Paysage culturel Bassari
Délégation Permanente de la République de Guinée auprès de l'UNESCO
Moyenne Guinée, Préfecture de Koundara
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Description
Le paysage culturel Bassari est situé dans la partie Nord de la République de Guinée, Préfecture de Koundara, précisément dans les Sous-préfectures de Guingan et de Termessè. Il se trouve à la frontière entre la Guinée et le Sénégal. C'est une région de collines, de montagnes et de vastes plateaux, avec un relief accidenté et des altitudes élevées et difficiles à franchir. Le climat soudano guinéen dont elle bénéficie avec des précipitations élevées fait de la localité une région verdoyante.
Le Paysage culturel Bassari de Guinée est composé de trois Secteurs à savoir Bokore au Nord, Amangathia au Sud- Est et Hotat au Centre. C'est une aire géographique et culturelle peuplée de deux groupes linguistiques distincts qui sont repartis entre quarante et un (41) villages dont trente-trois (33) peuplés exclusivement de Bassari, premiers occupants et principal peuplement du site et huit (8) villages à dominance Peul sédentarisés depuis des décennies.
Certains villages ne sont accessibles que par des chemins et des pistes difficilement carrossables. L'agriculture caractérisée par le système intensif traditionnel occupe une infime partie d'une grande superficie cultivable. Les grandes zones de forêt préservées abritent des nombreuses espèces animales dont une forte colonie de singes.
Selon certaines sources, les Bassaris seraient apparentés aux bantou d'Afrique centrale et australe, lieux à partir duquel ils auraient migré pour s'installer dans les hautes collines de Kédoudou et du Fouta Djalon. L'histoire de cette communauté minoritaire de la Guinée telle qu'elle est connue aujourd'hui est celle d'un peuple en lutte constante pour la survie des individus et du groupe.
P. Charet (1969) indique que les Bassaris auraient d'abord subi les conséquences d'une première migration Peul vers le Fouta Djalon au Xlème siècle. Ensuite, deux siècles plus tard ils auraient été progressivement refoulés par les Mandingues de Bélédougou (centre de l'actuel Mali) vers les contreforts nord du Fouta Djalon, leur habitat actuel. En fin, cette communauté a été victime de l'invasion de Koli Tenguéla au XVIème siècle ainsi que de plusieurs incursions qui se sont poursuivies jusqu'au XXème siècle et qui ont affecté durement les Bassaris (Charet 1969, R. Gessain 1963, Girard 1984, B. de Lestrange 1969, Maupoil 1954, Mungo Park 2000).
Ces attaques successives ont laissé des traces matérielles et immatérielles exceptionnelles notamment des monuments et des vestiges comme des abris sous roche et des grottes qui ont servi à cette population de lieu refuge, de perpétuation d'une tradition et constituent aujourd'hui de véritables sites archéologiques.
Toutefois, malgré ces différentes agressions aux conséquences désastreuses auxquelles les Bassaris ont été victime, les influences des peuples voisins et les contraintes liées à son environnement, ce peuple a su a par le biais de son interaction avec son milieu s'adapter à son terroir et développer une culture multiséculaire riche et spécifique à travers son occupation spatiale, son mode d'organisation sociale et son art.
Justification of Outstanding Universal Value
Le paysage culturel Bassari est une aire géographique et culturelle particulièrement représentative d'une culture et d'une civilisation datant du moyen âge. Il se caractérise par la beauté de son environnement pittoresque, la richesse d'une culture vivante, mais surtout par la résistance de sa population aux influences extérieures et son souci de préserver et diffuser son patrimoine exceptionnel.
Le mode d'occupation spatiale, d'organisation sociale, les techniques endogènes, et surtout les rites qui jalonnent les activités agraires et les étapes de la vie (de la naissance à la vie) restent particulièrement vivantes et spécifiques. Sa stratification sociale en général et son système des classes d'âge atypiques en particulier différencient les Bassaris des autres communautés de la Guinée.
Les spécificités du paysage culturel Bassari à travers la résilience de sa communauté aux facteurs hostiles à son existence d'une part et d'autre part son apport remarquable à la civilisation universelle à travers sa riche culture font de lui un bien exceptionnel.
