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14 Novembre 2002 Résumé de la séance
INAUGURATION
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Le Congrès
international Patrimoine mondial 2002 : héritage partagé,
responsabilité commune, tenu à l’occasion
du 30e anniversaire de la Convention du patrimoine mondial, a été
ouvert le 14 novembre à la Fondation Cini à Venise par
Francesco Bandarin, Directeur du
Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO. |
Marcio Barbosa,
Directeur général adjoint de l’UNESCO a prononcé
le discours d’ouverture dans lequel il a rappelé aux
participants que l’Assemblée générale des
Nations Unies avait proclamé 2002 Année des Nations
Unies pour le patrimoine culturel, ce qu’il a estimé
constituer « une excellente occasion pour l’UNESCO d’approfondir
et de développer la coopération internationale dans
le domaine de la protection du patrimoine et de la promotion de la
diversité culturelle. » |
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Nicola Bono,
sous-Secrétaire italien pour la Culture, a ensuite pris la parole
pour traiter des « Partenariats du tourisme culturel ». Il a
insisté sur l’importance d’un partage de l’expérience
de l’Italie en matière d’identification, de protection
et de promotion du patrimoine. Il a mentionné en particulier une
nouvelle loi italienne qui soutient les réseaux touristiques locaux
en favorisant le développement économique et en attirant des
investissements pour des projets de tourisme culturel, spécialement
ceux qui sont associés à la cuisine comme à l’art
et l’artisanat d’une région.
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Paolo
Costa, Maire de Venise, a évoqué un dilemme devant
le Congrès, rappelant que « c’est un privilège,
mais c’est aussi un devoir de sauvegarder notre patrimoine culturel.
» Il a souligné que « protéger notre patrimoine
culturel, c’est aussi protéger notre identité.
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Luigino Busatto,
Président de la Province de Vénétie, a proclamé
que « nous devons donner la priorité à nos écoles
et à nos jeunes ». Il a fait remarquer que les programmes
scolaires actuels sont trop axés sur l’avenir. «
Il faut mettre l’accent sur l’histoire et sensibiliser
aux valeurs patrimoniales », a-t-il ajouté. Luigino Busatto
a exprimé le souhait que les résultats du Congrès
« permettent d’aboutir à de nouveaux programmes
pour les jeunes, les citoyens de demain. » |
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10h30 >11h30
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L’Ambassadeur
de bonne volonté de l’UNESCO, Wole
Soyinka a fait un discours passionné
qui, de l’avis de nombreux participants « justifiait seul
le voyage à Venise ». Il a demandé aux participants
si l’on pouvait oublier les Talibans et la destruction des bouddhas
de la Vallée de Bamiyan. « Nous avons tendance à
oublier que ce genre de menace est toujours d’actualité
» a mis en garde Soyinka. Donnant des exemples d’affrontements
entre cultures relieuses dans son pays natal, Soyinka a évoqué
la destruction de foyers ibos comme « une sentence de mort pour
le patrimoine traditionnel », expliquant qu’une telle
destruction constitue « non seulement un nettoyage environnemental
mais aussi culturel ». Citant d’autres exemples de fanatiques
religieux qui détruisent des trésors culturels au Cambodge,
en Tougoslavie et au Moyen-Orient, Soyinka a ainsi conclu : «
Il y a dans tout cela une leçon qu’il nous faut apprendre
: les crimes contre l’humanité tendent à aller
de pair avec la destruction de la culture des victimes. » Il
a terminé son allocution en demandant aux participants de «
penser à l’illumination que nous avons peut-être
perdue. » |
Dans le deuxième discours-programme, Tamás
Fejérdy, Président du Comité du patrimoine mondial,
a présenté la Déclaration de Budapest sur le
patrimoine mondial qui, a-t-il expliqué, « fournit le
cadre stratégique de partenariats du patrimoine mondial actuels
et futurs », plus précisément, en renforçant
la crédibilité de la Liste, en assurant une conservation
effective, en favorisant le développement des capacités
et en développant la sensibilisation du public et sa participation
active par la communication. En « actualisant sa visée
stratégique », Tamás Fejérdy a rappelé
que le Comité « a fait part de son engagement et exprimé
sa volonté de coopérer et de rechercher l’aide
de tous les partenaires pour servir le patrimoine mondial. » |
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11h30 >13h00
LA COOPERATION INTERNATIONALE
POUR LA CONSERVATION DU PATRIMOINE MONDIAL |
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Mounir
Bouchenaki, sous Directeur général de l’UNESCO
pour la Culture, a ouvert la seconde séance qui traitait de
La coopération internationale pour la conservation du patrimoine
mondial en faisant remarquer que « Venise est l’endroit
parfait pour un tel débat car cette ville a été
préservée grâce à des partenariats internationaux.
