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Nedroma et les Trara

Date of Submission: 28/04/2025
Criteria: (ii)(iv)(v)
Category: Cultural
Submitted by:
Délégation permanente de l'Algérie auprès de l'UNESCO
State, Province or Region:
Commune de Nedroma et Commune de Honaïne, Wilaya de Tlemcen
Coordinates: N35 00 49.00 W1 44 52.76
Ref.: 6835
Disclaimer

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Property names are listed in the language in which they have been submitted by the State Party

Description

Type : Paysage culturel qui englobe : La ville historique de Nedroma, la ville historique de Honain, ainsi qu’une portion des monts des Trara situés entre ces deux cités anciennes.

Nédroma, capitale des Trara, ville de l'Ouest algérien perchée à plus de 600 mètres d'altitude, au nord-ouest de la wilaya de Tlemcen. Son territoire s'étend sur plus de 140 km². Nichée sur le versant nord du Djebel Fillaoussène, point culminant du massif des Trara, Nédroma bénéficie d’un cadre naturel et paysager distinctif. Ce massif montagneux s’étire d’ouest en est jusqu’à la vallée de la Tafna et est bordé au nord par la mer Méditerranée, en contact avec une étroite bande de plaines littorales, entre autre grâce à la ville et le port de Honaine, qui a joué un rôle important dans les échanges méditerranéens.

Nédroma, fondée en 1150 par Abdal-Mu’min Ben Ali el-Koumi el-Nedromi, premier calife  de la dynastie almohade et unificateur du grand Maghreb, tire son nom sur les vestiges d’une ancienne cité berbère nommée Fellaoucen. La ville, qui avait déjà connu un essor sous les Almoravides au XIe siècle en tant que centre religieux et culturel, a vu son urbanisme se développer et son importance stratégique renforcée sous Abdal-Mu’min. Devenue un centre d’influence almohade, elle s’est enrichie d’un patrimoine architectural remarquable, comprenant de nombreuses mosquées et édifices publics.

Au XIIIe siècle, sous les Zianides, Nédroma devient un centre de savoir et un carrefour commercial stratégique, favorisant la diffusion de la culture arabo-andalouse. Sous l’ère ottomane (XVIe-XIXe siècle), elle maintient son importance régionale avant de passer sous domination française en 1844. Depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962, la ville maintient son rôle de pôle historique et culturel, réputée pour ses unités monumentales, telle que la Grande Mosquée, et ses traditions artisanales, notamment le tissage et la broderie.

Riche d’un patrimoine architectural marqué par les influences arabo-islamiques, la ville de Nédroma se distingue par sa médina aux strates historiques successives. Son urbanisme s’organise autour d’un noyau central composé de la grande mosquée, du hammam et du souk. Composée de quatre quartiers principaux convergeant vers la place de la Tarbiâ, la ville possède un réseau de circulation structuré par des "Derb", complété par des ruelles et impasses assurant sécurité et intimité. Son architecture s’adapte harmonieusement au relief et au climat local. Ville natale d’Abdal-Mu’min Ben Ali el-Nedromi, Nédroma a joué un rôle politique, religieux, intellectuel, culturel et économique majeur. Intimement liée géographiquement et historiquement aux monts du Trara, elle conserve un riche héritage, abritant des vestiges historiques et ayant vu émerger de nombreux saints et réformateurs à travers l’histoire.

La médina se distingue par son riche patrimoine immatériel, reflétant des siècles de traditions et de savoir-faire. Réputée pour sa musique Hawzi et la nouba, héritage arabo-andalou transmis oralement, la ville perpétue cet art à travers ses écoles et associations culturelles. Son artisanat traditionnel, notamment le tissage de la soie, la broderie, la poterie et la bijouterie, reste un pilier de son identité culturelle. Les pratiques sociales, les fêtes traditionnelles et la gastronomie locale, mêlant influences arabes, berbères et andalouses, illustrent également cet héritage vivant, célébré et préservé par ses habitants.

Honaïne, ville portuaire située près de Nédroma dans la région des Trara, fut d’abord une escale phénicienne et une cité numide avant de devenir un carrefour commercial stratégique reliant la Méditerranée, le Tafilalet et le Soudan. Dès le VIIIe siècle, elle joua un rôle dans la conquête de la péninsule ibérique et fut disputée entre les Fatimides et les Omeyyades pour le contrôle de la route de l’or.