C'est en raison de ces valeurs culturelles semblables avec les paysages culturels Bassari, Peul et Bedik de la République du Sénégal que l'UNESCO a inscrit celui-ci en 2012 sur la liste du patrimoine mondial.
Critère (iii) : Le paysage culturel Bassari, en dépit de l'influence des religions monothéistes (le christianisme et l'islam), et le contact avec d'autres peuples (peul et cognagui) a su préserver une culture exceptionnelle dont certains aspects sont aujourd'hui menacés de disparition.
La vie des Bassari est intimement liée à la nature. Cette interaction a favorisé le développement d'une culture exceptionnelle tournée vers la célébration de la nature et de la vie dans tous ses aspects. Les activités culturelles et agricoles qui jalonnent l'année tournent autour de l'initiation, du mariage, de la naissance, de la mort, mais aussi au tour des semailles, des désherbages, de la récolte des céréales, des rites de fécondité et de fertilité. Les récoltes des céréales annoncent le début de la saison sèche, période où les femmes s'activent surtout pour filer du coton, et s'adonner à la poterie, au jardinage, à la fabrication de salpêtre recueillie sur les murs. Les hommes pour qui c'est la période favorable, vont s'adonner à la chasse au gibier et s'occuper à la vannerie et au travail de la forge.
Les Bassaris, qui vivaient de chasse et de cueillette à l'origine, se sont transformés, en agriculteurs et pasteurs. La communauté développe également des activités liées à l'artisanat traditionnel qui demeurent très florissantes.
L'organisation de la société en classes d'âge au nombre de sept (7) régule la solidarité et précise les droits et devoirs des individus, qui les exercent et les cèdent, chaque six ans, aux classes inférieures. Il en est ainsi jusqu’au sommet de la pyramide des âges. L’avantage c’est que tout le monde s'identifie à l'autre et par conséquent veille sur l'autre, personne ne s'arroge un droit ou un pouvoir indéfiniment. Chaque classe a des rôles et prérogatives définis en fonction des circonstances (fêtes, repas, tâches agricoles...).
La communauté Bassari est caractérisée par des patronymes atypiques, commençant tous par la lettre B : BANGAR, BANGONINE, BEMOUNE, BIANQUINCH, BIDIAR, BIESS, BINDIA/BEINDIA, BONANG, BOUBANE.
Le système matriarcal et la gouvernance de la société caractérisée par trois types de pouvoir : administratif, coutumier et celui des femmes sont spécifiques à la communauté Bassari et représentent un témoignage exceptionnel sur une civilisation vivante.
Critère (v) : Le pays Bassari est un paysage exceptionnel qui illustre graphiquement une forme d'occupation du territoire caractéristique d'un stade de l'établissement humain et de sa relation avec l'environnement.
Les Habitats sont adaptés aux temps des guerres. Les constructions de forme circulaire, en blocs de pierre sont l’expression de l’interaction entre les habitants et la nature et sont en fonction des statuts des occupants. Toutefois, les habitats ont évolué avec la toiture tissée de chaume, de feuilles de rônier, de tiges de Bambou, de tiges de raphia. Les cases sont rapprochées les unes des autres et sont en général disposées en ligne aussi droite. En général, les villages sont construits sur l'arête d'une montagne, sur son flanc ou cachés dans des rochers.
Le modèle d'implantation et d'utilisation des terres du paysage culturel Bassari témoigne, avec l'architecture traditionnelle, les forêts sacrées et les sanctuaires, d'un système culturel socio-économique complexe.
Dans ce système, des pratiques agricoles et sociales particulières, des rituels, des croyances et une éducation traditionnelle ont contribué à assurer une occupation humaine durable grâce à une gestion respectueuse et durable des ressources limitées. Les Bassaris ont préservé des coutumes originales sur les plans agricole, social, rituel et surtout spirituel, adoptées de manière durable aux conditions environnementales bien préservées, dans lesquelles les cultures locales originales sont restées vivantes.
Critère (vi) : Le paysage culturel Bassari est le témoignage éloquent d’une tradition spirituelle et culturelle forte et continue qui perdure depuis de nombreux siècles malgré les influences du christianisme et de l'islam.
