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Massif de la Tefedest dans le parc culturel de l’Ahaggar

Date of Submission: 28/04/2025
Criteria: (i)(iii)(viii)(x)
Category: Mixed
Submitted by:
Délégation permanente de l'Algérie auprès de l'UNESCO
State, Province or Region:
Commune d’Ideles, Wilaya de Tamanghasset
Coordinates: N24 24 40.60 E5 33 15.65
Ref.: 6834
Disclaimer

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Property names are listed in the language in which they have been submitted by the State Party

Description

La Tefedest, massif granitique de l’ensemble géomorphologique de l’Ahaggar, est située au nord de la boutonnière de l’Atakor, à 250 km de la ville de Tamanrasset. Ce massif important s’étend sur une longueur de 120 km et près de 40 km dans sa plus grande largeur. Le bien proposé au classement, avec sa zone tampon, a une superficie de 10 000 km². La Tefedest culmine dans sa partie centrale avec le mont In Akoulmou à 2336 m, tandis qu’à son extrémité nord s’élève le mythique pic de l’Oudane, communément appelé Garet Edjnoun.

Cette zone patrimoniale exceptionnelle du parc culturel de l’Ahaggar a fait l’objet de diverses explorations depuis 1935, menées par plusieurs équipes de géologues, d’écologues, d’archéologues et d’alpinistes. Leurs travaux ont démontré l’originalité et la richesse des attributs patrimoniaux, particulièrement archéologiques, constitués d’importantes stations de peintures et de gravures rupestres, ainsi que d’habitats d’âge néolithique datés de près de 10 000 ans.

L'étude approfondie du patrimoine artistique d'âge néolithique et protohistorique a permis d'établir un inventaire de près de 200 abris peints ou gravés, contenant pas moins de 2 500 figures, retraçant l'évolution singulière des hommes, des cultures et des climats durant les dix derniers millénaires au Sahara central.

La richesse du bestiaire représenté dans les divers abris témoigne du long processus de changement climatique amorcé il y a 12 000 ans, qui a atteint son paroxysme avec l’installation de l’aridité actuelle. Ainsi, la Tefedest se révèle être un « point chaud » distinctif de la biodiversité mondiale, où d’importants écosystèmes, composés de zones humides et d’habitats variés, abritent encore d’importantes espèces végétales et animales relictuelles et endémiques, telles que le guépard saharien (Amayas), inscrit sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature en tant qu’espèce en danger critique d’extinction.

Justification of Outstanding Universal Value

La valeur universelle exceptionnelle de la Tefedest repose sur d'importants attributs naturels et culturels, étroitement liés à sa géographie montagneuse, qui a façonné les processus écologiques et archéologiques. La Tefedest se distingue par la combinaison de paysages naturels exceptionnels et de témoignages culturels uniques, illustrant une longue histoire d'interaction entre l'homme et son environnement. Elle occupe aujourd'hui une place prépondérante dans l'écosystème de l'écorégion saharienne ; la conservation de sa biodiversité et son exploitation durable s'inscrivent dans un effort international visant à préserver une partie de l'écosystème mondial, représentée par les différents habitats encore intacts et les espèces végétales et animales relictuelles et endémiques du massif.

Sur le plan patrimonial, particulièrement archéologique, les centaines de sites, d'abris et de monuments funéraires confèrent au site une valeur scientifique exceptionnelle pour l'étude de l'évolution de l'homme et de ses cultures dans un environnement marqué par les effets du changement climatique.

Le massif de la Tefedest, situé au cœur du parc culturel de l’Ahaggar, constitue une réserve naturelle d'importance mondiale. Il abrite une biodiversité exceptionnelle et un patrimoine archéologique unique, comprenant des centaines d'abris ornés de peintures rupestres datant du néolithique. L'étude de ces multiples atouts contribue à une meilleure compréhension de l'histoire de la terre, de l'évolution des sociétés préhistoriques et des enjeux environnementaux et climatiques dans cette région hyperaride du Sahara central.

Les connaissances traditionnelles, précieusement conservées par les populations du massif, représentent un héritage inestimable qui a favorisé l’adaptation humaine à cet environnement. Cette adaptation s'est traduite par une exploitation rationnelle et durable des ressources du territoire, permettant ainsi le maintien de l’intégrité des habitats. La diversité des attributs naturels et culturels exceptionnels du massif procure des services écosystémiques essentiels aux populations locales. Ces services, qui dépassent largement les bénéfices financiers directs, contribuent de manière significative à leur bien-être.