Au Xe siècle, une tour de guet y fut construite contre les incursions chrétiennes. Abdal- Mu’min Ben Ali el-Nedromi, favorisa son développement, lui accordant des privilèges fiscaux. Sous cette dynastie, Honaïne prospéra comme un centre commercial majeur, faisant office de port de Nedroma, elle participa à la construction navale du dynaste, Sous les Zianides, elle devint le principal port de Tlemcen, renforçant son rôle économique et culturel.

La ville, décrite comme florissante et dotée de riches terres agricoles, connut un déclin avec celui de Tlemcen. Bien qu’attirant le commerce vénitien durant l’occupation espagnole d’Oran, elle subit des destructions en 1534 et accueillit des réfugiés morisques. La concurrence commerciale et l’expansion ibérique précipitèrent son abandon.

La ville historique de Honaïne était naturellement délimitée par deux oueds : l’Oued Honaïne à l’est et l’Oued Rigou à l’ouest. Elle s’étendait sur une superficie de forme trapézoïdale, ceinte de remparts en tabiya (terre battue). De ces fortifications subsistent encore aujourd’hui des vestiges notables, notamment une grande portion de la muraille orientale, largement préservée, ainsi que quelques sections du rempart occidental, en particulier celles attenantes à la kasbah, au sud-ouest de la ville.

Située précisément dans cette partie sud-ouest, la kasbah, ou citadelle, est perchée à l’extrémité d’un escarpement rocheux. Son architecture, remarquable d’ingéniosité, exploite habilement la topographie du site : les murs de la forteresse prolongent la masse rocheuse et s’y élèvent naturellement, renforçant ainsi la défense du lieu.

Les remparts de la ville étaient percés de plusieurs accès. Certains ont disparu au fil du temps, tandis que deux d’entre eux subsistent encore, bien qu’ils aient perdu une partie de leur configuration et de leur authenticité architecturale d’origine.

Un chemin de ronde supérieur longe l’ensemble du tracé des remparts de la ville et de la kasbah. Ces enceintes sont ponctuées de tours à plan carré ou rectangulaire, régulièrement espacées. À ce jour, une vingtaine de ces tours sont encore visibles, notamment sur le rempart occidental.

Au pied de la kasbah se trouvait autrefois le port intérieur, aujourd’hui remplacé par un bâtiment moderne de plain-pied et des vergers. À l’origine, ce port adoptait une forme rectangulaire régulière et s’ouvrait vers le nord-est sur la mer par une large ouverture voûtée, facilitant l’entrée et la sortie des embarcations. Il était relié à la mer par une canalisation et protégé par un mur défensif flanqué de deux tours, dont seules quelques traces sont encore visibles aujourd’hui.

Plus au nord, le port général se déploie sous la forme d’une étendue marine quasi en fer à cheval, délimitée par deux falaises abruptes, l’une à l’ouest, l’autre au nord. À la base de cette dernière se trouve un grand réservoir d’eau douce, conçu pour approvisionner les navires. De forme rectangulaire, ce réservoir, bien conservé, est encore visible aujourd’hui et témoigne de l’ingéniosité hydraulique de l’époque.

Au-delà de ses structures visibles, Honaïne recèle encore de nombreux vestiges archéologiques, témoins de son riche passé. La ville fait régulièrement l’objet de campagnes de fouilles qui mettent au jour de nouvelles traces de son histoire plurimillénaire, reflétant les différentes phases clés de la civilisation méditerranéenne.

Justification of Outstanding Universal Value

La médina de Nedroma liée géographiquement et historiquement à la ville et le port de Honaïne dans la région des Trara constituent un témoignage exceptionnel de l’héritage architectural, urbanistique, esthétique et culturel islamique médiéval en Algérie et en Afrique du Nord. Situées stratégiquement près de la côte méditerranéenne, ces terres ont été un carrefour historique d’échanges entre l’Europe et l’Afrique, notamment grâce au port de Honaïne, favorisant une dynamique culturelle et architecturale unique. Nedroma, l’une des médinas algériennes les mieux conservées et les plus complètes, capitale de la région des Trara, riche de traditions ancestrales, forment un ensemble harmonieux où l’histoire, l’architecture, le paysage et le mode de vie traditionnel se perpétuent à travers les siècles.