» Mounir Bouchenaki a félicité le Gouvernement
italien de son rôle de promoteur du patrimoine culturel et plus
particulièrement de sa généreuse contribution
volontaire de 2,4 millions de dollars à l’UNESCO pour
aider à sauvegarder le patrimoine d’autres pays, dont
la Ville de pierre de Zanzibar et la Médina de Fès. |
L’Ambassadeur d’Italie, Francesco
Aloisi de Larderel, a rappelé avec force que la protection
du patrimoine culturel est une composante importante de la politique
internationale de l’Italie selon laquelle « Une meilleure
compréhension de notre patrimoine mondial commun devrait amener
à un plus grand respect de cultures différentes. »
Il a également suggéré que la Convention de 1972
constitue un modèle pour un autre type de protection du patrimoine,
proposant que « Une partie de ce que nous avons appris en trente
ans de protection du patrimoine mondial puisse être intégré
dans un projet de convention sur le patrimoine immatériel ». |
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Walter
Erdelen, sous Directeur général de l’UNESCO
pour les Sciences, qui présidait également la séance
avec Mounir Bouchenaki, a souligné l’importance de diriger
plutôt la coopération internationale vers des réseaux
de sites plutôt que vers des sites séparés, et
de développer les liens entre certaines aires protégées
comme les paysages marins et terrestres. Il a également informé
l’assemblée que les Présidents du Programme L’homme
et la biosphère (MAB) et du Comité du patrimoine mondial
allaient se rencontrer pour renforcer la collaboration entre le patrimoine
mondial et le MAB. |
« Le système actuel de présentation
du patrimoine n’est pas adapté », a déclaré
Christina Cameron, Directrice générale, Direction des
Lieux historiques nationaux, Parcs Canada – « Il faut
le repositionner dans la communauté internationale. »
Elle a suggéré de la faire par un « marketing
altruiste », en publiant par exemple la Liste du patrimoine
mondial en péril avec le coût de la réhabilitation
et de la conservation. « Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre
de choisir d’investir dans le patrimoine mondial ? » a-t-elle
demandé. « Cela contribue à l’économie
par le développement régional et les revenus du tourisme,
à la protection de la biodiversité, à la recherche
scientifique – en tant que laboratoire naturel, et c’est
instrument unique de construction de la paix en tant que conservatoire
de la mémoire pour le patrimoine naturel et culturel de notre
monde. » |
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LE
CADRE INTERNATIONAL DES INSTRUMENTS JURIDIQUES
Francesco Francioni, Président de la Chaire de droit international
et vice-recteur de l’université de Sienne,
ancien Président du Comité du patrimoine mondial
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Francesco
Francioni a traité de l’influence
de la Convention du patrimoine mondial sur le droit international,
notamment par l’adoption d’une approche globale de la
culture et de la nature. Il a indiqué que la Convention anticipait
le formidable développement du droit international de l’environnement
auquel on assiste depuis une vingtaine d’années, déclarant
aujourd’hui que « L’humanité manifeste depuis
peu un souci commun concernant la biodiversité et les changements
climatiques ; cela exige une action préventive dans le droit
des traités comme dans la réglementation générale.
» Francesco Francioni a demandé une « interprétation
contextuelle » de la Convention en termes actuels, ajoutant
: « Par exemple, en 1972, les ressources non renouvelables étaient
uniquement définies comme des richesses minérales, mais
nous réalisons aujourd’hui que les ressources vivantes,
comme l’eau et les poissons, peuvent s’épuiser.