Critère (i) : La valeur universelle exceptionnelle de la Tefedest, témoin d'un processus historique et civilisationnel millénaire, se révèle à travers des centaines de sites d'habitats et d'abris ornés de peintures rupestres datant du néolithique et de la protohistoire. La documentation scientifique de ces attributs uniques a démontré une occupation et une succession culturelle exceptionnelle au sein du massif, s'étendant sur plus de 10 000 ans. Ces témoignages retracent les évolutions technologiques, sociologiques et spirituelles significatives des populations du néolithique saharien. Le génie créateur des populations actuelles du massif se manifeste par la richesse des savoirs et savoir-faire hérités, enrichis et transmis au sein d'un environnement caractéristique d'un mode de vie de mobilité, réponse ingénieuse de ces populations à la dégradation progressive du climat du Sahara central.

Critère (iii) :
La densité exceptionnelle des œuvres rupestres documentées dans le massif de la Tefedest témoigne d’une évolution significative  des hommes et des cultures  préhistoriques  et protohistoriques durant une longue période de près de dix mille ans. L'étude paléoarchéologique et artistique de ces attributs uniques et rares a permis d’individualiser d’importantes phases de l'évolution des cultures néolithiques sahariennes. Des phases chrono culturelles qui retracent à travers la profusion des techniques et des styles une périodisation de l'art rupestre renvoyant à des entités culturelles spécifiques et successives : la période des chasseurs, la période des pasteurs- éleveurs, et enfin la période protohistorique, avec l'émergence de groupes annonçant une nouvelle organisation et un nouveau mode d'occupation de l'espace, suite aux changements et à la dégradation du climat.

Critère (viii) :
La Tefedest, remarquable massif granitique, localisé au nord de l’Ahaggar, est un relief imposant parsemé de sommets, dont les plus connus sont l'In Akoulmou, point culminant du massif à 2336 mètres, et d'autres, de moindre altitude, tels que l'Isker n'Ayhid, l'Isker n'Asa et l'Oudane, appelé localement « Gert Edjnoun ». Ces formations géologiques témoignent de l'histoire mouvementée de la Tefedest et de l'Ahaggar. Le massif constitue un terrain d'étude privilégié pour les géologues, offrant la possibilité d'observer les différentes strates granitiques et de comprendre les processus qui ont façonné cette partie du Sahara au cours des millions d'années.

Critère (x) :
La Tefedest, zone archéologique et écologique d'importance majeure au sein du parc culturel de l'Ahaggar, reconnue comme une Aire OECM (Effective Area-based Conservation Measures - autres mesures de conservation efficace par zones) depuis 2020, abrite des écosystèmes essentiels pour la conservation in situ d’une riche biodiversité d'intérêt mondial. Ce sanctuaire, que représente le massif de la Tefedest, se distingue par des habitats naturels remarquablement préservés, favorisant le maintien d'espèces endémiques et relictuelles, telle l'espèce parapluie que représente le guépard saharien « Amayas », dont les populations sont en déclin dans plusieurs régions du monde, y compris le Sahara central, figure sur la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature en tant qu'espèce en danger critique d'extinction.

Les zones humides, qui s'égrènent sur plus de 100 km à travers le massif de la Tefedest, du nord au sud, jouent un rôle écologique crucial en tant qu'étapes migratoires pour les oiseaux en route vers l'Afrique subsaharienne. Ces zones humides, véritables havres de paix au cœur du Sahara, offrent des ressources vitales : eau, nourriture et abri. A ce titre leur protection est donc essentielle pour la conservation de la biodiversité aviaire et pour le maintien des équilibres écologiques du Sahara central.

Statements of authenticity and/or integrity

Authenticité :

Les attributs patrimoniaux du massif de la Tefedest composés de centaines d’abris peints et gravés et de diverses structures archéologiques notamment de monuments funéraires, sont connus et gérés durablement par l’Office du parc culturel de l’Ahaggar depuis la création du parc en 1987 et se présentent dans de meilleure condition de conservation. Les multiples documents iconographiques immortalisés sur les granites de la Tefedest, hérités des temps immémoriaux de la préhistoire, traduisent une part commune de la mémoire de l’humanité. Alors que les connaissances traditionnelles, marqueurs culturels spécifiques des populations locales du massif de la Tefedest, pérennisent des pratiques agropastorales adaptées à l'exploitation durable des ressources naturelles du territoire, grâce au développement d'activités agricoles spécifiques basées sur une longue et lente sélection d'espèces animales d'élevage et de plantes adaptées aux conditions d'aridité extrême du Sahara central.