Véritable joyau du patrimoine islamique médiéval, la médina de Nedroma illustre l’évolution de l’architecture et de l’urbanisme sous l’influence des Almohades et des Zianides, contribuant à la diffusion et au développement de cet héritage à travers la Méditerranée. Honaïne quand a elle, se distingue par ses remparts en terre battue datant de l'époque médiévale islamique, sa kasbah, et son port, et conserve encore des vestiges remarquables révélés progressivement par les fouilles archéologiques, témoignant d’une histoire riche et stratégiquement liée à la Méditerranée.

Medina indissociable de sa région les Trara et de son ancien port Honaïne, la relation entre l’homme et son environnement y est visible à travers l’organisation urbaine et les constructions en pierre et en terre, cet ensemble historique et culturel incarne un exemple remarquable d’un urbanisme traditionnel islamique et d’un mode d’occupation du territoire en harmonie avec son environnement naturel et social. Les influences andalouses, maghrébines et méditerranéennes, perceptibles dans son architecture et ses pratiques  culturelles, témoignent de la richesse des échanges qui ont façonné la région.

Critere (ii) : Nédroma, Honaïne et les Trara, situées près de la côte méditerranéenne, ont joué un rôle clé dans les échanges culturels, commerciaux et intellectuels entre l’Europe et l’Afrique. Cette position stratégique a façonné leur identité et leur patrimoine architectural, marqué par des influences méditerranéennes. La médina de Nédroma illustre cet héritage avec son  tissu urbain composé de maisons à patios, typiques de l’architecture islamique médiévale, adaptées au climat local.

L’héritage religieux et intellectuel de la région est également notable, avec de nombreuses mosquées, zaouias soufies et mausolées témoignant du rôle de Nédroma dans la diffusion du savoir spirituel. En tant que berceau de la dynastie almohade, la ville a joué un rôle majeur dans la formation d’une identité culturelle forte, encore visible aujourd’hui dans les pratiques locales.

Honaïne, quant à elle, fut un centre commercial florissant, facilitant les échanges entre la Méditerranée et l’arrière-pays maghrébin. Sous les Almohades et les Zianides, le port prospéra grâce à ses exportations de textiles, d’épices, de céréales et de métaux. Ses chantiers navals étaient réputés pour la construction de navires commerciaux et militaires.

En plus de son dynamisme économique, la région fut un foyer d’échanges culturels, attirant lettrés, artisans et commerçants andalous, et favorisant la circulation des savoirs. La région, par son architecture, son tissu urbain et son patrimoine religieux, incarne ainsi un brassage culturel exceptionnel, enrichi par des siècles d’interactions entre l’Orient, l’Occident et l’Afrique du Nord.

Critère (iv) : Nedroma capitale des Trata est un exemple exceptionnel d’une médina islamique médiévale en Algérie, illustrant de manière remarquable l'évolution architecturale et urbaine sous les dynasties Almohade et Zianide. Fondée au XI siècle, elle conserve des éléments remarquables tels que la Grande Mosquée, construite à l’époque almoravide, avec son minaret Zianide du XIV siècle. Le Hammam el Bali, également datant du XI siècle, fonctionne encore aujourd'hui, témoignant de la pérennité des traditions. La Casbah Almohade rappelle l'importance militaire de la ville. Malgré les changements historiques, Nedroma a su préserver son intégrité architecturale et son rôle de centre politique, religieux et culturel.Adossée aux montagnes de l’ouest algérien et située à proximité de Honaïne, Nedroma témoigne d’une occupation ancienne qui a façonné son paysage bâti et son tissu social. Son intégration harmonieuse dans son environnement naturel renforce son authenticité et sa valeur patrimoniale.

Critère (v) : La médina de Nedroma illustre un mode d’occupation du territoire qui s’est développé en harmonie avec son environnement naturel et socio-culturel. Son implantation dans un paysage de montagne de l’ouest algérien témoigne d’une adaptation ingénieuse aux contraintes géographiques et aux nécessités socio-économiques de ses habitants.

Le tissu urbain de Nedroma est le reflet d’un savoir-faire ancestral en matière de construction et d’urbanisme, où les éléments architecturaux s’intègrent parfaitement au relief et au climatde la région des Trara. Les maisons traditionnelles, organisées autour de patios intérieurs, garantissent fraîcheur et intimité, tout en créant une continuité urbaine qui respecte les principes de la médina islamique.

Enfin, la capacité de Nedroma à résister aux périodes de déclin et à s’adapter aux changements historiques tout en conservant son authenticité urbaine et architecturale en fait un exemple unique de continuité historique. Cette résilience illustre la manière dont une communauté humaine a su préserver son patrimoine matériel et immatériel tout en s’adaptant aux évolutions du temps.