Dans la croyance Bassari, la nature est peuplée de génies, d'être invisibles qui y ont précédé les hommes. Ces derniers doivent établir un pacte avec les êtres afin de bénéficier de leur protection. Les ancêtres appartenaient à ces génies avant de prendre la forme humaine. A sa mort l'être humain devient génie et ce sont ces génies qui ont désigné le caméléon comme responsable des Bassari. C'est en cela que le caméléon est l'animal totem de cette communauté.
Les croyances spirituelles sont étroitement liées à la nature, avec de nombreux sites naturels considérés comme sacrés. Les forêts, les cours d'eau et les montagnes jouent un rôle central dans leurs pratiques religieuses. L'art Bassari, en partie axé sur la métallurgie, est utilisé à la fois pour la décoration cosmétique et les insignes liées à la société d'initiation.
Les Bassaris ont une riche tradition musicale, leurs chants et danses traditionnels sont souvent liés aux cérémonies et aux rituels, reflétant leur riche patrimoine culturel. Les cérémonies d'initiation sont des événements majeurs, elles marquent le passage à l'âge adulte et impliquent des rituels, des danses et l'utilisation des masques. Ces cérémonies sont essentielles pour maintenir la cohésion sociale et transmettre les valeurs culturelles aux générations actuelles et futures.
Les Bassaris ont également une riche tradition orale dominée par des contes, légendes, proverbes et des mythes transmis de générations en génération. Ces éléments jouent un rôle crucial dans la préservation de leur identité culturelle.
Statements of authenticity and/or integrity
Malgré les influences extérieures, les caractéristiques essentielles du paysage culturel Bassari n'ont pas été modifiées jusqu'à nos jours et se sont ainsi maintenues depuis cette époque grâce à l'utilisation de matériaux et techniques traditionnel. Les techniques et savoir-faire endogènes, les rites d'initiation et les forêts sacrées..., restent activement présents dans la vie de la communauté car ils font partie de sa culture vivante. La célébration et l'observance régulières des fêtes et cérémonies attestent de leur continuité culturelle.
Les éléments essentiels du paysage culturel sont entretenus et transmis de génération en génération, l'architecture traditionnelle entièrement constituée de ressources naturelles renouvelables (construction en pierre dont les joints sont en mottes de terre pétrie).
Les bâtiments traditionnels sont vulnérables aux changements de matériaux et de techniques endogènes de construction. Les toits en chaume, en particulier, exigent un entretien régulier.
Le paysage Bassari est protégé au niveau national et international.
Au niveau national, il est protégé par la loi N° L/2016/063/ AN relative à la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel national, ainsi que par des codes sectoriels : le code pénal, de l’environnement, de l'urbanisme et de l'artisanat. Au niveau international, le paysage culturel Bassari est protégé par la Convention du patrimoine mondial culturel et naturel (1972) et celle sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003).
Comparison with other similar properties
Au plan national, le paysage culturel Bassari est difficilement comparable à d'autres paysages. Toutefois, il est évident qu'il a des traits de ressemblance sur certains aspects avec le paysage culturel Gbérédou-hamana situé en Haute Guinée. En effet, du point de vue composantes, ces deux (2) biens ont des traits communs notamment sur le plan de l'organisation sociale avec l'existence des classes d’âge ; la croyance aux esprits avec l'existence des autels, des bois sacrés et des points d'eau. Leurs architectures étant toutes traditionnelles (les cases traditionnelles couvertes de chaumes), à la différence, les constructions des Bassaris sont faites en pierres tandis que celles de Gbérédou-hamana sont en mottes de terre pétrie.
Par l'authenticité des villages et le bon état de sauvegarde des expressions culturelles (festivités, langues, danses, architecture), le paysage Bassari de Guinée est comparable aux paysages culturels Bassaris, Peul et Bedik du Sénégal déjà inscrit sur la Liste du patrimoine du patrimoine. En effet, ces deux paysages peuplés par les mêmes groupes sociaux ont à quelques exceptions près les mêmes valeurs sociales et expressions culturelles, les mêmes caractéristiques physiques humaine et économique, donc la même civilisation.