Intégrité :

Le massif de la Tefedest constitue une unité géomorphologique et géologique individualisée au Nord du parc culturel de l’Ahaggar. Il comporte l’ensemble des attributs naturels, habitats, zones humides et espèces relictuelles et endémiques à la région. Il intègre l’ensemble des sites rupestres qui exprime parfaitement sa valeur universelle exceptionnelle, notamment les centaines d’abris de peintures qui fondent son originalité culturelle en qualité d’un important centre de la diffusion de la culture néolithique au Sahara central.

Les attributs patrimoniaux du site présentent une intégrité due à l’originalité des matériaux et des techniques de réalisation des figures peintes ou gravées, ainsi qu'à la préservation des centaines de monuments funéraires qui indiquent un savoir lié aux respects et à la séparation des deux mondes, celui des morts de celui des vivants. Les sites archéologiques documentés n’ont connu aucune intervention humaine, ni dégradation anthropique, ni opération technique de restauration. Ils se présentent dans leurs conditions initiales de réalisation à l'exception faite des impacts liés aux effets du changement climatique, tels que la décoloration, la dépigmentation naturelle, ainsi que les effets du ruissellement des eaux et celui du changement de l’orientation des vents.

Les efforts consentis par l’Office national du parc culturel de l’Ahaggar dont relève la gestion du site, sont sanctionnés ces dernières années par la production d’un outil de gestion généralisé au parc, par l’établissement d’un plan de gestion qui intègre le massif de la Tefedest, et sa traduction par un plan de protection du massif, basé sur les moyens humains existants, à travers les différents postes de contrôle et de secours installés à Mertoutek, Dehine , In Hamertek, Ouhat et Abdenizi. Un maillage territorial qui sera appelé à être développé dans la politique dessinée par les deux plans, établis dans un cadre international pour la conservation et l’utilisation durable de biodiversité d’intérêt mondial du parc culturel de l’Ahaggar.

La tradition de gestion ancrée au sein du parc a permis de réunir les conditions idoines pour la préparation de l’inscription du massif de la Tefedest. De multiples activités ont été organisées à destination des parties prenantes intervenant sur le territoire du massif, principalement les populations locales. Des forums d’échanges et d’informations ont été organisés sur site, à Mertoutek, ainsi qu’un atelier participatif d’appui à la proposition d’inscription du site, tenu au sein même de la wilaya et parrainé par le wali. Cet atelier a rassemblé les autorités locales et différents partenaires scientifiques, de la société civile et des gestionnaires de patrimoine au niveau local. Ce moment de communion, visant à une meilleure gestion et valorisation à l’international du patrimoine de la Tefedest, a été couronné par une déclaration d’appui et de consentement préalable et éclairé, lue et signée au nom de tous les participants.

Comparison with other similar properties

L’analyse comparative effectuée sur la liste du patrimoine mondial fait ressortir pas moins de quatre sites en milieux désertiques d’Asie et d’Afrique, où des éléments de comparaison sont offerts pour comprendre et apprécier l’avantage comparatif des valeurs scientifiques des attributs culturels et naturels du bien, de leur état de conservation et de gestion durable assurée par l’office national du parc culturel de l’Ahaggar. Les sites identifiés sont : Wadi Rum en Jordanie, l’Ennedi au Tchad, la Tadrart Accacus en Libye et enfin le Tassili n’Ajjer en Algérie. Cet exercice d’analyse comparative se basera sur l’analyse des différentes valeurs des attributs de la valeur exceptionnelle universelle, à savoir :

La diversité, la qualité et l’état de conservation des sites rupestres :

Les travaux d’inventaire et d’étude de l’art rupestre du massif de la Tefedest, ainsi que le système de suivi de l’état de conservation mis en place par le parc culturel de l’Ahaggar avec l’appui et l’intégration des populations de la Tefedest, principalement celles du village de Mertoutek, ont permis de maintenir les sites inventoriés dans un état de conservation très satisfaisant, sans impacts humains malgré leur mise en tourisme depuis leur découverte durant les années 1930.