». Il a également insisté sur le « principe
fondamental » de coopération entre les Etats qu’il
a jugé « particulièrement important pour éviter
la dispersion et la perte qui posent actuellement un grave problème
en raison des vols, du pillage, du démembrement des statues,
du commerce illégal, du trafic illicite de biens culturels,
et autre. Le devoir de coopérer est vraiment devenu aujourd’hui
une obligation. Les Etats parties ne doivent pas le considérer
comme une simple option. »
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14h30 >16h00
ELARGIR LE CERCLE DES
PARTENAIRES |
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La quatrième séance
du Congrès avait pour thème : « Elargir le cercle
des partenaires » et était présidée par
José Maria Ballester, Directeur de la Culture pour le Patrimoine
culturel et naturel au Conseil de l’Europe. Fondée sur
de nombreuses études de cas de villes historiques – une
des plus larges catégories thématiques du patrimoine
mondial –, la séance a particulièrement étudié
comment les partenariats peuvent favoriser le développement
social et économique.
Définissant la collaboration entre le Conseil de l’Europe
et le Centre du patrimoine mondial comme « toujours complémentaire
», José Maria Ballester a fait remarquer que l’élargissement
du cercle des partenaires demande un effort commun. « Sur
le plan local, régional, national et international, la multiplicité
des compétences devient de plus en plus importante »
a-t-il ajouté. « Quelle est la meilleure manière
de protéger le patrimoine ?, Pourquoi ? Et pour qui ? Il
y a un moment où nous devons travailler ensemble à
la prévention des conflits en développant nos connaissances
interculturelles et inter-religieuses pour favoriser la diversité
culturelle ». Il a conclu en rappelant que « Le patrimoine
culturel peut maintenant être un vecteur de développement
économique, spécialement dans les sociétés
fragiles. » |
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Jaime
Lerner, Gouverneur de l’Etat du Paraná au Brésil,
a choisi une approche philosophique des partenariats, fondée
sur sa longue expérience de conception et d’application
de politiques générales de conservation pour les villes.
« La mise en valeur du patrimoine est un processus d’apprentissage
» a-t-il déclaré, ajoutant que « Apprendre
à comprendre le problème est la clé de la préservation.
» Il a rappelé aux participants que penser aux villes
en tant que dernier refuge de la solidarité est la meilleure
manière d’espérer pouvoir les préserver.
« Il est possible de faire des changements positifs dans toutes
les villes du monde en moins de deux ans » a affirmé
Lerner, « mais nous devons avoir une volonté politique,
une stratégie et de la solidarité. Ce n’est pas
tant une question d’argent qu’une question de partage
des responsabilités.» |
Franco Passacantando,
Doyen du Conseil des Administrateurs de la Banque mondiale, a expliqué
l’action de la Banque mondiale vis-à-vis du patrimoine
culturel selon deux catégories : 1) des politiques de sauvegarde,
telles que la prévention des dommages à des sites culturels
; 2) des politiques de prêts pour le patrimoine culturel, telles
que le réaménagement de sites historiques en zones rurales,
en fournissant un soutien financier aux gouvernements et à
des institutions privées. « C’est un petit programme,
mais non sans importance » a déclaré Franco Passacantando.
Les possibilités de futurs partenariats dépendent
de l’équilibre possible entre la conservation et le
développement ; de ce que représentent les retombées
économiques et sociales ; et du fait que les deux partenaires
acceptent les compromis pour obtenir des résultats.
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Jean Bakole
du CNUEH (Habitat), a prononcé une allocution au nom de la
Directrice exécutive d’Habitat, Anna Kajumolo Tibaijuka,
en soulignant la nécessité de faire converger les approches
environnementales et sociales dans les efforts de conservation. Il
a instamment demandé que l’on prenne en compte la politique
de l’habitat social dans les plans de protection du patrimoine
culturel des villes. |
Yves Dauge,
Membre du Sénat français pour la Région Indre-et
Loire et Maire de Chinon, a animé le débat en défendant
la mise en réseaux et la décentralisation. « Nous
devons développer l’engagement des Etats parties »
a-t-il demandé, « mais ils doivent se démocratiser
afin que nous puissions développer la participation des régions
et des villes ». Yves Dauge a fait remarquer que les lois évoluent
avec le temps et s’améliorent souvent. « Nous devons
évaluer la manière dont nous appliquons la législation
» a-t-il observé. Il a recommandé que chaque Etat
partie à la Convention du patrimoine mondial évalue
les lois dont il dispose pour protéger le patrimoine naturel
et culturel sur son territoire, et partage ensuite son expérience
avec d’autres pays. |
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Une séance de questions
et réponses à suivi le débat. Francesco
Bandarin, Directeur du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO
a demandé à Franco Passacantando pourquoi, malgré
l’engagement exprimé, la collaboration entre la Banque
mondiale et l’UNESCO ne s’était pas concrétisée.