Honaïne constitue également un témoignage remarquable d’un mode d’occupation du territoire adapté à un environnement à la fois côtier et montagneux des Trara. L’implantation stratégique de la ville, l’organisation de son tissu urbain, ses systèmes défensifs intégrés au relief naturel, ainsi que les infrastructures hydrauliques et portuaires, illustrent une adaptation ingénieuse des sociétés anciennes à leur milieu et à leurs besoins économiques, sociaux et sécuritaires.

Statements of authenticity and/or integrity

Intégrité 

La délimitation du bien inclut l’ensemble des éléments essentiels à l’expression de sa Valeur Universelle Exceptionnelle. Son périmètre englobe le tissu urbain historique de Nedroma, les monuments emblématiques tels que la Grande Mosquée almoravide, le minaret zianide, le Hammam el Bali, ainsi que les quartiers artisanaux et commerciaux, le port de Honaïne et le paysage des Trara, garantissant ainsi la préservation de son authenticité et de son intégrité. Toutefois, certains de ces attributs nécessitent des mesures de conservation spécifiques afin de préserver leur état d’origine et d’assurer la transmission de cet héritage aux générations futures.

Dans de nombreuses médinas, les modifications apportées aux habitations pour répondre aux exigences modernes de confort menacent progressivement leur intégrité. L’utilisation de matériaux modernes et les transformations architecturales rompent l’harmonie d’origine, mettant en péril l’authenticité de ces espaces historiques. Par ailleurs, la détérioration du bâti et le manque d’infrastructures adaptées poussent de nombreux habitants à quitter la médina pour des quartiers plus modernes, accélérant son dépeuplement et fragilisant son avenir.

Cependant, à Nedroma, ces altérations restent encore limitées. La structure traditionnelle de la médina est globalement préservée, et les transformations n’ont pas encore atteint un niveau critique. Néanmoins, sans des efforts de préservation et d’adaptation mesurée, la médina pourrait à terme connaître le même sort que d’autres centres historiques en déclin. L’adoption récente par le Ministère de la Culture et des Arts d’un PPSMVSS, souligne les efforts de l’état pour la préservation de la médina et l’inscrit dans un cadre de stratégie de sauvegarde et de mise en valeur à long terme.

Authenticité 

La médina de Nedroma conserve un tissu urbain authentique, caractérisé par des ruelles sinueuses, des maisons à patios, des mosquées, des zaouïas, des hammams et des quartiers artisanaux et commerciaux. Cet ensemble harmonieux témoigne d’un urbanisme propre aux villes islamiques traditionnelles, conçu pour s’adapter aux conditions géographiques, climatiques et aux besoins sociaux de ses habitants. En tant que centre spirituel et intellectuel, la médina occupait une place prestigieuse, comparable à celle des grandes cités musulmanes.

L’authenticité de Nedroma et de la région des Trara se manifeste à travers la préservation de leur architecture traditionnelle et de leurs fonctions sociales et culturelles. L’organisation de la médina, demeurée intacte au fil des siècles, reflète un mode de vie ancestral. Ses monuments emblématiques, tels que la Grande Mosquée almoravide, le minaret zianide et le Hammam el Bali, illustrent la maîtrise des savoir-faire traditionnels et l’évolution des styles architecturaux almohade, almoravide et zianide.

L’utilisation de matériaux locaux et de techniques de construction adaptées à l’environnement témoigne d’une profonde connaissance du territoire et d’un respect des pratiques constructives ancestrales. Cette fidélité aux méthodes traditionnelles renforce l’authenticité de la médina.

Par ailleurs, l’identité culturelle de Nedroma et des Trara perdure à travers les pratiques artisanales, les traditions spirituelles et les expressions culturelles vivantes. La transmission intergénérationnelle des savoir-faire et des coutumes contribue à préserver cet héritage exceptionnel, garantissant la continuité de son rôle historique et culturel.

Comparison with other similar properties

Comparaison avec la Medina de Kairouan en Tunisie :

Nedroma et Kairouan sont deux villes du Maghreb dont l’histoire est marquée par une influence religieuse, intellectuelle et politique considérable. Kairouan, fondée en 670 par Oqba Ibn Nafi, s’est imposée comme le premier centre religieux de l’islam en Afrique du Nord. Son rayonnement s’est affirmé avec la construction de la Grande Mosquée, qui  demeure une référence architecturale et spirituelle, contribuant à la diffusion du rite malikite et de l’enseignement islamique dans tout le Maghreb et au-delà.