La population locale, qui fournit les guides et les accompagnateurs aux agences de voyages et autres agents de conservation du parc, a su allier protection et préservation à une exploitation durable et rationnelle des œuvres peintes d’âges préhistoriques, à la différence des autres sites dans l’aire géographique du Sahara qui montrent des dégradations irréversibles non maîtrisées, engendrées par une surfréquentation due au tourisme non contrôlé à l’exemple de la Tadrart Accacus en Libye, dont les atteintes ont valu au bien son inscription sur la liste de bien en péril.

L’unicité des attributs du patrimoine archéologique :

Le massif de la Tefedest, dont la superficie est évaluée à 10 000 km², se présente comme un îlot très singulier au sein du parc de l’Ahaggar et du Sahara central. Cette position très particulière a permis aux hommes préhistoriques de produire et de développer des cultures préhistoriques exceptionnelles, même si elles s’inscrivent dans l’aire géographique du Néolithique saharien.

D’ailleurs, il est facilement observable que les dimensions et la qualité des œuvres peintes sont adaptées à la nature des supports, auvents sous blocs rocheux granitiques qui n’offraient pas de grandes surfaces, ce qui a amené les hommes néolithiques à produire un art aux dimensions spécifiques et très différencié des autres sites tels que l’Ennedi et le Tassili n’Ajjer. Un art très lié aux sites et habitats préhistoriques qui partagent les mêmes aires géographiques durant des millénaires. Une réalité culturelle et anthropologique qui commence à être élucidée par les dernières fouilles archéologiques engagées par Smaïl Iddir, chercheur au Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques d’Alger.

Le maintien et la transmission des connaissances traditionnelles en rapport avec la gestion du territoire et l'utilisation durable des ressources patrimoniales, notamment les ressources naturelles :

L’héritage ancestral, portant transmission des connaissances traditionnelles des populations nomades et semi-nomades de la Tefedest, a permis de pérenniser la présence et le maintien de l'homme dans ces zones désertiques, malgré l'accentuation des effets du changement climatique sur toute la région, dont la terrible sécheresse de l'année 1973.

Ainsi, les connaissances traditionnelles détenues et encore vivaces chez les populations de la Tefedest ont permis une exploitation rationnelle et durable des ressources naturelles, particulièrement l'exploitation des terrains de parcours dans les plaines périphériques du massif et le développement d'une biodiversité agricole au sein des villages avec des espèces et des cultivars adaptés au climat désertique.

Ce legs ancestral est bien développé dans la Tefedest, avec une utilisation ingénieuse de plantes médicinales dans la pharmacopée traditionnelle, à la différence des autres aires classées au patrimoine mondial, à l'exemple de Wadi Rum, où l'ensemble de la population est davantage attirée actuellement par les activités touristiques, en raison d'une généralisation des activités de camping avec des revenus très importants au vu de l'essor que connaît le tourisme en Jordanie comparativement aux zones sahariennes de notre pays.

Les écosystèmes et les habitats naturels de la diversité biologique d’intérêt mondial de la Tefedest :

Le système de suivi mis en place au cours des dix dernières années par les spécialistes du patrimoine naturel du Parc culturel de l’Ahaggar a permis de documenter et de recenser d’importantes espèces relictuelles et endémiques sur ce massif remarquable.

Les plantes aromatiques et médicinales, en particulier, ont fait l’objet d’une attention particulière, compte tenu des connaissances traditionnelles liées à leur identification et à leur utilisation, transmises de génération en génération. L’intérêt exceptionnel de cette biodiversité de la Tefedest réside également dans la présence de zones humides qui, s’échelonnant du nord au sud du massif, constituent des haltes cruciales pour les oiseaux migrateurs.

Ces zones jouent un rôle essentiel dans le maintien et le déplacement hivernal de ces espèces. Un autre atout majeur des habitats de la Tefedest réside dans la présence de l'une des dernières populations de guépards sahariens, une espèce classée en danger critique d'extinction dans son milieu naturel saharien et dans l'ensemble de l'Afrique du Nord-Ouest. L'intégration du massif de la Tefedest permettrait d'élargir considérablement l'aire vitale de cette espèce emblématique. L'inscription de la Tefedest au patrimoine mondial, en tant que sanctuaire d'espèces animales et végétales exceptionnelles, renforcerait de manière significative la conservation des corridors écologiques vitaux de l'écorégion du Sahara central.

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