Franco Passacantando a répondu que cela était dû
aux idées fausses de nombreux partenaires sur le patrimoine
mondial, mais qu’il espérait que son discours changerait
leur optique. Il a suggéré que les organisations commencent
par des partenariats informels avant d’en établir d’officiels.
Selon lui, « Une approche consultative pourrait aboutir à
davantage de partenariats officiels. » |
16h30>18h30
ASSOCIER
LA CONSERVATION DU PATRIMOINE MONDIAL AU DEVELOPPEMENT SOCIAL
ET ECONOMIQUE
Groupe de discussion présidé par Achim
Steiner, Directeur général de l’UICN –
Union mondiale pour la nature
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Le Maire de Venise, Paolo
Costa, a ouvert la séance en évoquant la logue
histoire de la complexité des relations de sa ville avec les
touristes, dont le nombre atteint 12 millions par an. Etant donné
la géographie unique de la ville, elle ne peut accueillir que
40 000 visiteurs par jour mais « si ce nombre est dépassé,
cela devient presque insupportable » a ajouté Paolo Costa
avec une mise en garde : « Si le tourisme devenait la seule
activité, cela détruirait la magie de Venise. »
Frances Cairncross,
Directrice de la rédaction de la revue The Economist et auteur
de Costing the Earth et de Green Inc., s’est interrogée
sur la question de l’assignation d’une valeur économique
au patrimoine et à la culture. « C’est terriblement
difficile de donner une valeur à un beau paysage » a
t-elle dit, suggérant que la meilleure solution devant l’explosion
du tourisme était peut-être de « rationner notre
patrimoine » en « utilisant les forces du marché
pour nous aider plutôt que pour porter atteinte à ce
qui est beau. »
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Corrado Clini,
Directeur général du Ministère italien de l’Environnement,
a discuté de la manière dont les partenariats entre entreprises
et organismes de protection de l’environnement peuvent améliorer
la qualité des destinations touristiques et stimuler en même
temps l’économie, notamment lorsqu’ils sont régis
par une réglementation appropriée, de bonnes pratiques et
des accords volontaires.
La recherche de moyens équitables de répartir les retombées
du tourisme, tel était le sujet de l’intervention de Rili Hawari
Djohani, d’Indonésie – le
plus grand archipel du monde. Rappelant que la moitié de la population
mondiale vit dans des zones côtières, elle a souligné
que bien que la création des sites marins du patrimoine mondial soit
essentiellement fondée sur la protection de la biodiversité,
il est souvent difficile d’expliquer l’importance de ces sites
marins aux pêcheurs locaux. En tant que Directrice du Programme indonésien
de protection des zones côtières et marines, elle a décrit
les efforts déployés pour créer d’autres incitations
économiques pour les communautés locales déplacées.
Lota Melamari,ancien
Directeur général des Parcs nationaux de Tanzanie, a centré
son exposé sur le renforcement du rôle de la communauté
dans la gestion des sites du patrimoine mondial, citant en exemple le cas
du Parc national tanzanien du Serengeti. Lota Melamari a également
regretté le sous-développement relatif du patrimoine africain
qui ne compte à ce jour que 53 sites inscrits au patrimoine mondial.
De même, Dawson Munjeri,
spécialiste en gestion du patrimoine culturel du Zimbabwe, a déclaré
que malgré les attentes selon lesquelles la notion de patrimoine
culturel allait améliorer l’équilibre régional
de la Liste du patrimoine mondial, la plupart des paysages culturels inscrits
jusqu’ici se trouvent en Europe – qui possède déjà
le plus grand nombre de sites.
Enfin, Eugenio Yunis,
Chef de la section Développement durable du tourisme à l’Organisation
mondiale du tourisme, a traité de la nécessité d’une
« bonne gestion » des flux de touristes. Il a rappelé
que c’est en faisant usage du patrimoine qu’on lui donne de
la valeur « mais uniquement si on l’utilise de manière
raisonnable et durable. » Il a proposé d’envisager le
classement de grandes aires protégées – et même
de régions entières – pour protéger le patrimoine
mondial.
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