Nedroma, quant à elle, se distingue non seulement par son rôle dans la transmission du savoir islamique et de la culture andalouse, mais aussi en tant que berceau de la dynastie almohade. C’est en effet dans cette ville que Ben Ali, originaire de la région, s’est préparé à devenir l’un des plus grand dynastes musulman, bâtisseur de l'empire almohade, unificateur du Maghreb et d’Al-Andalus. Abdal-Mu’min Ben Ali a fait du mouvement almohade une force politique et militaire redoutable. Son ascension, depuis Nedroma jusqu’à la conquête de Marrakech et la consolidation de la dynastie almohade, témoigne du rôle stratégique de cette ville dans l’histoire maghrébine. À l’instar de Kairouan, Nedroma a également été un centre de savoir et d’échanges culturels. Après la chute de Grenade en 1492, elle est devenue un refuge pour de nombreux intellectuels, artisans et savants andalous, perpétuant ainsi un héritage artistique et scientifique d’une grande richesse. Ce brassage culturel a renforcé son statut de ville-phare de la culture islamique et soufie en Algérie.

Le patrimoine architectural de ces deux villes illustre leur importance historique. Kairouan, avec ses ruelles anciennes et ses monuments prestigieux comme la Grande Mosquée et les bassins des Aghlabides, reflète son passé de capitale religieuse et politique. De son côté, Nedroma conserve une médina marquée par l’empreinte andalouse, avec ses maisons traditionnelles, ses ruelles étroites et ses édifices religieux tels que la Grande Mosquée zianide, qui rappelle son rôle de centre spirituel et intellectuel.

Aujourd’hui, ces deux villes restent des symboles de l’histoire maghrébine. Kairouan est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, tandis que Nedroma, bien qu’inscrite sur la  liste indicative, mérite une reconnaissance similaire en raison de son héritage exceptionnel en tant que centre spirituel islamique, foyer de la culture arabo-andalouse et berceau de la dynastie almohade. Leur parcours démontre comment des villes de taille modeste ont pu exercer une influence décisive sur l’histoire religieuse, politique et culturelle du Maghreb et du monde islamique.

Comparaison avec la Medina de Constantine en Algérie :

Sur le plan architectural, les deux médinas témoignent d’un urbanisme traditionnel maghrébin caractérisé par un réseau de ruelles étroites, des maisons à patio et des espaces publics animés autour des mosquées et des marchés. Cependant, la médina de Constantine, construite sur un relief escarpé, a développé une architecture unique adaptée à son environnement rocheux, avec des maisons suspendues au-dessus des gorges du Rhumel. En revanche, Nedroma, située dans une plaine entourée de collines, présente un tissu urbain plus homogène, fortement influencé par l’architecture andalouse. D’un point de vue historique, les deux villes ont joué un rôle clé à différentes époques. Constantine, ancienne Cirta numide, a connu une histoire plus ancienne et plus mouvementée, traversant les périodes romaine, byzantine, arabe et ottomane. Son statut de capitale régionale en a fait un carrefour stratégique du commerce et  du savoir. Nedroma, bien que plus modeste en taille, se distingue comme un centre religieux et intellectuel important, notamment avec son rôle dans l’émergence de la dynastie almohade sous Abdal-Mu’min Ben Ali ben Ali, qui a unifié le Maghreb et Al-Andalus.

À Constantine, la médina a subi d’importantes transformations qui ont profondément altéré son tissu urbain traditionnel. La pression démographique, le manque d’entretien et la modernisation mal contrôlée ont conduit à la dégradation de nombreuses habitations. Face aux conditions de vie devenues difficiles, une grande partie des habitants a préféré s’installer dans les nouveaux quartiers, laissant la médina se vider progressivement de sa population originelle. Cette désertification a accentué l’abandon du bâti, menaçant l’identité même de cet espace historique.

À Nedroma, en revanche, les dégâts restent encore limités. La médina conserve une grande partie de son architecture traditionnelle, et les altérations liées à la modernisation sont moins marquées. Le tissu urbain reste globalement préservé, et la population y demeure relativement attachée. Cependant, comme pour Constantine, le risque d’un abandon progressif existe si des mesures adaptées ne sont pas mises en place pour préserver le patrimoine tout en améliorant les conditions de vie des habitants.

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