélection des biens proposés est leur état de conservation. Ils constituent des exemples rares en matière de conservation de biens culturels. Le temple de Minerve, la muraille byzantine et la grande basilique restent des exemples édifiants d'un patrimoine archéologique très bien conservé, qui a transcendé les âges pour véhiculer d'importantes leçons technologiques, artistiques et historiques.

Critère (ii) : Les six (6) biens archéologiques, hérités de la grandeur de la ville de Tébessa entre le premier et le sixième siècle après Jésus-Christ, constituent des témoignages uniques d'importants échanges d'influence sur près de 500 ans entre les populations locales et les différentes populations venues de la partie nord de la Méditerranée. Ces monuments sont surtout des témoignages de savoir-faire en matière de construction et d'aménagement urbain. Ils témoignent également des événements sociaux, militaires et religieux issus des différents échanges entre les populations locales et les différents conquérants.

Critère (iv) : L'exemplarité des biens proposés réside dans chaque monument, qui, par sa composition, son histoire et sa fonction, sa forme, son architecture et ses matériaux de construction demeure un exemple unique de la grandeur et du développement civilisationnel qu'a connu la ville de Tébessa et l’Algérie durant l’antiquité.

Le Temple de Minerve :

Constitue un témoignage exceptionnel de l’architecture développée en Algérie durant l’Antiquité romaine. Érigé au IIe siècle, ce temple a été dédié à Minerve, déesse de la sagesse, des arts et de la stratégie militaire. C’est l’un des temples les mieux conservées en Algérie et en Afrique du Nord.

L'arc de triomphe de Caracalla :

Érigé en 213 en l’honneur de l’empereur Caracalla, fils de Septime Sévère (empereur d’origine numide), l’édifice présente une forme presque cubique, soutenue par des colonnes massives à chapiteaux corinthiens. Il possède quatre façades, chacune constituée d'arcs réalisés avec de grandes pierres polies, qui portaient autrefois des médaillons illustrant diverses scènes. Il rappelle l’Arc de Septime Sévère à Leptis Magna en Libye, ainsi que l’Arc de Janus à Rome, et fait partie des rares vestiges romains les mieux conservés et les plus importants en Algérie. Il demeure l’un des rares au monde avec ses quatre faces identiques. Il fut intégré dans la citadelle de la période byzantine, érigée pour protéger la ville des pillages des Vandales.

La Basilique Chrétienne de Sainte Crispina :

L’une des plus grandes basiliques chrétiennes d’Afrique du Nord, érigée en l’honneur des martyrs, en particulier sainte Crispina, une Numide de Tébessa décapitée par les Romains en 304. Cette basilique, exceptionnelle par sa taille et son architecture, fut pendant des siècles un haut lieu de pèlerinage pour de nombreux chrétiens d’Afrique du Nord, avant l’avènement de l’islam.

Les vestiges, encore bien conservés malgré l’urbanisation de l’environnement immédiat de ce joyau de l’architecture antique, témoignent de l’histoire du christianisme et des persécutions subies par les premiers chrétiens en Afrique du Nord. Les colonnes, les fondations et les mosaïques qui subsistent attestent de la richesse culturelle et spirituelle de cette région, ainsi que de l'importance du dialogue interreligieux.

L’amphithéâtre antique :

Un exemple impressionnant de l’ingénierie de la période antique, encore visible malgré les siècles. Ce temple du divertissement servait principalement aux jeux de gladiateurs, aux spectacles publics et aux événements officiels. Sa forme elliptique distinctive, par rapport aux autres théâtres romains, en fait une œuvre architectural unique. Avec des dimensions axiales d'environ 80 × 70 m et des rangées de gradins pouvant atteindre 15 niveaux, il pouvait accueillir environ 7 000 spectateurs.

La Muraille Byzantine : Un exemple remarquable de fortifications militaires Byzantines en Algérie :

La muraille byzantine de Thevest, ou le rempart de Thevest, est un rectangle de 320 mètres de long sur 280 mètres de large. L’enceinte est une forte muraille en pierres de taille, qui est restée en assez bon état pendant plusieurs siècles. Elle constitue un exemple unique de fortification appartenant à cette période sur l’ensemble du territoire national et en Afrique du Nord. Elle est unique par ses aspects architecturaux d’enceinte défensive, mais elle est également importante en tant que témoignage historique des perturbations politiques qu’a connues la région et qui ont nécessité la construction d’une enceinte défensive de cette ampleur.

Authenticité

Les sites archéologiques qui composent le bien témoignent de la richesse et de l'importance historique de Tébessa. Ces vestiges, remarquablement conservés malgré leur intégration progressive au tissu urbain moderne, offrent un témoignage précieux du passé. À ce jour, la plupart des sites n'ont pas fait l'objet de restauration, préservant ainsi leur authenticité originelle.

Cependant, l'arc de Caracalla, monument emblématique de Tébessa, constitue une exception. Les travaux de consolidation entrepris au début des années 2000, bien que mineurs et motivés par de bonnes intentions, ont partiellement altéré son authenticité en introduisant des matériaux visant à soutenir la base de l'arc. Il est donc impératif de procéder à une intervention de réhabilitation respectueuse des normes internationales en matière de conservation du patrimoine. Cette démarche permettra de rétablir l’état initial d’avant l’intervention, pour une meilleure préservation de son authenticité pour les générations futures.

Intégrité

L'intégrité remarquable de ces six vestiges se manifeste par la préservation de leurs composantes originelles, permettant des lectures aisées de leurs fonctions initiales et de leur importance dans le paysage urbain de l’antique Thevest. Cette intégrité englobe la substance physique des matériaux et les techniques de construction employées. L'arc de Caracalla, malgré une restauration mineure inappropriée, conserve une grande partie de ses éléments constitutifs, ce qui le place au second rang des monuments exceptionnels de son genre après celui de Rome. Érigé au IIe siècle, il a été habilement intégré dans la muraille byzantine, transformant ainsi sa fonction sans altérer son essence. Aujourd'hui encore, il sert de porte d'accès au centre historique de la ville, perpétuant une tradition millénaire.

Le temple de Minerve, quant à lui, a traversé les siècles et demeure l'un des rares temples de l'époque romaine encore debout en Algérie et en Afrique du Nord. Long de 15 mètres, large de 9 et haut de 9, il a conservé intact l'ensemble de ses éléments constitutifs, notamment ses différents décors. La frise extérieure, en particulier, est richement ornée. Les pilastres sont décorés de têtes de béliers et de taureaux avec leurs bandelettes du sacrifice. Ceux de plus grande dimension présentent les attributs de Minerve : la chouette aux ailes déployées, accompagnée de deux serpents entrelacés de rameaux d'olivier.

Les moyens consacrés par l'État algérien permettent de maintenir l'intégrité et de préserver l'authenticité de l'ensemble des biens proposés au classement, qui restent des témoignages uniques de l'histoire de l'humanité, qui s'est déroulée dans la ville de Tébessa et sa région. Ils offrent aux générations d'Algériens et aux visiteurs du monde entier la possibilité de voyager dans le temps et de découvrir la richesse et la grandeur des repères identitaires du peuple algérien.

Ainsi, la préparation de la proposition d’inscription du patrimoine archéologique de la ville de Tébessa sur la liste indicative du patrimoine mondial a fait l’objet d’une large consultation incluant les différentes parties prenantes. Cette démarche a été couronnée par un atelier participatif de soutien à la proposition, organisé au sein de l’assemblée populaire de la wilaya. Un atelier qui a réuni l’ensemble des partenaires concernés, notamment les élus, les gestionnaires, les universitaires et les représentants de la société civile. Une déclaration d’appui et de consentement préalable et éclairé a été lue et signée au nom de tous les participants.